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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 1.1889

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Nr. 6
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Hamel, Maurice: Salon de 1889, [1], La peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.24445#0495

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GAZE TT?] DES BEAUX-ARTS.

intelligente et affectueuse observation; dans celui de Mme V..., par
Baschet, une haute conscience d’art, mais devant la Sirène de Besnard
le doute nous envahit. Que nous veut-elle, cette fille mal enjuponnée,
plantée à contre-jour aux bords d’une mer incendiée de reflets violets
et rouges, isolée de ces feux de Bengale dans une lumière froide? Que
nous veut son équivoque sourire, qui se croit troublant? Bizarre et
point charmante, gauche et fort peu naïve, elle a l’incohérence des
chimères mal formulées qui traversent le cerveau et ne sont pas
viables. Pour imposer une idée vague, Besnard a forcé l’expression,
allumé des flamboiements inharmoniques, inventé un contraste para-
doxal. Si le peintre habile se reconnaît à des légèretés d’atmosphère,
on cherche en vain l’artiste qui exprima simplement un sentiment
simple et juste, celui qui eut un sens si personnel du féminin, de la
grâce ample et chaleureuse. La Sirène est l’erreur d’un homme qui
a cherché l’étrange pour l’étrange, c’est un malencontreux hasard
d’imagination, en même temps qu’un petit mais vraiment très petit
bonheur de palette.

On le voit, à quelques exceptions près, les modernistes, les rus-
tiques et les imaginatifs n’ont rien apporté cette année qui soit d’un
intérêt capital. Et si l’on parle du paysage proprement dit, on peut,
sans passer pour un esprit chagrin, constater le rétrécissement des
points de vue et la contingence des œuvres. Cherchez parmi les
paysages du Salon, une œuvre qui parle de loin, qui affirme par une
tonalité dominante, par une harmonie significative, l’immanente
beauté d’un aspect, d’une saison et d’une heure, qui subordonne
franchement l’intérêt local d’un site à une vérité générale de nature,
vous en trouverez bien peu. Sans doute un caractère, une interpré-
tation persistent avec Harpignies, ce rude ciseleur à froid, ce noueux
forestier qui ossifiant des terrains et silhouettant àprement le
végétal, enferme dans ses œuvres fermement construites une âme de
solitaire, triste et dédaigneuse ; avec Pointelin fidèle aux plateaux
du Jura, au silence du soir, et qui fait descendre sur les verts mou-
rants, sur les noirs branchages une calme et pensive monotonie ;
avec Lépine, délicat analyste des ciels parisiens, baignant ses vues de
cité dans une blondeur laiteuse ; avec Boudin, dont les notations
directes et les tonalités gris-bleutées ont annoncé un éclaircissement
de la vision et de la palette. On apprécie chez Billotte un éveil
d’harmonies pâles, une justesse vaporeuse, chez Damojœ des finesses
d’œil et des saveurs de tons en des compositions minces et dispersées,
chez Demont la volonté de généraliser, une recherche curieuse des
 
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