Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 31.1904)

GROTTAFERRATA

343

Malgré ses transformations successives, Grottaferrata a conservé
sa grandeur antique. Je l’ai vue aux jours de fête, alors que les tables
villageoises, dressées par centaines autour de l'abbaye, étaient ser-
vies par des garçons de
rencontre en bras de che-
mise, lorsque la jeunesse
populaire de Rome, déco-
rée de fleurs en papier, et
armée de sifflets en terre
cuite, venait y faire ri-
paille. Je l’ai revue aux
heures silencieuses, dans
la solitude, tandis que
les habitants du bourg
étaient éloignés de leurs
demeures par les travaux
des champs. Je suis en-
tré dans son église au
moment où la foule, se
pressant au milieu de la
nef, regardait, extasiée,
les reflets des cierges sur
la décoration de l’autel
gréco-latin et sur les cha-
subles des officiants :

Grottaferrata est tou-
jours la même. Le monastère domine, de sa majesté millénaire, cette
campagne romaine — qui, elle non plus, ne change pas, — ces vingt-
cinq kilomètres de désert, de désolation, à l’horizon desquels se
dessine le Capitole et se dresse la Ville Lumière, Rome, vers la-
quelle les peuples se tournaient et s’agenouillaient, comme les
Arabes vers la Kaaba.

s AIX T NIL EN PRIÈRE, PAR LE DOMINIQUIN
(Église de Grottaferrata.)

G.-L. POUBEL