GAZETTE DES BEAUX-ARTS
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Simplement vêtue d’une robe blanc crème, que vient égayer une
écharpe bleue, les cheveux relevés à la mode du temps et retombant
sur la nuque en boucles ondulées, la Dame en blanc est agréable plus
encore que jolie, et elle a plus de charme intime et paisible que de
grâce légère et frivole. Son visage régulier, aux traits un peu accen-
tués, est tranquille, sincère et honnête; il serait sérieux presque
sans un léger plissement des lèvres, si léger qu’il ne va pas jusqu’au
sourire. Il ne paraît pas que cette jeune femme ait plus d’une tren-
taine d’années. Sans pousser trop loin les méditations, elle n’y
demeure pas étrangère; elle est à une période de vie calme, heureuse
par son égalité même et par les avantages que lui donnent le rang
social, les agréments de sentiments tempérés et bien entendus, l’in-
telligence qui s’intéresse aux choses, et la fidélité à la tradition qui
les maintient à leur place. On ne trouvera ici ni la gravité idéalisée
de certains portraits de Gainsborough, ni le mouvement des toiles de
Reynolds, où il semble que se poursuive le geste fugitif du modèle,
saisi à la bâte par le peintre, mais une vérité qui n’a rien de trou-
blant, une sincérité harmonieuse avec modération, un charme plein
de sécurité.
M. .1 eau Patricot a fait revivre le portrait de Romney avec toute
la puissance et en même temps tout le charme que le modèle récla-
mait. La liberté et la sûreté qui sont habituelles au maître graveur
l’on ici servi à souhait. 11 a interprété fort heureusement la richesse
et la franchise de cette peinture, d’une pâte solide, le brillant de ce
coloris très chaud, où les effets ne sont obtenus qu’avec un petit
nombre de tons et où l’harmonie naît plutôt de l’heureux équilibre
de l’ensemble que de la légèreté et de la grâce du détail. Son talent
si souple et si sûr avait déjà réuni à définir avec une rare maîtrise
le somptueux éclat et la facture large de Gainsborough et de
Hoppner : voici qu’il vient d’exprimer Romney avec une égale vir-
tuosité. Peut-être nulle image n’était en plus heureuse harmonie
avec les qualités de son burin que celle de la Demie en blanc : il y a
justement en elle cette vie heureuse, cette sérénité étrangère aux
complications, cette simplicité sobre et souriante qui s’accorde si
bien avec les dons de M. Jean Patricot, et qu’il a su définir avec
toute sa sympathie et toute sa pénétration d’esprit.
a. c.
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Simplement vêtue d’une robe blanc crème, que vient égayer une
écharpe bleue, les cheveux relevés à la mode du temps et retombant
sur la nuque en boucles ondulées, la Dame en blanc est agréable plus
encore que jolie, et elle a plus de charme intime et paisible que de
grâce légère et frivole. Son visage régulier, aux traits un peu accen-
tués, est tranquille, sincère et honnête; il serait sérieux presque
sans un léger plissement des lèvres, si léger qu’il ne va pas jusqu’au
sourire. Il ne paraît pas que cette jeune femme ait plus d’une tren-
taine d’années. Sans pousser trop loin les méditations, elle n’y
demeure pas étrangère; elle est à une période de vie calme, heureuse
par son égalité même et par les avantages que lui donnent le rang
social, les agréments de sentiments tempérés et bien entendus, l’in-
telligence qui s’intéresse aux choses, et la fidélité à la tradition qui
les maintient à leur place. On ne trouvera ici ni la gravité idéalisée
de certains portraits de Gainsborough, ni le mouvement des toiles de
Reynolds, où il semble que se poursuive le geste fugitif du modèle,
saisi à la bâte par le peintre, mais une vérité qui n’a rien de trou-
blant, une sincérité harmonieuse avec modération, un charme plein
de sécurité.
M. .1 eau Patricot a fait revivre le portrait de Romney avec toute
la puissance et en même temps tout le charme que le modèle récla-
mait. La liberté et la sûreté qui sont habituelles au maître graveur
l’on ici servi à souhait. 11 a interprété fort heureusement la richesse
et la franchise de cette peinture, d’une pâte solide, le brillant de ce
coloris très chaud, où les effets ne sont obtenus qu’avec un petit
nombre de tons et où l’harmonie naît plutôt de l’heureux équilibre
de l’ensemble que de la légèreté et de la grâce du détail. Son talent
si souple et si sûr avait déjà réuni à définir avec une rare maîtrise
le somptueux éclat et la facture large de Gainsborough et de
Hoppner : voici qu’il vient d’exprimer Romney avec une égale vir-
tuosité. Peut-être nulle image n’était en plus heureuse harmonie
avec les qualités de son burin que celle de la Demie en blanc : il y a
justement en elle cette vie heureuse, cette sérénité étrangère aux
complications, cette simplicité sobre et souriante qui s’accorde si
bien avec les dons de M. Jean Patricot, et qu’il a su définir avec
toute sa sympathie et toute sa pénétration d’esprit.
a. c.