N» 7. — 1921.
BUREAUX! I06, BOULEVARD SAINT-GERMAIN (6e)
15 avril.
CHRONIQUE DES ARTS
ET DE LA CURIOSITÉ
SUPPLÉMENT A LA GAZETTE DES BEAUX-ARTS
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Prix de l’abonnement pour un an :
Paris et Départements : 30 fr. — Étranger : 35 fr.
Le Numéro : i franc
PROPOS DU JOUR
L’Exposition coloniale, qui doit avoir lieu
en 1925, est pourvue d’un emplacement
et de tout l’état-major nécessaire à son
organisation et à son fonctionnement.
Mais l’Exposition internationale des arts appli-
qués modernes, décidée pour 1925, fixée désor-
mais à 1924, est bien moins avancée. Elle eut,
il est vrai, le malheur de perdre son commissaire
général, le regretté Marc Réville., événement
soudain qui influa naturellement sur la marche
des choses. Toutefois, M. Réville est mort en
octobre 1920 et l’Exposition, dont tous ceux qui
comprennent la situation actuelle de nos indus-
tries d’art souhaitent ardemment la réalisation,
l’Exposition est toujours privée de son chef, et
d’un budget, et des divers organismes nécessaires,
et rien n’a été décidé quant à son emplacement.
D'où vient cette négligence ? Le ministère du
commerce, dont l’Exposition dépend, n’y
accorde-t-il point l'attention voulue ? L’adminis-
tration des beaux-arts, qui ne saurait se désinté-
resser de pareille manifestation (en fait, M. Paul
Léon avait été nommé commissaire général
adjoint), ne veut-elle pas insister comme il le
faudrait ? On ne sait, et il est vain, au surplus,
de rechercher la cause des délais et des silences
administratifs. Ce qui importe c’est de sortir de
cet état de torpeur préjudiciable à notre prestige
tout comme aux intérêts du pays.
Depuis un certain temps, la Fédération des
sociétés d’art appliqué, qui comprend les trois
Salons et la plupart des grands groupements artis-
tiques, multiplie les démarches auprès des minis-
tères intéressés pour obtenir la nomination d’un
commissaire général ; on lui a donné beaucoup de
bonnes paroles, mais le bruit court d’une nomi-
nation récente et que l’on ne fait pas connaître,
le gouvernement préférant un homme politique
aux personnalités qui lui furent indiquées.
Les questions de personnes n’importent ici
que dans la mesure où l’impulsion nécessaire et
les principes directeurs de l’Exposition pourraient
s’en trouver influencés. Aussi, répétons-le, que
l’on prenne enfin toutes les décisions indispen-
sables, y compris celles relatives à l’emplacement,
et que l’on aille de l’avant.
Le temps presse. Il faut que nos décorateurs
puissent se préparer ; avec les difficultés actuelles
de matière première et de main-d’œuvre, ils ne
disposeront que d’un court délai. Il faut aussi
qu’on songe à leur accorder les encouragements
matériels, libéralement distribués chez tels ou tels
de leurs concurrents étrangers. Ne comprendra-
t-on pas qu’il n’y a plus un jour à perdre ?
Nous ne pensons pas que le principe même
de l’Exposition rencontre encore de l’opposition.
Chacun sait que notre art décoratif, « capitale
valeur économique » de la France comme on l’a
si justement dit dès 1915, instrument essentiel
de notre propagande et de notre prestige, demande
à être encouragé plus et mieux qu’on ne l’a fait
jusqu’ici. Rien ne répond davantage à cet objet
qu’une exposition très importante, grâce'à laquelle
nous saurons exactement où en sont nos rivaux,
et qui sera pour nous un coup de fouet salutaire.
Par exemple, il conviendrait de s’abstenir com-
plètement de ce « rétrospectif » dont il semble
qu’on ne puisse se passer; qu’a-t-il à faire dans
urne manifestation toute actuelle ? Cependant nous
voyons dans un récent rapport au Conseil muni-
cipal qu’une section rétrospective est considérée
comme indispensable, sorte de concession aux
adversaires de la notion moderniste pour qui
le pastiche et le plagiat sont le fin mot de l’art.
Eh bien ! non, cette concession ne saurait être
admise. Pour ceux qui désireront interroger
le trésor de notre art ancien, les musées seront là.
