LE MOUVEMENT DES ARTS EN ALLEMAGNE.
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été volées. Nous reproduisons ici une des pièces les plus importantes d’un jeu de
cartes rond du maître P. W. de Cologne, jeu de cartes aujourd'hui à peu près
complet, grâce à cette trouvaille de M. Lchrs.
C’est encore M. Lehrs qui nous fournit l'occasion de reproduire une merveil-
leuse gravure du maître anonyme L. Cz. Les érudits ont émis toutes sortes
d’hypothèses sur le nom et la patrie de ce maître, dont l’œuvre gravé réunit
l’élégante finesse d’un Lucas de Leyde à l’expression passionnée d’un Schongauer.
Une opinion assez répandue consiste à voir dans les gravures de L. Cz. des
œuvres de jeunesse de Lucas Cranach. Suivant une autre hypothèse, leur auteur
serait le père de Cranach. Mais M. Lehrs réfute péremptoirement ces versions :
il établit que les gravures du maître anonyme n’ont aucun rapport avec Cranach
ni avec son père, qui ne pouvait signer L. Cz., puisqu’il ne s’appelait ni Lucas
ni Cranach (on sait que le véritable nom de Cranach était Muller et non Sunder,
et que Kranach était son lieu d’origine). Enfin, il suffit de voir l'une de ces gra-
vures pour admettre, avec M. Lehrs, que le maître L. Cz. a dù être un Fla-
mand ou un Rhénan formé sous l’influence de Schongauer.
La restauration de la Madone de Darmstadt préoccupe toujours très vivement
la presse allemande. Dans le Zeitschrift far Bildende Kunst du 23 août, M. Ilermann-
Zeitz de Darmstadt, qui avait été chargé de diriger et de surveiller la restauration,
confiée comme l’on sait à M. Alois Hauser de Munich1, consacre à cette opération
une élude fort curieuse. Il raconte comment, contrairement à l'opinion commune,
il a soutenu dès le début que le tableau d’Holbein n’avait pas été repeint pour
cause de réparation mais pour cause « d’embellissement » et comment l’expé-
rience, en mettant à découvert les couleurs primitives sous les couches ajoutées,
lui a donné raison. Mais le document le plus important qui ait paru sur cette
question est une admirable conférence faite à Vienne par M. G. de Lutzow, et
reproduite dans un supplément de la Chronik für Vervielfaltigende Kunst (n° i).
M. de Lutzow résume d’abord l’histoire du tableau de Darmstadt et de celui de
Dresde. Le tableau de Darmstadt fut vendu en 1822 par le marchand parisien
Delahante au prince Guillaume de Prusse qui le donna à sa fille, la princesse de
Hesse. Depuis lors l’œuvre est restée à Darmstadt, dans la galerie particulière du
prince de Hesse, ce qui explique l’infériorité relative de sa renommée. On la
prenait d’ailleurs, généralement, pour une réplique ou une copie de la Madone de
Dresde. Les premiers, Alois Hirth (en 1830) et Franz Kugler (en 1845) affirmèrent
l’originalité et la priorité du tableau de Darmstadt. Woltmann, dans son livre
célèbre sur Holbein, adopta la même opinion. Enfin le critique anglais Wornum,
auteur d’une étude sur Holbein, établit en 1807 que le tableau de Dresde n’était
qu’une copie du tableau de Darmstadt, et une copie faite assez longtemps après
l’original. Cette thèse fut encore confirmée par des expositions comparatives des
deux tableaux, notamment leur confrontation à Dresde en 1871.
M. de Lutzow fait ensuite l’histoire des circonstances dans lesquelles Holbein a
peint cette Madone; elle était probablement destinée à orner la chapelle où devait
être enterrée la famille du pieux bourgmestre. Jusqu’en 1630, il n’est question que
1. Voy. ce que la Chronique des Avis a publié au sujet de cette restauration, dans le
n° 34 de l’année 1887.
