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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 20.1879

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Nr. 1
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Fillon, Benjamin: Le songe de Poliphile, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.22840#0068

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60 GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

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Si nous passons maintenant, mon cher ami, à l'examen de la para-
phrase française, nous nous trouvons appelés à résoudre des problèmes
non moins ardus. Jean Martin et Jacques Gohori1, cet étrange rêveur qui
fut le partisan déclaré de toutes les nouveautés, nous apprennent bien,
avec des artifices de langage et l'interposition accoutumée de person-
nages fictifs, que le second d'entre eux fut, en réalité, le traducteur de
l'œuvre de Francesco Golonna, parue, à Paris, sous les auspices du pre-
mier, en 1546; mais ils n'ont pas assez indiqué le courant d'idées qui
les a portés à publier cette traduction et à l'entourer, de concert avec le
libraire parisien Jacques Kerver et l'imprimeur Ludovicus Gyaneus, d'un
luxe exceptionnel de gravures. Ils ont dû subir en cela, tous les quatre,
une impulsion extérieure, qu'il serait bon de caractériser d'une manière
précise. Elle leur est venue, je crois, de l'architecte Sebastiano Serlio,
que François 1er avait appelé, en 1541, à sa cour, et dont l'influence ultra-
montaine provoqua une sorte d'évolution dans certaine partie du domaine
de l'art français. Un an avant de mettre au jour \ Hypnerotomachie,
Martin avait traduit et édité, à la prière de cet artiste, son Premier livre
d'Architecture et son Second livre de Perspective. Quant au luxe de
gravures, il est provenu sans cloute de ce que, s'adressant de préférence
aux artistes, Kerver n'a pas voulu que son édition restât au-dessous de
l'italienne, sortie, l'année précédente, des presses aldines, et qui avait
remis, au delà des monts, le livre à la mode. — Quoi qu'il en soit, en
définitive, la traduction de Gohori reçut, des belles planches dont elle
est ornée, une valeur toute nationale, qu'elle n'eût pas eue autrement.

Si le traducteur ne s'est fait nul scrupule de réduire « à une brièveté
françoise une prolixité plus qu'asiatique », rendue encore plus compli-
quée par l'emploi du grec, du latin, du jargon amoureux de l'époque,
amalgamés avec le vieil italien, et autres menus étalages d'une érudi-
tion mal digérée, le dessinateur auquel Kerver confia la tâche épineuse
de reproduire les illustrations de l'édition vénitienne, s'est donné les

4. Jacques Gohori, dit le Solitaire, naturaliste, historien et poète, né, sous le règne
de Louis XII, à Paris, où il mourut le 4 3 mars 4 576. Doué d'un esprit très ardent aux
recherches, mais mal réglé, il s'adonna à toutes sortes d'études et eut parfois des
éclairs de génie de nature à lui faire pressentir des vérités scientifiques, qui ne
devaient que longtemps après sa mort faire leur apparition dans le monde. Ses livres
sont curieux à étudier sous ce rapport.
 
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