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— 189 —

CORRESPONDANCES PARTICULIÈRES.

Paris.

NÉCROLOGE ARTISTIQUE DE 1863.

Je voulais examiner devant vos lecteurs
les modifications radicales qu'a apportées à
la constitution de notre Ecole des Beaux-
Arts un décret récent et dire quelques mots
sur une brochure au moins maladroite que
M.Ingres a cru devoir écrire sur ces réformes ;
mais je remets ce soin à une autre corres-
pondance, car aujourd'hui un devoir plus
impérieux et plus pressant me réclame.

Avant que l'année 1863 soit terminée, je
veux dresser la liste funèbre des artistes, trop
nombreux, hélas! dont nous regrettons la
perte, je veux leur payer un dernier tribut
de louange, et, en rendant à leur mémoire
ce suprême souvenir, rappeler une dernière
fois les titres qu'ils ont acquis à la réputation.

Je ne puis entrer ici dans de longs détails,
et je n'ai point l'intention d'entreprendre
une appréciation critique de tous ceux que
je vais nommer. Je m'efforcerai seulement,
préparant les matériaux aux classificateurs
de l'avenir, de noter et de rapprocher les
dates principales de la vie de chaque artiste,
surtout l'époque de leur naissance, et de rap-
pelerles principaux travaux, les récompenses
et les distinctions qui doivent sauver leur
nom de l'oubli.

Peut-être vos lecteurs pourront-ils trouver
dans ces courtes notes quelques détails inté-
ressants à ajouter aux articles de votre Dic-
tionnaire des Peintres si complet et si exact.
Je me suis borné, dans ce catalogue nécrolo-
gique, à la France, laissant à vos autres cor-
respondants, bien mieux renseignés que moi
quant à ce qui les regarde, le soin de com-
pléter cette liste par le nom de leurs artistes
nationaux.

Je termine cet avertissement préliminaire
en mettant en garde les lecteurs contre l'au-
thenticité de certains recueils ou dictionnaires
universels, qui donnent des renseignements
très inexacts sur les artistes contemporains.
Ainsi nous nous sommes abstenu de consul-
ter le Dictionnaire des contemporains de Va-
pereau, compilation souvent très imparfaite.
Nous avons demandé surtout nos notes à ces
recueils spéciaux qui paraissent hebdoma-
dairement et enregistrent de courtes notices
biographiques au fur et à mesure de la mort
des artistes connus. La Chronique des arts et
de la curiosité, journal périodique créé pour
mettre les abonnés de la Gazette des Beaux-
Arts au courant des nouvelles journalières,
nous a paru présenter, plus que tout autre,

les garanties de sincérité nécessaires à un
travail comme celui-ci.

Horace Vernet , né le 30 Juin 1789, est le
dernier et le plus populaire de cette famille
des Vernet qui s'illustra dans tous les genres.
Horace lui-même , s'essaya tour-à-tour à la
marine, aux scènes historiques et aux scènes
de genre; mais ses plus belles pages lui ont
été inspirées par les souvenirs patriotiques
des guerres de l'Empire et des campagnes de
l'Algérie. Nous n'avons pas le loisir de pré-
senter, même en résumé, l'histoire de cette
existence si bien remplie. M. L. Lagrange,
dans la biographie que vient de publier la
Gazette des Beaux-Arts et dans son livre de
la dynastie des Vernet, donne avec une exac-
titude scrupuleuse et avec un tact exquis le
récit de la vie et l'appréciation du talent du
dernier Vernet. Ajoutons qu'on prépare en
ce moment un autre travail sur cette glorieuse
famille d'artistes, que les documents les plus
intéressants et les plus intimes ont été con-
sultés pour cette œuvre et que la correspon-
dance d'Horace, pleine de vivacité et d'entrain,
va nous révéler cette populaire figure sous
un jour tout nouveau. Le chef-d'œuvre d'Ho-
race Vernet est resté le Combat à la barrière
de Clichy, qu'il peignit alors qu'animé d'un
généreux patriotisme, il ne voulut pas con-
sentir à sacrifier à sa fortune, sur la demande
des Bourbons, sa sympathie pour l'époque
impériale. En 1825, il était devenu, par cette
rare indépendance, le centre de l'opposition
napoléonienne. Il n'en fut pas moins nommé
directeur de l'école de Rome, en 1827. Lors-
que le gouvernement de Juillet eut remplacé
la branche aînée, il devint, sous Louis Phi-
lippe, le peintre habituel de la famille royale
et de tous les triomphes de l'armée française
en Algérie. La prise de Constantine, la prise
de la Smala et vingt autres toiles remarqua-
bles, je ne cite que les plus populaires, at-
testent , dans les vastes salons de Versailles,
la verve, la fécondité et l'esprit tout français
du descendant de Joseph et de Carie Vernet.

