LES PEINTBES DE L’AFRIQUE FRANÇAISE
GUSTAVE GUILLAUMET
De tous les maîtres orientalistes qui ont illustré jusqu’à présent notre
école française, Gustave Guillaumet demeure encore, à notre humble
avis, le plus grand sans doute, parce qu’il a été le plus sincère. Nous
n’entendons pas dire par là que les remarquables artistes qui le précé-
dèrent dans cette voie aient montré moins de zèle ou de conscience
dans la. recherche de la vérité ; mais ils poursuivaient un idéal diffé-
rent. Tandis que Delacroix, ce génial visionnaire, retrouvait sur la
côte marocaine, hâtivement explorée, un nouveau prétexte pour aviver
l’éclat, déjà si furieux, de sa palette romantique, — le rêveur Fromen-
tin s’appliquait, durant ses séjours réitérés en Algérie, à traduire,
dans ses tableaux comme dans ses livres, la douce harmonie, le charme
poétique des plaines du Sahel, aux terrains rosés, aux horizons
bleuâtres.
Guillaumet semble enfin avoir saisi, le premier, le taureau par les
cornes, et résolu d’une manière décisive, après de longs tâtonnements
et seulement dans les sept ou huit dernières années de sa vie, le pro-
blème ardu, compliqué, de la lumière solaire ; son observation sagace
lui livrait du même coup la clef de tout ce merveilleux pays.
Une mort soudaine devait, hélas ! ravir presque aussitôt le vaillant
artiste à sa glorieuse conquête, et anéantir avec lui les magnifiques
espérances que son évolution féconde faisait légitimement concevoir.
Guillaumet expira le 14 mars 1887, dans sa quarante-septième année,
et son œuvre patiente, amassée par tant d’infatigables labeurs, con-
servée ensuite avec tant de soins jaloux, vient de se disperser au feu
d’enthousiastes enchères. Les trois jours d’exposition particulière qui
ont précédé sa vente, dans la galerie Georges Petit, ont fait connaître
aux délicats un Guillaumet intime, d’une saveur originale et raffinée,
qu’un long mois d’exhibition officielle à l’École des Beaux-Arts
n’avait pu parvenir à nous révéler aussi pleinement, en dépit de notre
admiration fervente. C’est que les préparatifs sommaires d’une instal-
lation rapide avaient fait omettre, dans le choix primitif, quantité de
curieuses études, de minutieux dessins rehaussés, de merveilleux pas-
6
GUSTAVE GUILLAUMET
De tous les maîtres orientalistes qui ont illustré jusqu’à présent notre
école française, Gustave Guillaumet demeure encore, à notre humble
avis, le plus grand sans doute, parce qu’il a été le plus sincère. Nous
n’entendons pas dire par là que les remarquables artistes qui le précé-
dèrent dans cette voie aient montré moins de zèle ou de conscience
dans la. recherche de la vérité ; mais ils poursuivaient un idéal diffé-
rent. Tandis que Delacroix, ce génial visionnaire, retrouvait sur la
côte marocaine, hâtivement explorée, un nouveau prétexte pour aviver
l’éclat, déjà si furieux, de sa palette romantique, — le rêveur Fromen-
tin s’appliquait, durant ses séjours réitérés en Algérie, à traduire,
dans ses tableaux comme dans ses livres, la douce harmonie, le charme
poétique des plaines du Sahel, aux terrains rosés, aux horizons
bleuâtres.
Guillaumet semble enfin avoir saisi, le premier, le taureau par les
cornes, et résolu d’une manière décisive, après de longs tâtonnements
et seulement dans les sept ou huit dernières années de sa vie, le pro-
blème ardu, compliqué, de la lumière solaire ; son observation sagace
lui livrait du même coup la clef de tout ce merveilleux pays.
Une mort soudaine devait, hélas ! ravir presque aussitôt le vaillant
artiste à sa glorieuse conquête, et anéantir avec lui les magnifiques
espérances que son évolution féconde faisait légitimement concevoir.
Guillaumet expira le 14 mars 1887, dans sa quarante-septième année,
et son œuvre patiente, amassée par tant d’infatigables labeurs, con-
servée ensuite avec tant de soins jaloux, vient de se disperser au feu
d’enthousiastes enchères. Les trois jours d’exposition particulière qui
ont précédé sa vente, dans la galerie Georges Petit, ont fait connaître
aux délicats un Guillaumet intime, d’une saveur originale et raffinée,
qu’un long mois d’exhibition officielle à l’École des Beaux-Arts
n’avait pu parvenir à nous révéler aussi pleinement, en dépit de notre
admiration fervente. C’est que les préparatifs sommaires d’une instal-
lation rapide avaient fait omettre, dans le choix primitif, quantité de
curieuses études, de minutieux dessins rehaussés, de merveilleux pas-
6