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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 13.1895

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Nr. 2
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Dukas, Paul: Chronique Musicale
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https://doi.org/10.11588/diglit.24666#0188

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176

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

dont certaines autres sont revêtues. Son œuvre satisfait de la sorte aux conditions
les plus rigoureuses de la variété dans l'unité.

Nous avons déjà parlé du Kyrie comme d’une page dans laquelle la forme la
plus travaillée et la plus belle est mise au service d'une inspiration admirable. Ce
morceau est suivi d’un duo, Christe Eleison, dont la mélodie expansive et tendre
forme un contraste complet avec la précédente. Un troisième Kyrie, que l’on
supprime au Conservatoire, ajoute à ces deux expressions d'un même sentiment,
l’une suppliante et résignée, l’autre pleine de confiant espoir, celle d’une robuste,
d’une inébranlable certitude.

Le Gloria comprend huit morceaux, dont les plus merveilleux sont sans conteste
le chœur Qui tollis, l’air Qui sedes et l’étonnante fugue Gum sancto spiritu. Et de ces
trois fragments, le premier dépasse encore les autres en splendeur. Mais comment
décrire les harmonies enveloppantes, les rhythmes onduleux, les accouplements
mystérieux de timbres, qui font planer ce nuage sonore!

Du Credo, Ylncarnatus et le Crucifixus demeurent les points culminants. La
sérénité extasiée, la douceur attendrie du premier font paraître plus poignant encore
l’accent tragique et douloureux du Crucifixus, une page de drame dont l’intensité
n’a été dépassée par aucun maître.

Dans la suite de l’œuvre, l’éclat rayonnant que jette le Sanctus, le ton apaisé
du Benedictus et la touchante imploration de YAgnus Dei témoignent encore de la
puissance du génie de Bach et de son inépuisable variété, et contribuent à justifier
ce qu’écrivait Spitta, à propos de l’œuvre dont nous parlons : « Toutes les compo-
sitions de Bach fussent-elles perdues, à l’exception de cette messe en « si mineur »,
qu’elle suffirait seule pour le faire apprécier par la postérité comme ayant eu, en
quelque sorte, la révélation divine ! »

La messe en « si mineur » a trouvé au Conservatoire, sous la direction de
M. Taffanel, une interprétation de premier ordre. Si, parfois, les mouvements lents
nous ont paru, particulièrement dans le premier Kyrie et le Qui tollis, être un peu
précipités, nous devons accorder par contre que M. Taffanel sait communiquer une
vie très intense aux allégros. Tous les mouvements vifs, surtout la grande fugue du
Gloria, ont été rendus avec une chaleur admirable. M. Taffanel a d’ailleurs fidèle-
ment suivi, quant aux mouvements et aux coupures, les traditions établies par son
prédécesseur, M. Garcin, qui, secondé par le regrettéchefdeschœursHeyberger, nous
donna, il y a quelques années, la première et inoubliable audition du chef-d’œuvre.

Les soli de la messe en « si mineur » étaient chantés par Mme Leroux-Ribeyre,
M,le Eustis, Mme Kinnen et MM. Warmbrodt et Douaillier. L'exécution en a été, à
beaucoup d’égards, remarquable : Mme Kinnen en particulier a conquis d’emblée le
public du Conservatoire par le charme de son bel organe de mezzo-soprano, son
style large et la haute expression qu’elle a su mettre dans le Qui sedes et YAgnus Dei.
M. Warmbrodt, à ses côtés, s’est montré parfait dans le Benedictus. Quant aux chœurs
et à l’orchestre, malgré quelques légères défaillances, leur exécution a été digne de
leur grande et légitime renommée.

PAUL DURAS.

Le gérant : ROUX.

SCEAUX.

1 M I». CH ARAIRE ET Cic.
 
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