ALEXANDRE CABANEL.
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pourtant aucune qui, vue séparément, ne soit séduisante encore par
quelque raffinement heureux d’une virtuosité infatigable.
Durant cette dernière période de sa vie, malgré cette accumula-
tion de productions courantes, malgré ses fonctions multiples de
professeur à l’Ecole et de juré dans tous les concours et expositions,
fonctions qu’il prenait toutes au sérieux, Cabanel avait trouvé le
temps d’achever deux ouvrages considérables qui compteront parmi
les travaux décoratifs les plus importants de notre époque, le Triomphe
de Flore, en 1874, dans l’escalier du nouveau Louvre, YHistoire de saint
Louis, au Panthéon, en 1878. On trouvera, sans doute, dans ses por-
tefeuilles, toute la série des études multiples et consciencieuses par
lesquelles il s’était préparé à ces vastes entreprises. Les dessins que
nous mettons sous les yeux du lecteur lui peuvent donner une idée
de la fermeté grave avec laquelle ce dessinateur convaincu savait
analyser, traduire et fixer la nature dans un but déterminé. Si les
œuvres définitives, toujours peintes avec une tranquillité trop égale,
n’apportent pas, dans le développement de l’art français, des éléments
inattendus, elles ont, du moins, le mérite difficile et rare de ras-
sembler encore, dans leur aisance soignée et dans leur dignité
soutenue, la somme complète des qualités traditionnelles de l’école
et de prouver que si nos maîtres reconnus ne sont pas toujours en
mesure de déployer, à tout propos, l’originalité piquante ou l’étran-
geté imprévue que réclame notre lassitude, ils sont toujours en mesure
d’affirmer qu’ils n’ont rien laissé perdre du patrimoine national et
qu’ils sauront le transmettre intact, pour leur plus grand bien, aux
générations prochaines.
On peut dire que la mort a surpris ce grand travailleur en pleine
force. Le délicieux Portrait de Mme D... A..., qu’il laisse inachevé, ne
montre aucun affaiblissement dans la manière volontairement tendre
et douce dont il comprenait la beauté moderne dans son milieu
discrètement pittoresque d’élégance et de luxe. C’est à quelques-uns de
ces beaux ou charmants portraits qu'il devra, le plus sûrement, dans
l’avenir, la survivance de sa renommée. L’Exposition des Portraits
du siècle a suffisamment prouvé que leur succès n’était pas dû à un
engouement passager. Cabanel fut, en réalité, comme nous l’avons
déjà indiqué, un des précurseurs de l’évolution qui s’accomplit
aujourd’hui dans le domaine du portrait comme dans le domaine
décoratif, puisqu’il fut l'un des premiers à remettre en honneur les
colorations fraîches- et claires, l’un des premiers à replacer simple-
ment les figures contemporaines dans leur entourage habituel. Son
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pourtant aucune qui, vue séparément, ne soit séduisante encore par
quelque raffinement heureux d’une virtuosité infatigable.
Durant cette dernière période de sa vie, malgré cette accumula-
tion de productions courantes, malgré ses fonctions multiples de
professeur à l’Ecole et de juré dans tous les concours et expositions,
fonctions qu’il prenait toutes au sérieux, Cabanel avait trouvé le
temps d’achever deux ouvrages considérables qui compteront parmi
les travaux décoratifs les plus importants de notre époque, le Triomphe
de Flore, en 1874, dans l’escalier du nouveau Louvre, YHistoire de saint
Louis, au Panthéon, en 1878. On trouvera, sans doute, dans ses por-
tefeuilles, toute la série des études multiples et consciencieuses par
lesquelles il s’était préparé à ces vastes entreprises. Les dessins que
nous mettons sous les yeux du lecteur lui peuvent donner une idée
de la fermeté grave avec laquelle ce dessinateur convaincu savait
analyser, traduire et fixer la nature dans un but déterminé. Si les
œuvres définitives, toujours peintes avec une tranquillité trop égale,
n’apportent pas, dans le développement de l’art français, des éléments
inattendus, elles ont, du moins, le mérite difficile et rare de ras-
sembler encore, dans leur aisance soignée et dans leur dignité
soutenue, la somme complète des qualités traditionnelles de l’école
et de prouver que si nos maîtres reconnus ne sont pas toujours en
mesure de déployer, à tout propos, l’originalité piquante ou l’étran-
geté imprévue que réclame notre lassitude, ils sont toujours en mesure
d’affirmer qu’ils n’ont rien laissé perdre du patrimoine national et
qu’ils sauront le transmettre intact, pour leur plus grand bien, aux
générations prochaines.
On peut dire que la mort a surpris ce grand travailleur en pleine
force. Le délicieux Portrait de Mme D... A..., qu’il laisse inachevé, ne
montre aucun affaiblissement dans la manière volontairement tendre
et douce dont il comprenait la beauté moderne dans son milieu
discrètement pittoresque d’élégance et de luxe. C’est à quelques-uns de
ces beaux ou charmants portraits qu'il devra, le plus sûrement, dans
l’avenir, la survivance de sa renommée. L’Exposition des Portraits
du siècle a suffisamment prouvé que leur succès n’était pas dû à un
engouement passager. Cabanel fut, en réalité, comme nous l’avons
déjà indiqué, un des précurseurs de l’évolution qui s’accomplit
aujourd’hui dans le domaine du portrait comme dans le domaine
décoratif, puisqu’il fut l'un des premiers à remettre en honneur les
colorations fraîches- et claires, l’un des premiers à replacer simple-
ment les figures contemporaines dans leur entourage habituel. Son