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NOTES SUR LA GÉOGRAPHIE ÉGYPTIENNE
La première fois, c'est dans un passage mutilé duquel il résulte que Tiouwatti de Lapana
et Arzaouîa de Roukhizi se sont unis à Aîtougama pour piller les pays soumis à
l'Egypte, mais que les rois de Noukhashshi, de Nî, cle Zinzar et cle Kinnanat sont
demeurés fidèles. Le deuxième passage nous apprend d'autres méfaits des mêmes per-
sonnages : « Maître, lorsqu'Arzaouîa de Roukhizi et Tiouwatti de Lapana eurent
» occupé le pays d'Oubi et que Dasha eut occupé le pays d'Amma, sache qu'eux, mon
» maître, quand Oubi ne fut plus à mon maître, chaque jour ils envoyèrent des messages
» à Aîtougama, et ils lui dirent : Viens et t'empare d'Oubi en son entier! »
Ces données diverses nous permettent de déterminer l'aire dans laquelle il faut
chercher Lapana et Roukhizi. La mention de Nî et de Zinzar nous indique l'extrême
limite nord, le voisinage cle Hamath, tandis que celle d'Oubi nous fournit la limite sud.
Oubi est le pays de Damas, ainsi qu'il résulte des dernières lignes de cette même lettre
que j'ai déjà citées1. Pour que Tiouwatti et Arzaouîa aient pu s'emparer d'un territoire
relevant de Damas, il faut que leurs états aient confiné à ce territoire. Il convient donc
de chercher Lapana et Roukhizi clans la vallée du Haut-Oronte, et je trouve aussitôt
pour Lapana un site qui répond assez exactement aux conditions voulues, celui de l'an-
tique Lybon, Lybo, aujourd'hui Lébouèh, El-Lébouèh. Le vieux nom ne nous estguère
connu que par les itinéraires romains, mais le site conserve quelques, ruines : Lébouèh
est au sud de Qodshou, et au pied des montagnes qui couvrent Damas. Roukhizi devait
s'élever dans une position analogue le long cle l'Oronte, au voisinage de Lapana, mais
je ne vois rien dans la nomenclature actuelle qu'on puisse lui comparer.
III. — On rencontre, au début du Voyage d'un Égyptien, un paragraphe assez
obscur, où le paysage et les localités, pour être dépeints complaisamment, n'en demeu-
rent pas moins difficiles à placer sur le terrain. Le point de départ s'y trouve à Qodshou
sur l'Oronte, le point d'arrivée à Byblos et à Bérytc, et le héros traverse le Liban : je
veux essayer de déterminer son itinéraire avec plus de précision qu'on ne me paraît
avoir fait jusqu'à présent, et cle porter sur la carte les villes ou les pays qu'il était censé
toucher au passage.
La première section du récit nous mène de Qodshou au mont Shaoua par la contrée
de Magara, et la description du trajet est ainsi conçue : « Tu ne fais pas expédition vers
» Qodshou ni vers Toubakhi? tu ne vas pas vers les Shaousou2, avec les archers et les
» piétons? tu ne chemines pas vers le Magara, où le ciel s'enténèbre de jour3, car le pays
1. Cf. p. 66. Le rapprochement entre Oubi et l'égyptien ( ^>^J f^^O Aoubou, que Max Mùller
indique (Asi.cn und Europa, p. 170, note 1, p. 396), ne peut servir ici que comme indication phonétique,
l'Aoubou de la liste de Séti Ier (Lepsius, Denkm., III. 129, complété d'après Ciiampollion, Monuments de
l'Égypte et de la Nubie, t. II, p. 110. n» 57 et pl. CCLXXXrX) n'étant que l'Aoubou des listes de Thout-
mosis III, qui est rangée parmi le" villes du pays de Pouanît (n° 67).
\
: le graveur moderne n'a pas vu, ou bien il a oublié, le
I I I
2. Lisez probablement
petit hiératique inséré entre les deux
3. Le texte porte ici les débris de deux v_^t, puis une lacune, les traces d'un O et le trait I, ce
que ÉJrugsch avait restitué en S ^° q ^ "| ^j' ainsi qu il résulte ^e sa traduction [Voyage d'un Égyptien,
p. 12), adoptée par Erman, Mgypten und âgyptisohes Lebcn, p. 510; Max Mùller a vérifié sur l'original
l'exactitude de la conjecture de Brugsch (Asien und Europa, p. 394).
