Société de l'Histoire de l'Art Français [Hrsg.]: Bulletin de la Société de l'Histoire de l'Art Français (1912)

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Sans perdre de temps, un ami du vieux Paris, un
homme de goût, l’architecte Giraud, réclame énergi-
quement contre cet acte de vandalisme. Voici la lettre
qu’il écrit, en thermidor an V, à l’administration cen-
trale du département de la Seine :

DÉPARTEMENT DE LA SEINE.

Bureau des Travaux publics.

Copie de la lettre du citoyen Giraud,

architecte du Palais de justice et des maisons d’arrêt,
à l’administration centrale du Département de la Seine.

Citoyens administrateurs,

Tant que les monuments et édifices publics ont été con-
fiés à ma surveillance, comme architecte en chef du
département, je me suis constamment et courageusement
opposé à leur destruction. Aussi, lors même que le plus
affreux vandalisme dominait, j’ai eu le bonheur d’arra-
cher deux fois des mains perfides et barbares de cette
secte infernale deux des plus beaux monuments qui
existent à Paris, le dôme des Invalides et la porte Saint-
Denis.

Aujourd’hui, j’ai à vous entretenir d’un autre monument
non moins précieux dans son genre et qui va être proba-
blement détruit si l’on n’y prend garde : c’est la tour de
Saint-Jacques-la-Boucherie.

Cette tour, l’église et le terrain sur lequel elles sont
bâties ont été vendues à des spéculateurs par le Bureau
du Domaine national. Il est mathématiquement démontré
que les seuls matériaux valent plus que le prix de l’adju-
dication et que le terrain vaut plus du double. Avec un
pareil avantage, serait-il possible de croire que l’on souf-
frît qu’une main avide portât atteinte à la tour, qui est
peut-être le seul monument de son espèce dans Paris qui
mérite d’être conservé?

Au nom des arts, au nom de l’honneur et de l’intérêt
national, je vous prie, je vous supplie même, Citoyens
administrateurs, d’user de tous les moyens qui sont en
votre pouvoir pour faire distraire cette tour de l’adjudica-
tion. En la conservant, loin de nuire aux percées qui