BUREAUX, 55, RUE VIVIENNE.
20 Juillet.
1872. — N° 50.
LA
CHRONIQUE DES ARTS
ET DE LA CURIOSITÉ
SUPPLÉMENT A LA GAZETTE DES BEAUX-ARTS
\
PARAISSANT LE IO ET LE 20 DE CHAQUE MOIS
Les abonnés à une année entière de la Gazette des Beaux-Arts reçoivent gratuitement
la Chronique des Arts et de la Curiosité.
PARIS ET DÉPARTEMENTS :
Un an.12 fr. | Six mois.8 fr.
INAUGURATION
DE
L’EXPOSITION LYONNAISE.
Après toutes sortes de vicissitudes plus faciles
à comprendre, hélas! qu’agréables a raconter,
l’Exposition lyonnaise a solennellement ouvert
ses portes le dimanche 7 juillet, vers midi.
Hàtons-nous de dire avant tout que la chose a
fort réussi, que la beauté du temps, le zèle de
chacun, l’affluence de tous, ont rendu la fête très-
brillante, et qu’il en resie la meilleure impres-
sion dans tous les souvenirs.
Le palais de l’Exposition s’élève, comme on
sait, au bord d’un lac, dans ce jardin de la Tête-
d’Or revêtu par la saison de sa parure la plus
triomphante. C’est un long bâtiment dans le goût
moresque. El félicitons en passant l’architecte
qui l’a construit, M. Jules Chalron, élève de La-
brouste, dont le talent a su concilier à mer-
veille les exigences si différentes de l’aménage-
ment et du bon goût. Il y a même une hardiesse
rare dans l’espèce de dôme qui se. dresse au
centre de cette longue nef. D’en bas, inachevé
comme il est, avec ses arêtes qui se croisent et
que la distance amincit, avec son peuple de
constructeurs fourmillant à perte de vue, il
donne l’idée d’une cathédrale en charpente, ou
plutôt de quelque navire géant.
La salle dite des Concerts, où s’est faite la céré-
monie officielle, est assez vaste. Au fond, sous
un dais de velours, l’estrade pour les autorités
et les orateurs; en face, à l’autre bout, une cor-
beille de planches supportant un orchestre, car la
rhétorique et l’harmonie doivent faire tous les
frais âe la solennité.
M. Victor Lefranc, ministre de l’intérieur,
remplaçant son collègue de l’agriculture, ouvre
la séance par un discours plein d’honnêteté, de
bienveillance universelle, et d’efforts pour enno-
blir ses paroles bien plus que pour préciser sa
pensée. 11 satisfait tout le monde. Le maire de
Lyon qui parle ensuite n’est pas plus simple
dans son langage, — 0I1! non; mais ses idées sont
très-nettes, à lui, ses visées très-franches. On
ne peut se méprendre sur son opinion politique,
pas plus que sur celle de l’orateur qui lui suc-^
cède,M. delà Loyère, vice-président de la Société
des Agriculteurs français. Si l’un invoque « les
droits respectifs du capital et du travail », l’autre
exalte « la piété sincère, le respect des lois, le
bon sens des populations agricoles », et l'on est
parfaitement édifié. Après vient l’historique de
l’entreprise par deux des administrateurs; enfin
une réplique inattendue du ministre, qui croit
nécessaire de noyer dans un dernier morceau
d’éloquence les effets discordants de la politique.
A sa phrase finale, les bravos et la musique
retentissent do plus belle. Le ministre et son cor-
tège descendent alors les gradins pour parcou-
rir les galeries; ils s’arrêtent devant tel objet,
ils félicitent tel exposant, et de station en sta-
tion ils gagnent la porte de sortie.
L’Exposition lyonnaise était inaugurée.
Le soir, une fête de nuit rassemblait dans le
parc une foule innombrable. Les massifs illumi-
nés, les flammes de Bengale éclairant la verdure,
les embarcations pavoisées de lanternes entraî-
nant sur les eaux du lac des chœurs et des fan-
fares, tout cela formait un ensemble magnifique.
D’autant mieux qu’on n’apercevait plus à cette
30
20 Juillet.
1872. — N° 50.
LA
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INAUGURATION
DE
L’EXPOSITION LYONNAISE.
Après toutes sortes de vicissitudes plus faciles
à comprendre, hélas! qu’agréables a raconter,
l’Exposition lyonnaise a solennellement ouvert
ses portes le dimanche 7 juillet, vers midi.
Hàtons-nous de dire avant tout que la chose a
fort réussi, que la beauté du temps, le zèle de
chacun, l’affluence de tous, ont rendu la fête très-
brillante, et qu’il en resie la meilleure impres-
sion dans tous les souvenirs.
Le palais de l’Exposition s’élève, comme on
sait, au bord d’un lac, dans ce jardin de la Tête-
d’Or revêtu par la saison de sa parure la plus
triomphante. C’est un long bâtiment dans le goût
moresque. El félicitons en passant l’architecte
qui l’a construit, M. Jules Chalron, élève de La-
brouste, dont le talent a su concilier à mer-
veille les exigences si différentes de l’aménage-
ment et du bon goût. Il y a même une hardiesse
rare dans l’espèce de dôme qui se. dresse au
centre de cette longue nef. D’en bas, inachevé
comme il est, avec ses arêtes qui se croisent et
que la distance amincit, avec son peuple de
constructeurs fourmillant à perte de vue, il
donne l’idée d’une cathédrale en charpente, ou
plutôt de quelque navire géant.
La salle dite des Concerts, où s’est faite la céré-
monie officielle, est assez vaste. Au fond, sous
un dais de velours, l’estrade pour les autorités
et les orateurs; en face, à l’autre bout, une cor-
beille de planches supportant un orchestre, car la
rhétorique et l’harmonie doivent faire tous les
frais âe la solennité.
M. Victor Lefranc, ministre de l’intérieur,
remplaçant son collègue de l’agriculture, ouvre
la séance par un discours plein d’honnêteté, de
bienveillance universelle, et d’efforts pour enno-
blir ses paroles bien plus que pour préciser sa
pensée. 11 satisfait tout le monde. Le maire de
Lyon qui parle ensuite n’est pas plus simple
dans son langage, — 0I1! non; mais ses idées sont
très-nettes, à lui, ses visées très-franches. On
ne peut se méprendre sur son opinion politique,
pas plus que sur celle de l’orateur qui lui suc-^
cède,M. delà Loyère, vice-président de la Société
des Agriculteurs français. Si l’un invoque « les
droits respectifs du capital et du travail », l’autre
exalte « la piété sincère, le respect des lois, le
bon sens des populations agricoles », et l'on est
parfaitement édifié. Après vient l’historique de
l’entreprise par deux des administrateurs; enfin
une réplique inattendue du ministre, qui croit
nécessaire de noyer dans un dernier morceau
d’éloquence les effets discordants de la politique.
A sa phrase finale, les bravos et la musique
retentissent do plus belle. Le ministre et son cor-
tège descendent alors les gradins pour parcou-
rir les galeries; ils s’arrêtent devant tel objet,
ils félicitent tel exposant, et de station en sta-
tion ils gagnent la porte de sortie.
L’Exposition lyonnaise était inaugurée.
Le soir, une fête de nuit rassemblait dans le
parc une foule innombrable. Les massifs illumi-
nés, les flammes de Bengale éclairant la verdure,
les embarcations pavoisées de lanternes entraî-
nant sur les eaux du lac des chœurs et des fan-
fares, tout cela formait un ensemble magnifique.
D’autant mieux qu’on n’apercevait plus à cette
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