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dans la Cyrénaïque comme préservant des mouches et les éloignant : Gyrenaici
Achorem deum (invocant) muscarum multitudine pestilentiam afferente, quae pro-
tinas intereunt postquam litatum est illi deo. Il y a tout au moins une coïncidence
singulière entre le nom qu’il donne à ce dieu, Achores, et celui de la ville où le dieu-
mouche des Philistins avait le siège principal de son culte, Accaron (1). Aussi Selden,
il y a déjà deux siècles, arrivait-il à conclure que Baal-Zeboub, en même temps
qu’un dieu-mouche, était le dieu qui défendait contre le fléau des mouches.
Il en est de même du Serpent d'airain (2). A Jérusalem, sous les rois, il était
l’objet d’un culte idolâtrique et presque divin, de telle façon qu’Ézéchias le fit
détruire avec les simulacres et les sanctuaires du paganisme (3). C’est qu’en effet,
si son premier auteur, apôtre du monothéisme, n’avait pu le faire élever dans le
désert que comme un simple talisman préservateur de la morsure des serpents, et
non comme une image idolâtrique (4), il l’avait pourtant fait faire à l’imitation de
ceux qui, chez les peuples voisins, étaient des figures de dieux-serpents en même
temps que des phylactères contre les serpents. En effet, porté sur la traverse supé-
rieure de son mât d’enseigne (dî)> il était exactement pareil, d’après les descrip-
tions de la Bible, aux deux serpents cornus devant lesquels un bas-relief assyrien
de Koyoundjik (b) montre un sacrifice offert dans le camp de Sènnachérib, pendant
une de ses expéditions. Nous reproduisons ici cette scène si précieuse pour l’exé-
gèse biblique.
Les deux exemples sont d’un caractère bien positif et nous mettent en présence
(t) La forme Amgarruna, employée dans les
textes cunéiformes assyriens, entre autres dans le
Prisme de Sènnachérib, me paraît prouver que
l’Axxapwv des Septante rend mieux que la vocali-
sation massorétique Ekrôn, la vraie prononciation
ancienne du nom de la ville philistine de jVlpy-
(2) Sur le serpent d’airain, voy. von Baudissin,
Studien zur semitischen Religionsgeschichte, I,
p. 288 et s.; tous les travaux relatifs à ce sujet y
sont indiqués de la façon la plus complète.
(3) II Reg., xviii, 4.
(4) Je raisonne ici en prenant pour strictement I
historique le récit du chapitre XXI des Nombres.
Mais il y a de sérieuses chances pour que, comme
l’admettent beaucoup de critiques, même parmi les
plus modérés, ce récit soit né postérieurement, du
désir d’expliquer l’origine d’un très-ancien ser-
pent d’airain conservé à Jérusalem, mais ne re-
montant peut-être pas réellement à Moïse et ayant
peut-être eu dès le début un caractère idolâtrique
plus prononcé que ne le lui suppose la narration
des Nombres.
(5) Layard, Nineveh and its remains, t. II,
p. 469.
dans la Cyrénaïque comme préservant des mouches et les éloignant : Gyrenaici
Achorem deum (invocant) muscarum multitudine pestilentiam afferente, quae pro-
tinas intereunt postquam litatum est illi deo. Il y a tout au moins une coïncidence
singulière entre le nom qu’il donne à ce dieu, Achores, et celui de la ville où le dieu-
mouche des Philistins avait le siège principal de son culte, Accaron (1). Aussi Selden,
il y a déjà deux siècles, arrivait-il à conclure que Baal-Zeboub, en même temps
qu’un dieu-mouche, était le dieu qui défendait contre le fléau des mouches.
Il en est de même du Serpent d'airain (2). A Jérusalem, sous les rois, il était
l’objet d’un culte idolâtrique et presque divin, de telle façon qu’Ézéchias le fit
détruire avec les simulacres et les sanctuaires du paganisme (3). C’est qu’en effet,
si son premier auteur, apôtre du monothéisme, n’avait pu le faire élever dans le
désert que comme un simple talisman préservateur de la morsure des serpents, et
non comme une image idolâtrique (4), il l’avait pourtant fait faire à l’imitation de
ceux qui, chez les peuples voisins, étaient des figures de dieux-serpents en même
temps que des phylactères contre les serpents. En effet, porté sur la traverse supé-
rieure de son mât d’enseigne (dî)> il était exactement pareil, d’après les descrip-
tions de la Bible, aux deux serpents cornus devant lesquels un bas-relief assyrien
de Koyoundjik (b) montre un sacrifice offert dans le camp de Sènnachérib, pendant
une de ses expéditions. Nous reproduisons ici cette scène si précieuse pour l’exé-
gèse biblique.
Les deux exemples sont d’un caractère bien positif et nous mettent en présence
(t) La forme Amgarruna, employée dans les
textes cunéiformes assyriens, entre autres dans le
Prisme de Sènnachérib, me paraît prouver que
l’Axxapwv des Septante rend mieux que la vocali-
sation massorétique Ekrôn, la vraie prononciation
ancienne du nom de la ville philistine de jVlpy-
(2) Sur le serpent d’airain, voy. von Baudissin,
Studien zur semitischen Religionsgeschichte, I,
p. 288 et s.; tous les travaux relatifs à ce sujet y
sont indiqués de la façon la plus complète.
(3) II Reg., xviii, 4.
(4) Je raisonne ici en prenant pour strictement I
historique le récit du chapitre XXI des Nombres.
Mais il y a de sérieuses chances pour que, comme
l’admettent beaucoup de critiques, même parmi les
plus modérés, ce récit soit né postérieurement, du
désir d’expliquer l’origine d’un très-ancien ser-
pent d’airain conservé à Jérusalem, mais ne re-
montant peut-être pas réellement à Moïse et ayant
peut-être eu dès le début un caractère idolâtrique
plus prononcé que ne le lui suppose la narration
des Nombres.
(5) Layard, Nineveh and its remains, t. II,
p. 469.