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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 8.1912

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Nr. 2
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Du Bus, Charles: L' art à l'exposition du Cabinet des cartes
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https://doi.org/10.11588/diglit.24885#0136

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120

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

observe, il vend, il achète; il veut connaître ses clients éventuels,
leurs costumes, leurs princes; il est curieux des animaux dont on
lui proposera la dépouille, de leur habitat, du séjour des arbres
exotiques dont les fruits étonnent son regard; il s’inquiète enfin de
se heurter aux monstres dont son imagination naïve peuple à loisir
l'immensité des Océans. A ces préoccupations multiples répondent
les images des portulans.

En voici deux particulièrement dignes d’attention. Celui du
Majorquain Salval de Pilestrina1, de 1511, est un superbe parchemin
oblong où la Méditerranée classique s’entoure des royaumes chré-
tiens et musulmans signalés par leurs monarques : tel est, en effet, le
thème habituel du décor.

Parcourons la cote depuis Gibraltar : au nord, voici les rois
d’Espagne et de France, vêtus l’un de sinople, l’autre de pourpre,
appuyés tous deux sur leur écu, sans rien dans leur visage qui
sente le portrait. Au César germanique qu’écrase une lourde cou-
ronne fermée, succèdent les souverains moins solennels de Pologne
et de Hongrie, confinant au lointain tsar de Novgorod, demi-Turc à
turban rouge, affublé d’un habit vert et tenant gauchement sa longue
épée la pointe en bas. Dans l’Asie centrale, c’est le grand « cha » de
Tartarie, quelque Charlemagne barbu, armé de l’inévitable cimeterre.
Le Soudan de Babylone, hôte de l’Egypte, se prélasse sur des cous-
sins et montre sur sa targe l’image inattendue d’un calice. Par delà
l’Erythrée sanglante règne, sous sa mitre, le mystérieux prêtre Jean.
Des rois, sauvages « de carnation » à demi-nus, drapés de pourpre,
jalonnent le désert jusqu’à l’Océan, les mains chargées d’un or
légendaire. Aux extrémités soufflent huit vents nimbés d’azur, et la
tutélaire Vierge à l’Enfant, la Madone rouge et bleue des missels,
veille d’en haut sur les navigateurs au péril de la mer.

Cette Madone figure sur la plupart des portulans; on lui préfère
parfois une Crucifixion, une Annonciation. Mathieu Prunes, autre
Majorquain, s’est inspiré du premier de ces deux motifs. Son por-
tulan de d 58G2 a, lui aussi, pour centre, la Méditerranée, mais il est
plus étendu que celui de Pilestrina. Comme son compatriote, Prunes
s’attache à caractériser les pays par le costume de leurs princes.
Son roi de France, son Empereur, qui rappellent de loin Henri II et
Charles-Quint, s’abritent sous des tentes ainsi que les autres mo-
narques. Si nous nous attachons à l’Afrique, partie la plus curieuse

1. Cat., n° 257. Acheté à M. Hennin, en décembre 1844.

2. Cat., n° 103. Acheté de M. Advielle (1876).
 
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