NOTES SUR LA GÉOGRAPHIE ÉGYPTIENNE
La première fois, c'est dans un passage mutilé duquel il résulte que Tiouwatti de Lapana
et Arzaouîa de Roukhizi se sont unis à Aîtougama pour piller les pays soumis à
l'Egypte, mais que les rois de Noukhashshi, de Nî, cle Zinzar et cle Kinnanat sont
demeurés fidèles. Le deuxième passage nous apprend d'autres méfaits des mêmes per-
sonnages : « Maître, lorsqu'Arzaouîa de Roukhizi et Tiouwatti de Lapana eurent
» occupé le pays d'Oubi et que Dasha eut occupé le pays d'Amma, sache qu'eux, mon
» maître, quand Oubi ne fut plus à mon maître, chaque jour ils envoyèrent des messages
» à Aîtougama, et ils lui dirent : Viens et t'empare d'Oubi en son entier! »
Ces données diverses nous permettent de déterminer l'aire dans laquelle il faut
chercher Lapana et Roukhizi. La mention de Nî et de Zinzar nous indique l'extrême
limite nord, le voisinage cle Hamath, tandis que celle d'Oubi nous fournit la limite sud.
Oubi est le pays de Damas, ainsi qu'il résulte des dernières lignes de cette même lettre
que j'ai déjà citées1. Pour que Tiouwatti et Arzaouîa aient pu s'emparer d'un territoire
relevant de Damas, il faut que leurs états aient confiné à ce territoire. Il convient donc
de chercher Lapana et Roukhizi clans la vallée du Haut-Oronte, et je trouve aussitôt
pour Lapana un site qui répond assez exactement aux conditions voulues, celui de l'an-
tique Lybon, Lybo, aujourd'hui Lébouèh, El-Lébouèh. Le vieux nom ne nous estguère
connu que par les itinéraires romains, mais le site conserve quelques, ruines : Lébouèh
est au sud de Qodshou, et au pied des montagnes qui couvrent Damas. Roukhizi devait
s'élever dans une position analogue le long cle l'Oronte, au voisinage de Lapana, mais
je ne vois rien dans la nomenclature actuelle qu'on puisse lui comparer.
III. — On rencontre, au début du Voyage d'un Égyptien, un paragraphe assez
obscur, où le paysage et les localités, pour être dépeints complaisamment, n'en demeu-
rent pas moins difficiles à placer sur le terrain. Le point de départ s'y trouve à Qodshou
sur l'Oronte, le point d'arrivée à Byblos et à Bérytc, et le héros traverse le Liban : je
veux essayer de déterminer son itinéraire avec plus de précision qu'on ne me paraît
avoir fait jusqu'à présent, et cle porter sur la carte les villes ou les pays qu'il était censé
toucher au passage.
La première section du récit nous mène de Qodshou au mont Shaoua par la contrée
de Magara, et la description du trajet est ainsi conçue : « Tu ne fais pas expédition vers
» Qodshou ni vers Toubakhi? tu ne vas pas vers les Shaousou2, avec les archers et les
» piétons? tu ne chemines pas vers le Magara, où le ciel s'enténèbre de jour3, car le pays
1. Cf. p. 66. Le rapprochement entre Oubi et l'égyptien ( ^>^J f^^O Aoubou, que Max Mùller
indique (Asi.cn und Europa, p. 170, note 1, p. 396), ne peut servir ici que comme indication phonétique,
l'Aoubou de la liste de Séti Ier (Lepsius, Denkm., III. 129, complété d'après Ciiampollion, Monuments de
l'Égypte et de la Nubie, t. II, p. 110. n» 57 et pl. CCLXXXrX) n'étant que l'Aoubou des listes de Thout-
mosis III, qui est rangée parmi le" villes du pays de Pouanît (n° 67).
\
: le graveur moderne n'a pas vu, ou bien il a oublié, le
I I I
2. Lisez probablement
petit hiératique inséré entre les deux
3. Le texte porte ici les débris de deux v_^t, puis une lacune, les traces d'un O et le trait I, ce
que ÉJrugsch avait restitué en S ^° q ^ "| ^j' ainsi qu il résulte ^e sa traduction [Voyage d'un Égyptien,
p. 12), adoptée par Erman, Mgypten und âgyptisohes Lebcn, p. 510; Max Mùller a vérifié sur l'original
l'exactitude de la conjecture de Brugsch (Asien und Europa, p. 394).