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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 1.1889

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Nr. 6
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Bode, Wilhelm von: La Renaissance au Musée de Berlin, 8, Les écoles de Venise et de Vérone
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https://doi.org/10.11588/diglit.24445#0535

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488

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

des débuts maigres et de peu de mine, a pu surgir si promptement,
chez eux, une si brillante floraison de peinture, est un des problè-
mes les plus intéressants de l’histoire de l’art. Ce n’est point ici le
lieu de traiter à fond cette question. Mais je voudrais du moins
toucher à l’un de ses côtés, parce que celui-là est, à mon sens, le plus
important et qu’il a été à peine aperçu; à savoir : l’influence de
l’Orient et de l’art oriental sur l’art et en particulier sur la peinture
de Venise.

On peut, dès l’abord, conclure à l’existence de cette influence, si
l’on considère la situation qui a fait de Venise, durant des siècles,
l’intermédiaire entre l’Orient et l'Occident. Cependant comme l’art
des mahométans n’a connu ni la plastique, ni même une manière de
peindre originale, on pourrait être amené à croire que cette influence,
si elle a existé, n’a pu être que bien insignifiante. Mais un simple
coup d’œil sur les tableaux des grands maîtres vénitiens dès la fin du
xve siècle, suffit pour établir le contraire. Dans les œuvres de Gentile
Bellini et de son frère Giovanni, de Carpaccio, de Cima, de Basaiti,
de Marziale, et d’autres, l’Orient joue un rôle tout à fait dominant.
Les scènes de la vie des saints sont, de préférence, placées en Orient;
les lieux, les costumes, et par occasion aussi les types portent, chez
ces peintres,un caractère essentiellement oriental.il faut se rappeler
que divers peintres de cette école connaissaient l’Orient pour l’avoir
vu eux-mêmes ; et qu’il y avait à Venise, domiciliés là, des milliers de
Perses, d’Arabes et d’Arméniens qui approvisionnaient la République
des produits de leurs patries, et dont une partie y avaient même établi
les ateliers de leur travail artistique. Au xive et au xve siècle, les
étoffes et les objets de luxe des espèces les plus variées, et en partie
même les objets de la vie intime vénitienne : les tapis, les décorations
murales, les costumes, les objets de métal, les poteries émaillées, les
verreries, tout cela était presque exclusivement des produits .de
l’Orient. Et encore même à la fin du Quattrocento, alors que, entre
les mains de ces maîtres, le travail artistique indigène de Venise était
parvenu à une si éclatante floraison, le rapport de dépendance qui
l’unissait à ses modèles orientaux restait si étroit, qu’il nous est
aujourd’hui difficile, souvent, de distinguer si une pièce est d’ori-
gine vénitienne ou persane. Les peintres, eux aussi, entourés des
produits de l’Orient et élevés au milieu de ces produits, devaient
nécessairement subir, au moins indirectement, l’influence de l’art
oriental sur leur art propre ; et cette influence a consisté surtout à
leur donner ce sens de la couleur qui est caractéristique dans tous
 
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