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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 8.1912

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Marcel, Henry: Un peintre de la vie rustique au XVIIe siècle: Jean Siberechts
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https://doi.org/10.11588/diglit.24885#0403

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378

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Quant à Jean-François Millet, dont le lecteur attend peut-être le
nom, si j’ai cédé naguère à la tentation d’évoquer Siberechts auprès
de lui1, c’était bien plutôt pour sonner, comme eût dit Sainte-Beuve,
le coup de cloche en faveur d’un inconnu plein de sincérité et de
mérite, qu’avec la pensée de rapprocher deux visions que sépare, plus
encore que l’inégalité du talent, la pensée sombre et fataliste du
maître de Gréville. Le métier, chez Siberechts, n’offre d’autre poé-
sie que celle des sujets, c’est-à-dire celle de l’aisance et de la santé.
Les paysans, très exactement traduits dans leurs volumes, leurs
allures, leurs accoutrements, où une touche de bleu clair, de jaune
ou de rouge vif affirme le goût des septentrionaux pour la couleur,
sont peints d’une façon appliquée, peut-être un peu lourde. Le ton
terre cuite des chairs, les gris noirâtres qui transparaissent sous le
pigment, dans les verdures et les ciels, donnent à l’œuvre de l’artiste
un soupçon d'uniformité.

Ces réserves faites, le peintre demeure un témoin singulière-
ment probe et qualifié des mœurs campagnardes dans les Pays-Bas
au xvu° siècle. Entre les bouffons qui n’ont vu, dans la vue rustique,
que ses godailles et ses rixes, et les paysagistes purs, tels que Cuyp,
qui ont fait du paysan l’accessoire et comme le bétail à deux pieds
des prairies, devant le miroir des eaux, ou sous la gloire expirante
du ciel, Siberechts expose les titres à l’estime et à la sympathie des
braves gens qui font pousser le blé et dispensent le lait de leurs
bêtes. C’est un rustique, sans humour comme sans mélancolie, qui
se plaît aux êtres et aux choses qu’il peint. Là, sans doute, est le
motif qui, de loin en loin, dans quelques musées clairsemés, attire et
retient sur lui l’attention du passant. Et c’en est assez pour mériter
qu’au prix d’une légère variante, on lui fasse application du vers
connu :

Ton art est franc et sain, brave homme, il fait aimer.

HENRY MARCEL

1. Henry Marcel, J.-F. Millet, Paris, Laurens, in-8 (colt, des Grands Artistes).
 
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