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En 1704, Mme de Ventadour avait été adjointe à sa mère,
la maréchale de La Motte, comme gouvernante des
enfants de France, avec survivance assurée : elle succéda
donc à la maréchale après la mort de celle-ci, survenue le
6 janvier 170g. A cette époque, Louis XIV avait soixante
et onze ans; le Grand Dauphin, quarante-huit ans ; le duc
de Bourgogne, vingt-sept ans; le duc de Bretagne (le
petit Dauphin), deux ans, et la duchesse de Ventadour,
soixante ans. Le duc d’Anjou, — plus tard Louis XV,
— n’étant né que le i5 février 1710, et le Grand Dauphin,
le duc de Bourgogne et le duc de Bretagne étant morts,
le premier en 1711, les deux autres en 1712, il s’ensuit que
la seule date acceptable est l’année 1709, si, — encore
une fois, — on admet que cette peinture a été exécutée
du vivant de tous les personnages représentés. Dans le
cas contraire, il va de soi que toutes les hypothèses
seraient permises, et on pourrait très bien supposer que
la duchesse de Ventadour s’est fait peindre, tenant en
lisière le futur roi de France, en présence de son bisaïeul,
de son grand-père et de son père, quoique ces deux der-
niers fussent certainement morts à l’âge où est représenté
le jeune prince.
Un autre détail frappe encore dans ce tableau, — et qui
paraît à première vue être un argument en faveur de cette
dernière version, — c’est que les personnages représentés
ne le sont pas tous suivant l’âge qu’ils avaient en 1709 :
pour Mme de Ventadour et le Grand Dauphin, passe
encore; pour l’enfant, il paraît un peu grandet pour deux
ans; mais surtout Louis XIV est considérablement rajeuni
pour un roi de soixante et onze ans, et le duc de Bour-
gogne, pour un prince de vingt-sept ans, a les allures d’un
jeune homme de dix-sept.
L’explication de cette étrangeté, c’est que la peinture
commandée par la duchesse de Ventadour ne fut point,
comme bien on pense, exécutée d’après nature pour ce
qui est de la famille royale ; l’artiste s’aida soit de souve-
nirs personnels, s’il était de ceux qui travaillèrent pour le
roi, soit d’estampes contemporaines dans le cas contraire.
Qu’il ait négligé d’accorder entre eux les âges de ses per-
sonnages, ce n’est pas discutable; mais en quoi cette
En 1704, Mme de Ventadour avait été adjointe à sa mère,
la maréchale de La Motte, comme gouvernante des
enfants de France, avec survivance assurée : elle succéda
donc à la maréchale après la mort de celle-ci, survenue le
6 janvier 170g. A cette époque, Louis XIV avait soixante
et onze ans; le Grand Dauphin, quarante-huit ans ; le duc
de Bourgogne, vingt-sept ans; le duc de Bretagne (le
petit Dauphin), deux ans, et la duchesse de Ventadour,
soixante ans. Le duc d’Anjou, — plus tard Louis XV,
— n’étant né que le i5 février 1710, et le Grand Dauphin,
le duc de Bourgogne et le duc de Bretagne étant morts,
le premier en 1711, les deux autres en 1712, il s’ensuit que
la seule date acceptable est l’année 1709, si, — encore
une fois, — on admet que cette peinture a été exécutée
du vivant de tous les personnages représentés. Dans le
cas contraire, il va de soi que toutes les hypothèses
seraient permises, et on pourrait très bien supposer que
la duchesse de Ventadour s’est fait peindre, tenant en
lisière le futur roi de France, en présence de son bisaïeul,
de son grand-père et de son père, quoique ces deux der-
niers fussent certainement morts à l’âge où est représenté
le jeune prince.
Un autre détail frappe encore dans ce tableau, — et qui
paraît à première vue être un argument en faveur de cette
dernière version, — c’est que les personnages représentés
ne le sont pas tous suivant l’âge qu’ils avaient en 1709 :
pour Mme de Ventadour et le Grand Dauphin, passe
encore; pour l’enfant, il paraît un peu grandet pour deux
ans; mais surtout Louis XIV est considérablement rajeuni
pour un roi de soixante et onze ans, et le duc de Bour-
gogne, pour un prince de vingt-sept ans, a les allures d’un
jeune homme de dix-sept.
L’explication de cette étrangeté, c’est que la peinture
commandée par la duchesse de Ventadour ne fut point,
comme bien on pense, exécutée d’après nature pour ce
qui est de la famille royale ; l’artiste s’aida soit de souve-
nirs personnels, s’il était de ceux qui travaillèrent pour le
roi, soit d’estampes contemporaines dans le cas contraire.
Qu’il ait négligé d’accorder entre eux les âges de ses per-
sonnages, ce n’est pas discutable; mais en quoi cette