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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 1
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Courajod, Louis: La part de la France du Nord dans l'oeuvre de la Renaissance, 3
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0088

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78

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

de Santa-Chiara où la décadence pisane s’étale avec la plus impudente vanité.
Quand Andrea Ciccione, au commencement du xv'siècle, relève un peu l’art napo-
litain (Tombeaux de Ladislas, de la sœur de Ladislas, la reine Jeanne II, et du
Sénéchal Carraciolo à l’église San-Giovianni à Carbonara), il se montre encore
gothique et presque exclusivement naturaliste. L’art antique n’a guère encore
enseigné et, cependant, le goût italien se relève déjà un peu.

Comme exemple de la sculpture florentine ressuscitée, arrachée aux ténèbres
de la dernière période de l’École pisane, j’ai cité les bas-reliefs de Leonardo di ser
Giovanni exécutés vers 1370 pour l’autel d’argent de Pisloja et le bas-relief du
panneau central de l’autel d’argent de Saint-Jean à Florence, sortis soit de la main
du môme auteur, soit des mains du mime atelier d’artistes. Les panneaux de l’au-
tel d’argent de Florence légèrement postérieurs à ceux de Pistoja, sont antérieurs à
l’année 1402. Ces œuvres ne comportent aucune espèce d’élément antique, ni dans
la composition, ni dans l’exécution. Et, cependant, elles contiennent déjà, en
essence, à peu près tout ce que la Renaissance, dans ses derniers et plus complets
développements, pourra nous donner. J’ai eu l’occasion de soutenir la môme doc-
trine en parlant des peintures d’Altichieri et d’Avanzo, dans le nord de l’Italie,
peintures qui respirent toute la rhétorique de la plus belle Renaissance sans con-
tenir cependant un seul mot de latin. A la fin du xiv‘ siècle, en 1375, on faisait
encore en Italie, à Florence, pour le monument le plus illustre de la ville, pour la
façade de la cathédrale de Giotto que Drunelleschi allait remanier et terminer, on
faisait, dis-je, sous prétextes de statues, d’horribles magots comme ceux qu’on voit
à la Porta romana, au pied de l’allée du Poggio impériale, à Florence, et comme
ceux que possède le Louvre par suite de l’acquisition de la collection Campana.
Voilà les ouvrages qui annonceraient Donatcllo et Ghiberli!

Il n’y a presque pas de transition, pourrait-on dire en exceptant quelques
statues du campanile de Florence, entre les œuvres les plus sauvages de l’École de
Fisc et les merveilles qui apparaissent au commencement et dans le premier tiers
du xve siècle. Rien entre les brutalités de l’ère gothique et les caresses de la
Renaissance. Rien entre la platitude d’une école expirante et l’originalité d’une
école renouvelée Au contraire, chez nous, dans le nord de la France, on sculptait
de 1350 à 1410 des statues comme celles de Guillaume Clianac, comme celles de
Philippe VI, de Jean II, de Charles V, de Jeanne de Bourbon; comme lés figures
de la Chaise-Dieu, du contrefort de la cathédrale d’Amiens, de l’abbaye du Eec-
Ilcllouin, de la Chartreuse de Dijon, du Palais des comtes de Poitiers, du château
de la Ferlé-Milon, comme la sainte Catherine de Courtray et la Vierge du Musée
archéologique d’Orléans, etc. L’art de notre pays est alors en possession de presque
tous les moyens dont disposera, cinquante ans plus tard, la Renaissance italienne.
Donc la Renaissance était née et bien vivante avant son apparition en Italie; donc
elle n’avait pas eu besoin pour naître du concours de l’art antique.

La manifestation d’art à laquelle nous devons les œuvres d’orfèvrerie de Pisloja
et de Florence est tout à fait caractéristique. Ce n’est pas, comme on a voulu le
dire, la fin du monde gothique. Ce monde gothique, issu de Giotto et de l’École
pisane, il est mort presque complèlement avec Orcagna. C’est au contraire un
monde nouveau qui commence avec les bas-reliefs de Pistoja et de l’église Saint-
Jean à Florence. Tout y est jeune, profond et spontané. On y voit resplendir la
science d’une composition facile, la verdeur, la crânerie d’une exécution en quelque
 
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