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été volées. Nous reproduisons ici une des pièces les plus importantes d’un jeu de
cartes rond du maître P. W. de Cologne, jeu de cartes aujourd'hui à peu près
complet, grâce à cette trouvaille de M. Lchrs.
C’est encore M. Lehrs qui nous fournit l'occasion de reproduire une merveil-
leuse gravure du maître anonyme L. Cz. Les érudits ont émis toutes sortes
d’hypothèses sur le nom et la patrie de ce maître, dont l’œuvre gravé réunit
l’élégante finesse d’un Lucas de Leyde à l’expression passionnée d’un Schongauer.
Une opinion assez répandue consiste à voir dans les gravures de L. Cz. des
œuvres de jeunesse de Lucas Cranach. Suivant une autre hypothèse, leur auteur
serait le père de Cranach. Mais M. Lehrs réfute péremptoirement ces versions :
il établit que les gravures du maître anonyme n’ont aucun rapport avec Cranach
ni avec son père, qui ne pouvait signer L. Cz., puisqu’il ne s’appelait ni Lucas
ni Cranach (on sait que le véritable nom de Cranach était Muller et non Sunder,
et que Kranach était son lieu d’origine). Enfin, il suffit de voir l'une de ces gra-
vures pour admettre, avec M. Lehrs, que le maître L. Cz. a dù être un Fla-
mand ou un Rhénan formé sous l’influence de Schongauer.
La restauration de la Madone de Darmstadt préoccupe toujours très vivement
la presse allemande. Dans le Zeitschrift far Bildende Kunst du 23 août, M. Ilermann-
Zeitz de Darmstadt, qui avait été chargé de diriger et de surveiller la restauration,
confiée comme l’on sait à M. Alois Hauser de Munich1, consacre à cette opération
une élude fort curieuse. Il raconte comment, contrairement à l'opinion commune,
il a soutenu dès le début que le tableau d’Holbein n’avait pas été repeint pour
cause de réparation mais pour cause « d’embellissement » et comment l’expé-
rience, en mettant à découvert les couleurs primitives sous les couches ajoutées,
lui a donné raison. Mais le document le plus important qui ait paru sur cette
question est une admirable conférence faite à Vienne par M. G. de Lutzow, et
reproduite dans un supplément de la Chronik für Vervielfaltigende Kunst (n° i).
M. de Lutzow résume d’abord l’histoire du tableau de Darmstadt et de celui de
Dresde. Le tableau de Darmstadt fut vendu en 1822 par le marchand parisien
Delahante au prince Guillaume de Prusse qui le donna à sa fille, la princesse de
Hesse. Depuis lors l’œuvre est restée à Darmstadt, dans la galerie particulière du
prince de Hesse, ce qui explique l’infériorité relative de sa renommée. On la
prenait d’ailleurs, généralement, pour une réplique ou une copie de la Madone de
Dresde. Les premiers, Alois Hirth (en 1830) et Franz Kugler (en 1845) affirmèrent
l’originalité et la priorité du tableau de Darmstadt. Woltmann, dans son livre
célèbre sur Holbein, adopta la même opinion. Enfin le critique anglais Wornum,
auteur d’une étude sur Holbein, établit en 1807 que le tableau de Dresde n’était
qu’une copie du tableau de Darmstadt, et une copie faite assez longtemps après
l’original. Cette thèse fut encore confirmée par des expositions comparatives des
deux tableaux, notamment leur confrontation à Dresde en 1871.
M. de Lutzow fait ensuite l’histoire des circonstances dans lesquelles Holbein a
peint cette Madone; elle était probablement destinée à orner la chapelle où devait
être enterrée la famille du pieux bourgmestre. Jusqu’en 1630, il n’est question que
1. Voy. ce que la Chronique des Avis a publié au sujet de cette restauration, dans le
n° 34 de l’année 1887.