L’Exposition, elle, doit apporter la preuve de la
vitalité de notre art d’aujourd’hui, elle ne peut
être l’occasion de ces manifestations trop favo-
rables aux redites et dont on a tant abusé.
BUREAUX! I06, BOULEVARD SAINT-GERMAIN (6e)
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en 1925, est pourvue d’un emplacement
et de tout l’état-major nécessaire à son
organisation et à son fonctionnement.
Mais l’Exposition internationale des arts appli-
qués modernes, décidée pour 1925, fixée désor-
mais à 1924, est bien moins avancée. Elle eut,
il est vrai, le malheur de perdre son commissaire
général, le regretté Marc Réville., événement
soudain qui influa naturellement sur la marche
des choses. Toutefois, M. Réville est mort en
octobre 1920 et l’Exposition, dont tous ceux qui
comprennent la situation actuelle de nos indus-
tries d’art souhaitent ardemment la réalisation,
l’Exposition est toujours privée de son chef, et
d’un budget, et des divers organismes nécessaires,
et rien n’a été décidé quant à son emplacement.
D'où vient cette négligence ? Le ministère du
commerce, dont l’Exposition dépend, n’y
accorde-t-il point l'attention voulue ? L’adminis-
tration des beaux-arts, qui ne saurait se désinté-
resser de pareille manifestation (en fait, M. Paul
Léon avait été nommé commissaire général
adjoint), ne veut-elle pas insister comme il le
faudrait ? On ne sait, et il est vain, au surplus,
de rechercher la cause des délais et des silences
administratifs. Ce qui importe c’est de sortir de
cet état de torpeur préjudiciable à notre prestige
tout comme aux intérêts du pays.
Depuis un certain temps, la Fédération des
sociétés d’art appliqué, qui comprend les trois
Salons et la plupart des grands groupements artis-
tiques, multiplie les démarches auprès des minis-
tères intéressés pour obtenir la nomination d’un
commissaire général ; on lui a donné beaucoup de
bonnes paroles, mais le bruit court d’une nomi-
nation récente et que l’on ne fait pas connaître,
le gouvernement préférant un homme politique
aux personnalités qui lui furent indiquées.
Les questions de personnes n’importent ici
que dans la mesure où l’impulsion nécessaire et
les principes directeurs de l’Exposition pourraient
s’en trouver influencés. Aussi, répétons-le, que
l’on prenne enfin toutes les décisions indispen-
sables, y compris celles relatives à l’emplacement,
et que l’on aille de l’avant.
Le temps presse. Il faut que nos décorateurs
puissent se préparer ; avec les difficultés actuelles
de matière première et de main-d’œuvre, ils ne
disposeront que d’un court délai. Il faut aussi
qu’on songe à leur accorder les encouragements
matériels, libéralement distribués chez tels ou tels
de leurs concurrents étrangers. Ne comprendra-
t-on pas qu’il n’y a plus un jour à perdre ?
Nous ne pensons pas que le principe même
de l’Exposition rencontre encore de l’opposition.
Chacun sait que notre art décoratif, « capitale
valeur économique » de la France comme on l’a
si justement dit dès 1915, instrument essentiel
de notre propagande et de notre prestige, demande
à être encouragé plus et mieux qu’on ne l’a fait
jusqu’ici. Rien ne répond davantage à cet objet
qu’une exposition très importante, grâce'à laquelle
nous saurons exactement où en sont nos rivaux,
et qui sera pour nous un coup de fouet salutaire.
Par exemple, il conviendrait de s’abstenir com-
plètement de ce « rétrospectif » dont il semble
qu’on ne puisse se passer; qu’a-t-il à faire dans
urne manifestation toute actuelle ? Cependant nous
voyons dans un récent rapport au Conseil muni-
cipal qu’une section rétrospective est considérée
comme indispensable, sorte de concession aux
adversaires de la notion moderniste pour qui
le pastiche et le plagiat sont le fin mot de l’art.
Eh bien ! non, cette concession ne saurait être
admise. Pour ceux qui désireront interroger
le trésor de notre art ancien, les musées seront là.
L’Exposition, elle, doit apporter la preuve de la
vitalité de notre art d’aujourd’hui, elle ne peut
être l’occasion de ces manifestations trop favo-
rables aux redites et dont on a tant abusé.