Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 31.1904)

GIROLAMO DELLA R O B BIA ET SES OEUVRES

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sans hésitation, l’anatomie est correcte, la structure osseuse indi-
quée avec une science complète. Le modelé est large et massif,
les mains et les pieds d'une beauté de forme toute spéciale, la façon
de traiter le personnage, et particulièrement la figure et la gorge,
précise et puissante. La sculpture n’est pas indigne d’être comparée
avec la plus tragique des statues sépulcrales, celle de Benozzo Fc-
derighi par Luca délia Robbia lui-même. Par la profondeur et la
concentration du sentiment cette tragique figure de Catherine, avec
ses lèvres serrées, rappelle l’œuvre du plus grand, du plus profond
penseur parmi les sculpteurs, Michel-Ange. Quelle œuvre produite
par l’atelier des délia Robbia pendant la première partie du xvic siècle
est d’un mérite suffisant pour être comparée à un type si élevé?
Laquelle de toutes les terres cuites émaillées de Toscane, exécutées
pendant cette période de décadence, montre assez de science, de
soin et d’énergie pour justifier son attribution au sculpteur de la
statue de Paris?

Dans un ouvrage que nous venons de publier sur Luca et Andrea
délia Robbia1 nous avons essayé de définir les caractéristiques les
plus saillantes des trois membres principaux de la famille, et de dis-
tinguer leur manière individuelle. Cette dernière tâche est difficile,
car souvent le travail de plusieurs mains est perceptible dans le même
relief. L’art se prêtait volontiers à de telles collaborations, chaque
partie devant nécessairement être traitée séparément. Dans les
œuvres plus récentes de Luca, telles que les Vertus de San Miniato
et les autels d’Impruneta, le style caractéristique d’Andrea révèle sa
participation, tandis que, dans presque toutes celles que fit Andrea
vers le milieu de sa vie, les manières particulières à Giovanni sont
visibles, affectations qui remplacèrent graduellement et finalement
effacèrent complètement celles de son père. Pour les œuvres émaillées
de Luca, qui ont un mérite artistique infiniment supérieur, il n’y a
que peu d’hésitation dans l’attribution. Celles d’Andrea ont aussi
leurs caractéristiques définies. Avec Giovanni et l’atelier de cette
époque de décadence la tâche devient excessivement difficile, car à
ce moment le caractère de l'art changea entièrement, et l’atelier,
descendu au niveau d’une entreprise commerciale, avait, par sa
recherche de la variété et de la nouveauté, par son imitation des
styles populaires, effectivement supprimé chez ses artistes toute
l’individualité qu'ils auraient pu avoir. La personnalité de Giovanni

1. Luca Andrea délia Robbia and their successors. London, Dent and C°,
1902; in-4°.