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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 26.1901

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Nr. 2
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Lechat, Henri: Les origines et le développement du Temple grec, [4]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24808#0178

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

s’épanouit semblent n’exister plus que pour en être le soutien et
l’offrir aux regards : ils sont presque réduits, si j'ose dire, au rôle
de porte-bouquets pour ces Heurs de pierre. On est ainsi entraîné à
oublier un peu leur rôle essentiel dans la construction ; on ne
reconnaît pas au premier coup d’œil les lignes principales, toujours
si présentes et si nettes dans le temple dorique. — Puis, par une
sorte de contagion difficile à éviter, même les parties qui semblaient
devoir échapper au luxe des ornements se sont laissé quelquefois
envahir à leur tour. Ne vit-on pas, à l’Artémision d’Ephèse, dès le
vi° siècle avant J.-C., les colonnes de la façade décorées de grandes
figures sculptées en relief, qui tournaient comme une procession
au-dessus de la haute base moulurée? Sans insister sur des fan-
taisies aussi exceptionnelles, on comprend aisément que l’édifice
ionique, ayant fait du superflu son nécessaire, ayant mis au premier
plan l’abondance et l’éclat et la grâce du décor, devait s’affranchir
des règles sévères à l’observance desquelles le temple dorique s’est
complu avec une sorte de noble et stoïque fierté. U a pris ses aises,
il a usé d’autant de libertés qu’il lui a été possible. Un détail, d'ail-
leurs secondaire, achèvera de le montrer : alors que la colonne
dorique, malgré l’épaisseur considérable de son fût, n’a jamais eu
que seize ou vingt cannelures, vingt-quatre au plus, la colonne
ionique, bien plus maigre, n’en a jamais eu moins de vingt-quatre
et en a compté parfois quarante et quarante-quatre ; en outre, ces
cannelures qui, jusqu’au vc siècle, s’étaient coupées à angle vif,
comme les cannelures doriques, ont paru un jour trop sèches et
trop austères pour leur souple et brillant voisinage, et on imagina de
les séparer par d'étroits listels, qui désormais, pareils à autant de
rubans tendus, semblèrent rattacher les fines moulures ornées de la
hase aux fines ciselures du chapiteau.

En somme, l'architecture ionique répondait à certains désirs
légitimes de l’imagination, désirs d’élégance, de luxe, de somptueuse
parure, de fantaisie et de charme imprévu, auxquels ne pouvait
donner satisfaction l'inflexible architecture dorique, soucieuse seu-
lement de la force, de la netteté rectiligne, de la logique. L’une et
l’autre, par les noms qui très justement les désignent, correspondent
aux tendances d’esprit divergentes des deux tribus ionienne et
dorienne, entre lesquelles se partagent les éléments de supériorité
de la race grecque. Au point de vue historique, ces tribus peuvent
bien échapper en partie à notre prise ; elles fuient sous les doigts
 
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