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Murger, Henri; Gill, André [Ill.]
La vie de bohème — Paris, [1877]

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https://doi.org/10.11588/diglit.8482#0126
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118

LA VIE DE BOHEME

0r

— Pardon, messieurs, de l'indiscrétion que je vais commet-
tre, dit-il. Il y a longtemps que je brûle du désir de faire votre
connaissance, mais je n'avais pas trouvé jusqu'ici d'occasion
favorable pour me mettre en rapport avec vous. Me permettez-
vous de saisir celle qui se présente aujourd'hui ?

— Certainement, certainement, fit Colline, qui voyait venir
l'étranger.

Rodolphe et Marcel saluèrent sans rien dire..

La délicatesse trop exquise de Schaunard.faillit tout perdre.

— Permettez, Monsieur, dit-il avec vivacité, vous n'avez pas
l'honneur de nous connaître, et les couvenances s'opposent à
ce que... Auriez-vous la bonté de me donner une pipe de
tabac?... Du reste, je serai de l'avis de mes amis...

— Messieurs, reprit Barbemuche, je suis comme vous un
disciple des beaux-arts. Autant que j'ai pu m'en apercevoir en
vous entendant causer, nos goûts sont les mêmes, j'ai le plus
vif désir d'être de vos amis, et de pouvoir vous retrouver ici
chaque soir... Le propriétaire de cet établissement est un bru-
tal, mais je lui ai dit deux mots, et vous êtes libres de vous re-
tirer... J'ose espérer que vous ne me refuserez pas les moyens
de vous retrouver en ces lieux, en acceptant le léger service
que...

La rougeur de l'indignation monta au visage de Schau-
nard.

— Il spécule sur notre situation, dit-il, nous ne pouvons pas
accepter. Il a payé notre addition : je vais lui jouer les vingt -
cinq francs au billard, et je lui rendrai des points.

Barbemuche accepta la proposition et eut le bon esprit de
perdre; mais ce beau trait lui gagna l'estime de la Bohème.

On se quitta en se donnant rendez-vous pour le lende-
main.

— Comme ça, disait Schaunard à Marcel, nous ne lui devons
rien"; notre dignité est sauvegardée.

— Et nous pouvons presque exiger un nouveau souper, ajouta
Colline.

m

m

XII

UNE BÉCEPTION DANS LA BOHÊME

Le soir où il avait, dans un café, soldé sur sa cassette parti-
culière la note d'un souper consommé par les bohèmes, Caro-
lus s'était arrangé de façon à se faire accompagner par Gus-
tave Colline. Depuis qu'il assistait aux réunions des quatre
amis dans l'estaminet où il les avait tirés d'embarras, Carolus
avait spécialement remarqué Colline, et éprouvait déjà une
sympathie attractive pour ce Socrate, dont il devait plus tard
devenir le Platon. C'est pourquoi il l'avait choisi tout d'abord
pour être son introducteur dans le cénacle. Chemin faisant,
 
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