lettres d’une légende en grec ITIE^MCEN7. Le registre majeur oppose deux groupes : d’une part
le dieu Osiris8 sur un trône, que suit un personnage à disque doré portant sur les épaules une
antilope et tenant devant lui trois canards, d’autre part une femme, couronnée elle aussi d’un
disque, saisissant une antilope et portant un grand plateau, où est agenouillée une statuette dorée,
ainsi qu’un homme tenant une longue aiguière et tirant derrière lui un daim9. Le disque doré qui
surmonte la tête des personnages évoque l’ornament des statuettes-âmes méroïtiques10; également
kouchite semble la coiffure de deux personnages masculins : une étroite calotte que borde un
bandeau11 12. L’éclat de l’or employé à profusion, la variété des couleurs allant de rose au rouge vif,
du bleu au violet, du gris au vert, avec des dégradés, la diversité des vêtements et des accessoires
confèrent un charme particulier à ces deux magnifiques vases “lettrés”, qui témoignent de la
profondeur de la pénétration en Nubie des influences hellénistiques.
Ils confirment la richesse d’Adeye qu’indiquait déjà entre autres la découverte de beaux bijoux ;
c’était la métropole d’une province déjà proche de la frontière. Bien caractéristique du syncrétisme
de la civilisation composite du royaume méroïtique y apparaît l’alliance de thèmes égyptisahts,
de détails proprement kouchites, d’une inscription en grec et de techniques évidemment
hellénistiques13.
7 Cette inscription est une acclamation convivale d’un type bien connu : “bois et puisses-tu vivre”, répandue
abondamment en milieu chrétien, sous sa forme grecque, puis latine. On notera cependant l’étrangeté de la forme
£HCEN au lieu de l’habituel ^IICEC ; pour un N final, cf. également le vasé de Cologne de l’ancienne collection von
Rath, autrefois au Musée de Berlin, détruit pendant la guerre (A. Kisa, Das Glas im Altertum, 1908, p. 137, n° 186,
p. 961, n° 243 et pl. XVIII, 167 ; Fr. Fremersdorf, Die römischen Glaser mit Schliff, Bemalung und Goldauflagen aus
Köln, VIII, 1967, p. VII, 66 et pl. CCCX.
8 Sur la persistance de la foi osirienne dans la religion méroïtique, cf. Leclant, La religion méroïtique, dans :
Encyclopédie de la Pléiade, Histoire des Religions, I, Paris 1970, p. 145-146, 152.
9 Le daim est figuré en Egypt, très rarement, depuis l’époque préhistorique ; G. Bénédite, Journal of Egyptian
Archaeology, V (1918), p. 11, n° 1 ; J. Vandier, Manuel, I, 1 (1952), fig. 362.
10 C. I. Woolley, et D. R. Maciver, Karanôg, The Romano-nubian Cemetery, Plates, vol, IV (1910), pl. I-X ;
W. K. Simpson, Journal of the American Research Center, III (1964), pl. X, fig. 4.
11 J. Leclant, Recherches sur les monuments thébains de la XXVéme dynastie. Le Caire 1965, p. 323-324; E. R. Russman,
The Brooklyn Museum Annual, XI, 2 (1969-1970), p. 145 et n° 3.
12 Plusieurs des flûtes à pied précédemment signalées (supra n. 2) sont aussi des “vases lettrés”, avec des formules qui
seront également reprises par les Chrétiens ; à la serie des “vases lettrés” des Basse-Nubie, on peut ajouter le bel
exemplaire recueilli par l’expédition des pays nordiques dans une tombe méroïtique de Shirfadiq (Serra, au Nord de
Wadi-Halfa), avec l’acclamation “salut et réjouis-toi” (T. Säve-Söderbergh, Kush, XI (1963) p. 66 et pl. XII, b).
