DEUX « VIES » D’ÉVÊQUES A LA CATHÉDRALE DE ROUEN 155
été ainsi insérée toute vive (quoique avec une discrétion dont il faut
tenir compte aux imagiers) dans une représentation figurée de la
vie do saint Ouen. Nous connaissions déjà, il est vrai, cette tradition
d’un énorme péché secret miraculeusement révélé à un saint person-
nage, par l’histoire du péché de Charle-
magne ou de Charles Martel, racontée
dans un vitrail et le cordon d’une vous-
sure à Chartres j.
Quoi qu’il en soit, l’ensemble des mé-
daillons consacrés à cette légende est d’un
vif intérêt. La tête du prince des démons
dans le C 3 (fig. III, et détail ci-contre)
est d’une insolence et d’une expression
gouailleuse véritablement étonnantes.
Dans le DI (fig. III, et détail ci-contre),
l'imagier a oublié que l’admonestation
de saint Ouen au pape devait se passer
« in secreto » d’après le texte, et son inad-
vertance à donné des témoins à la scène,
qui, d’ailleurs, est composée de façon
charmante. Le pape porte la tiare ar-
chaïque pointue dont nous connaissons
les exemples fameux à Reims et à Char-
tres 2.
Puis nous arrivons au récit d’un
épisode très populaire reproduit dans
toutes les Vies. Il s’agit du fait miracu-
leux suivant : saint Ouen, visitant son
diocèse en voiture, la fatigue de son âge
no lui permettant plus de monter à cheval, voit soudain ses mules
s’arrêter comme devant un insurmontable obstacle. Il aperçoit alors
1. Voir Emile Mâle, L'Art religieux au xme siècle, nouv. édit., Paris, 1902; —
Bulteau, Monographie de N. D. de Chartres, 1891, 2 vol..
2. Dans un entretien que j’ai eu récemment à Rouen avec M. Devaux,
l’excellent et digne praticien qui, sur les modèles de son maître d’alors M. Jean,
exécuta il y a une quarantaine d’années toutes les réfections du portail de la
Calende, j’ai appris que les restaurateurs avaient cru, devant cette scène, se
trouver en présence de la légende d’un autre saint. Mais cette méprise, bien
naturelle puisque le texte explicatif était resté complètement dans l’ombre jus-
qu’à ces derniers temps, n’a pas eu d’inconvénients graves, car les éléments les
plus typiques de chaque scène sont restés intacts, et ce qui a été refait l’a été
d’après le témoignage des parties frustes qu’il s’agissait de remplacer.
VIE DE SAINT OUEN (DÉTAIL)
REMONTRANCES DE SAINT OUEN
AU PAPE
PLANTATION DE LA CROIX
(Portail de la Calende, cathédrale
do Rouen.)
été ainsi insérée toute vive (quoique avec une discrétion dont il faut
tenir compte aux imagiers) dans une représentation figurée de la
vie do saint Ouen. Nous connaissions déjà, il est vrai, cette tradition
d’un énorme péché secret miraculeusement révélé à un saint person-
nage, par l’histoire du péché de Charle-
magne ou de Charles Martel, racontée
dans un vitrail et le cordon d’une vous-
sure à Chartres j.
Quoi qu’il en soit, l’ensemble des mé-
daillons consacrés à cette légende est d’un
vif intérêt. La tête du prince des démons
dans le C 3 (fig. III, et détail ci-contre)
est d’une insolence et d’une expression
gouailleuse véritablement étonnantes.
Dans le DI (fig. III, et détail ci-contre),
l'imagier a oublié que l’admonestation
de saint Ouen au pape devait se passer
« in secreto » d’après le texte, et son inad-
vertance à donné des témoins à la scène,
qui, d’ailleurs, est composée de façon
charmante. Le pape porte la tiare ar-
chaïque pointue dont nous connaissons
les exemples fameux à Reims et à Char-
tres 2.
Puis nous arrivons au récit d’un
épisode très populaire reproduit dans
toutes les Vies. Il s’agit du fait miracu-
leux suivant : saint Ouen, visitant son
diocèse en voiture, la fatigue de son âge
no lui permettant plus de monter à cheval, voit soudain ses mules
s’arrêter comme devant un insurmontable obstacle. Il aperçoit alors
1. Voir Emile Mâle, L'Art religieux au xme siècle, nouv. édit., Paris, 1902; —
Bulteau, Monographie de N. D. de Chartres, 1891, 2 vol..
2. Dans un entretien que j’ai eu récemment à Rouen avec M. Devaux,
l’excellent et digne praticien qui, sur les modèles de son maître d’alors M. Jean,
exécuta il y a une quarantaine d’années toutes les réfections du portail de la
Calende, j’ai appris que les restaurateurs avaient cru, devant cette scène, se
trouver en présence de la légende d’un autre saint. Mais cette méprise, bien
naturelle puisque le texte explicatif était resté complètement dans l’ombre jus-
qu’à ces derniers temps, n’a pas eu d’inconvénients graves, car les éléments les
plus typiques de chaque scène sont restés intacts, et ce qui a été refait l’a été
d’après le témoignage des parties frustes qu’il s’agissait de remplacer.
VIE DE SAINT OUEN (DÉTAIL)
REMONTRANCES DE SAINT OUEN
AU PAPE
PLANTATION DE LA CROIX
(Portail de la Calende, cathédrale
do Rouen.)