GAZETTE DES BEAUX-ARTS
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baron Oppenheim, de Cologne. Enfin un grand nombre de dessins et
de projets que le Primatice avait faits pour son travail se trouvent
dans les musées d’Europe : au Louvre, à Stockholm, à Chantilly, aux
Uffizzi, au Brilish Muséum (collection Malcolm), à Vienne, à Amster-
dam, etc.
A côté de ces vestiges d’un monument disparu, nous avons encore
quelques témoignages écrits qui nous renseignent amplement sur
l'importance des fresques anéanties sous Louis XV. O11 sait l’admi-
ration qu’inspirait à Rubens cette œuvre du Primatice, dont il s’est
plus d’une fois souvenu. Poussin, de son côté, disait qu’il ne connais-
sait « rien de plus propre que la suite des sujets de la galerie d’Ulysse
à former un peintre et à échauffer son génie1 ». Mignard, Lemoyne
étaient du même avis. « Je me souviens, dit encore Mariette, d’avoir
accompagné dans la galerie d’Ulysse le célèbre François Lemoyne et
j’ai été témoin des éloges sans fin qu’il croyait devoir donner à un
ouvrage le mieux exécuté, selon lui, que nous eussions2. » L’abbé
Guilbert, dans sa Description historique du château, bourg et forest
de Fontainebleau*, publiée en 1731, résume à son tour, avec un peu
trop d’hyperbole peut-être, l’opinion de ceux qui avaient vu cette
immense salle. « La voûte de la galerie d’Ulysse est chargée et enri-
chie de ce qu’il y a de plus parfaits dessins en Europe, et dignes d’être
à jamais conservés, à l’avis des connaisseurs et l’estime des plus
grands maîtres, qui se sont fait l’honneur d’en être les copistes...
C’est une chose avouée de tout le monde que Mignard, Audran et les
plus grands maîtres sont venus étudier ces dessins et se sont formés
sur ces originaux. »
Louis XV fit démolir cette galerie, qui servait de simple prome-
noir, afin de faire bâtir la longue « caserne » que l’on voit aujour-
d’hui sur son emplacement, et où le roi trouvait commode de
loger la foule de plus en plus nombreuse des courtisans. L’état de
conservation des peintures du Primatice était encore parfait,
puisque, sept ans avant leur ruine, Guilbert en parlait avec tant
d’enthousiasme. La pioche des démolisseurs ne respecta rien et
n’épargna aucune de ces fresques, dont les débris furent enterrés
dans les chemins du parc ou jetés à la décharge publique4 !
1. Mariette, Abecedcirio, IV, p. 212.
2. Ibid., VI, p. 297.
3. 2 vol., Paris, 1731, t. II, p. 27.
4. D’autres destructions de ce genre furent faites sous Louis XV dans la galerie
basse et la salle haute du pavillon dit des poêles, dans la chambre de la duchesse
d’Étampes, qui fut transformée en escalier, etc.
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baron Oppenheim, de Cologne. Enfin un grand nombre de dessins et
de projets que le Primatice avait faits pour son travail se trouvent
dans les musées d’Europe : au Louvre, à Stockholm, à Chantilly, aux
Uffizzi, au Brilish Muséum (collection Malcolm), à Vienne, à Amster-
dam, etc.
A côté de ces vestiges d’un monument disparu, nous avons encore
quelques témoignages écrits qui nous renseignent amplement sur
l'importance des fresques anéanties sous Louis XV. O11 sait l’admi-
ration qu’inspirait à Rubens cette œuvre du Primatice, dont il s’est
plus d’une fois souvenu. Poussin, de son côté, disait qu’il ne connais-
sait « rien de plus propre que la suite des sujets de la galerie d’Ulysse
à former un peintre et à échauffer son génie1 ». Mignard, Lemoyne
étaient du même avis. « Je me souviens, dit encore Mariette, d’avoir
accompagné dans la galerie d’Ulysse le célèbre François Lemoyne et
j’ai été témoin des éloges sans fin qu’il croyait devoir donner à un
ouvrage le mieux exécuté, selon lui, que nous eussions2. » L’abbé
Guilbert, dans sa Description historique du château, bourg et forest
de Fontainebleau*, publiée en 1731, résume à son tour, avec un peu
trop d’hyperbole peut-être, l’opinion de ceux qui avaient vu cette
immense salle. « La voûte de la galerie d’Ulysse est chargée et enri-
chie de ce qu’il y a de plus parfaits dessins en Europe, et dignes d’être
à jamais conservés, à l’avis des connaisseurs et l’estime des plus
grands maîtres, qui se sont fait l’honneur d’en être les copistes...
C’est une chose avouée de tout le monde que Mignard, Audran et les
plus grands maîtres sont venus étudier ces dessins et se sont formés
sur ces originaux. »
Louis XV fit démolir cette galerie, qui servait de simple prome-
noir, afin de faire bâtir la longue « caserne » que l’on voit aujour-
d’hui sur son emplacement, et où le roi trouvait commode de
loger la foule de plus en plus nombreuse des courtisans. L’état de
conservation des peintures du Primatice était encore parfait,
puisque, sept ans avant leur ruine, Guilbert en parlait avec tant
d’enthousiasme. La pioche des démolisseurs ne respecta rien et
n’épargna aucune de ces fresques, dont les débris furent enterrés
dans les chemins du parc ou jetés à la décharge publique4 !
1. Mariette, Abecedcirio, IV, p. 212.
2. Ibid., VI, p. 297.
3. 2 vol., Paris, 1731, t. II, p. 27.
4. D’autres destructions de ce genre furent faites sous Louis XV dans la galerie
basse et la salle haute du pavillon dit des poêles, dans la chambre de la duchesse
d’Étampes, qui fut transformée en escalier, etc.