13 La sépulture W T8, avec pyramide unique, en briques crues, munie de murs de refend en croix, semble appartenir
à une phase finale de la nécropole de l’Ouest de Sedeinga. Sans disposer d’élements certains de datation, on sera tenté
de l’attribuer à la seconde moitié du Illème s. de notre ère.
le dieu Osiris8 sur un trône, que suit un personnage à disque doré portant sur les épaules une
antilope et tenant devant lui trois canards, d’autre part une femme, couronnée elle aussi d’un
disque, saisissant une antilope et portant un grand plateau, où est agenouillée une statuette dorée,
ainsi qu’un homme tenant une longue aiguière et tirant derrière lui un daim9. Le disque doré qui
surmonte la tête des personnages évoque l’ornament des statuettes-âmes méroïtiques10; également
kouchite semble la coiffure de deux personnages masculins : une étroite calotte que borde un
bandeau11 12. L’éclat de l’or employé à profusion, la variété des couleurs allant de rose au rouge vif,
du bleu au violet, du gris au vert, avec des dégradés, la diversité des vêtements et des accessoires
confèrent un charme particulier à ces deux magnifiques vases “lettrés”, qui témoignent de la
profondeur de la pénétration en Nubie des influences hellénistiques.
Ils confirment la richesse d’Adeye qu’indiquait déjà entre autres la découverte de beaux bijoux ;
c’était la métropole d’une province déjà proche de la frontière. Bien caractéristique du syncrétisme
de la civilisation composite du royaume méroïtique y apparaît l’alliance de thèmes égyptisahts,
de détails proprement kouchites, d’une inscription en grec et de techniques évidemment
hellénistiques13.
7 Cette inscription est une acclamation convivale d’un type bien connu : “bois et puisses-tu vivre”, répandue
abondamment en milieu chrétien, sous sa forme grecque, puis latine. On notera cependant l’étrangeté de la forme
£HCEN au lieu de l’habituel ^IICEC ; pour un N final, cf. également le vasé de Cologne de l’ancienne collection von
Rath, autrefois au Musée de Berlin, détruit pendant la guerre (A. Kisa, Das Glas im Altertum, 1908, p. 137, n° 186,
p. 961, n° 243 et pl. XVIII, 167 ; Fr. Fremersdorf, Die römischen Glaser mit Schliff, Bemalung und Goldauflagen aus
Köln, VIII, 1967, p. VII, 66 et pl. CCCX.
8 Sur la persistance de la foi osirienne dans la religion méroïtique, cf. Leclant, La religion méroïtique, dans :
Encyclopédie de la Pléiade, Histoire des Religions, I, Paris 1970, p. 145-146, 152.
9 Le daim est figuré en Egypt, très rarement, depuis l’époque préhistorique ; G. Bénédite, Journal of Egyptian
Archaeology, V (1918), p. 11, n° 1 ; J. Vandier, Manuel, I, 1 (1952), fig. 362.
10 C. I. Woolley, et D. R. Maciver, Karanôg, The Romano-nubian Cemetery, Plates, vol, IV (1910), pl. I-X ;
W. K. Simpson, Journal of the American Research Center, III (1964), pl. X, fig. 4.
11 J. Leclant, Recherches sur les monuments thébains de la XXVéme dynastie. Le Caire 1965, p. 323-324; E. R. Russman,
The Brooklyn Museum Annual, XI, 2 (1969-1970), p. 145 et n° 3.
12 Plusieurs des flûtes à pied précédemment signalées (supra n. 2) sont aussi des “vases lettrés”, avec des formules qui
seront également reprises par les Chrétiens ; à la serie des “vases lettrés” des Basse-Nubie, on peut ajouter le bel
exemplaire recueilli par l’expédition des pays nordiques dans une tombe méroïtique de Shirfadiq (Serra, au Nord de
Wadi-Halfa), avec l’acclamation “salut et réjouis-toi” (T. Säve-Söderbergh, Kush, XI (1963) p. 66 et pl. XII, b).
13 La sépulture W T8, avec pyramide unique, en briques crues, munie de murs de refend en croix, semble appartenir
à une phase finale de la nécropole de l’Ouest de Sedeinga. Sans disposer d’élements certains de datation, on sera tenté
de l’attribuer à la seconde moitié du Illème s. de notre ère.