LE PORTRAIT DE FEMME
DE LA GALERIE LACAZE
(MUSÉE DU LOUVRE1)
L’inconnue dont voici le portrait n’a rien de troublant ni d’énig-
matique; c’est une dame française du milieu du siècle dernier, une
aïeule souriante et simple sous ses bandeaux de cheveux blancs.
Gracieuse encore d’une grâce modeste et nullement fanée, elle s’est
fait peindre sans grands atours, sans pompeuse mise en scène, assise
chez elle, dans la bourgeoise tenue que les femmes du tiers-état, qui
ont enfanté la France moderne, ont fièrement conservée. C’était sans
doute une femme d’esprit et de cœur; le regard est chargé de bonté
intelligente, la bouche aimable et sérieuse ; elle lisait tout à l’heure,
peut-être Fontenelle, peut-être les Poésies du cardinal de Bernis, à
coup sûr un livre d’ordre et de paix.
Le peintre a négligé de signer son œuvre. On attribuait jadis à
Chardin ce portrait, qui passait pour représenter MmeLenoir, femme
du lieutenant de police. Cette dernière attribution ne saurait être
maintenue 2 ; et le nom de Chardin, quelque regret qu’on ait, semble
1. Galerie Lacaze, n° 1041, II. 0,80; L. 0,65. Fig. gr. nat.
2. Le portrait de Mme Lenoir par Chardin, qui figura au Salon de 1742 et fut
gravé par Surugues le jeune, l’année suivante, sous le nom de l'Instant de méditation,
n’offre aucune ressemblance avec celui qui nous occupe.
DE LA GALERIE LACAZE
(MUSÉE DU LOUVRE1)
L’inconnue dont voici le portrait n’a rien de troublant ni d’énig-
matique; c’est une dame française du milieu du siècle dernier, une
aïeule souriante et simple sous ses bandeaux de cheveux blancs.
Gracieuse encore d’une grâce modeste et nullement fanée, elle s’est
fait peindre sans grands atours, sans pompeuse mise en scène, assise
chez elle, dans la bourgeoise tenue que les femmes du tiers-état, qui
ont enfanté la France moderne, ont fièrement conservée. C’était sans
doute une femme d’esprit et de cœur; le regard est chargé de bonté
intelligente, la bouche aimable et sérieuse ; elle lisait tout à l’heure,
peut-être Fontenelle, peut-être les Poésies du cardinal de Bernis, à
coup sûr un livre d’ordre et de paix.
Le peintre a négligé de signer son œuvre. On attribuait jadis à
Chardin ce portrait, qui passait pour représenter MmeLenoir, femme
du lieutenant de police. Cette dernière attribution ne saurait être
maintenue 2 ; et le nom de Chardin, quelque regret qu’on ait, semble
1. Galerie Lacaze, n° 1041, II. 0,80; L. 0,65. Fig. gr. nat.
2. Le portrait de Mme Lenoir par Chardin, qui figura au Salon de 1742 et fut
gravé par Surugues le jeune, l’année suivante, sous le nom de l'Instant de méditation,
n’offre aucune ressemblance avec celui qui nous occupe.