Tous les gouvernements tinrent successive-
ment à honneur de s'attacher un peintre aussi
populaire, et quand, un mois avant de mou-
rir, Horace Vernet recevait la croix de grand
officier de la Légion d'honneur avec une
lettre amicale de l'Empereur, l'opinion pu-
blique s'empressait d'applaudir à cette der-
nière récompense. Une des dernières œuvres
d'H. Vernet est un fort beau Portrait équestre
de Napoléon III. Après une longue maladie,
il est mort le 18 Janvier, et, avec lui, s'est
éteinte la dynastie des Vernet.

M. Viel, architecte, né en 1796, a acquis
une certaine réputation par la construction
du palais de l'Industrie, grand monument in-
commode et inutile que vous connaissez, où

se font maintenant les expositions des Beaux-
Arts, de l'Industrie et des animaux; chaque an-
née on déplore l'incommodité de ce palais,
mais il ne semble pas qu'il doive être rem-
placé de sitôt par un monument plus appro-
prié à.ses emplois divers. M. Viel est mort
le 8 Mars.

Bra, statuaire, né à Douai le 23 Juin 1797,
et mort au mois d'Avril dans sa ville natale,
est peu connu maintenant. C'est une de ces
gloires provinciales dont Paris fait peu de
cas, quelquefois avec un trop injuste dédain.
M. Bra était décoré depuis 1825.

Emile Lodbon, né à Aix en 1809, ne quitta
guère le midi. Elève de Ant. Constantin, au-
tre réputation méridionale, il alla à Borne en
1829, exposa pour la première fois à Paris,
au Salon de 1833, et, plus heureux que M. Bra,
parvint à obtenir un certain renom dans la
capitale. Décoré à la suite de l'Exposition
universelle de 1855, il sutdonner à l'école de
Marseille un nouvel élan. Plusieurs élèves de
M. Loubon ont été distingués par la critique
au dernier salon, quelques-uns ont obtenu
des récompenses. Après avoir traité les scènes
de genre et les sujets religieux, M. Em. Lou-
bon s'attacha plus particulièrement à rendre
le soleil, la chaude verdure et les plaines
brûlées des paysages méridionaux.

Il est mort le iir Mai.

Jean Etienne Delécluze , né en 1781, avant
de se vouer tout entier à la critique d'art,
commença à étudier la peinture sous la di-
rection de David. Il remporta même avec
une Andromaque, conforme aux lois classiques
de l'époque, la grande médaille d'honneur.
Ce succès ne l'empêcha pas de quitter vers
1816, la pratique pour la critique d'art. Après
avoir écrit dans différents journaux et colla-
boré à plusieurs revues, il s'attacha enfin au
Journal des Débats dont il resta rédacteur
pendant trente ans, jusqu'au moment de sa
mort. La critique d'art perdit son doyen vers
le milieu de Juillet. Delécluze resta toujours
fidèle aux principes qu'il avait reçus dans
l'atelier de David et il mit le nom de son
maitre sur un livre consacré à l'histoire et à
la louange de l'école de l'Empire. Ecrivain
distingué et connaisseur éclairé, Delécluze
sut toujours respecter les hommes dont il
ne partageait pas les tendances et tou-
jours il s'abstint de ces excès si justement
reprochés à certains autres critiques. Quel-
que temps avant sa mort il avait réuni sous
ce titre : Souvenirs de soixante années, l'his-
toire de sa vie et un peu celle de ses con-
temporains. Il se préparait à publier la
série de ses articles des Débats au moment
où il est mort. Le numéro de la Gazette des
Beaux-Arts du mois de Juin, renferme une
notice très bien faite sur Delécluze par M. L.
 
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