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Faure, Élie
Histoire de l'art ([Band 4]): L'art moderne — Paris: Librarie Plon, 1948

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https://doi.org/10.11588/diglit.71101#0181
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même et de son temps au fond de l'âme d'un prélat ou d'un
écrivain ou d'un homme de cour ou d'une mondaine, n'ont
que des rapports d'apparence avec la grande plastique sen-
suelle pour qui la psychologie n'a que de faibles attraits.
Mais elles nous apportent le témoignage d'un échange sin-
gulièrement sincère entre celui qui écoute et regarde et celui
qui cause et agit. Perronneau n'est pas souvent un peintre.
Mais il est toujours un observateur précis, de net et ferme
langage et n'abandonnant rien qu'il n'ait d'abord interrogé.
Les visages de ceux qui sont autour de lui passent de son œil
à sa main comme si son intelligence était un filtre retenant
tout ce qui n'est pas l'expression de l'intelligence. La Tour
n'est pas un artiste. C'est un miroir. Il n'imagine pas une
forme nouvelle où tous les éléments du monde magnifiés
entrent d'un seul élan pour élever la vie jusqu'au niveau
d'une âme. Voltairien, ami de Voltaire, il critique, comme
Voltaire, d'un trait exact et sec. Quand, plus vieux, il pré-
tendra dire plus qu'il ne peut et ne sait dire, il sombrera.
Au devant du masque vide, l'esprit se fixe en traits aigus.
Sous lui, ni forme ni matière. L'esprit seul, isolé du cœur,
réduit à ses rouages fins qui entrent, dissèquent et classent.
Il n'y a que la peau, les os manquent, mais dans la peau qui
se crispe et grimace, l'éclair de la bouche et de l'œil. On croit
ce siècle matériel. Il n'est qu'esprit, esprit séché qui tord et
consume et corrode. Tout ce qu'il a de charme et de jeunesse
s'y brûle comme un papillon à la flamme d'une lampe.
Il est esprit, et sa passion est tout entière spirituelle. Il
est critique, c'est pourquoi il n'est point poète. Il est senti-
mental, c'est pourquoi il n'est point plastique. Il est décla-
matoire, c'est pourquoi il n'est point lyrique. Il est sensible,
c'est pourquoi il n'est point sensuel. Il se dédouble. L'un
démontre, l'autre jouit. Et quand on démontre seulement,
on ne va jamais à la vie pour lui demander d'éduquer et de
féconder son désir. Et quand on jouit seulement, on ne va
jamais à l'esprit pour approfondir et épurer sa jouissance.
A part Watteau et Gluck, où l'amour est mêlé de larmes, où
les lèvres ne se donnent qu'avec un profond sanglot, où la

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