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dans l'action politique il vient, retourne les esprits, et tente
de refaire un monde sur le plan de la volonté. La grâce fuit,
hélas ! et le reste de vie qu'elle entraînait avec elle, mais voici
qu'apparaît la force et s'entrevoit la vérité. Une vérité abs-
traite, hors l'espace, hors le mouvement et les échanges de
la vie, sans doute, correspondante à l'homme abstrait. Une
esthétique, il est vrai, ressemblant à ces Constitutions tirées
de Montesquieu et de Rousseau, empruntées à Genève, à
Londres ou à Rome, qui se bousculèrent et se renversèrent
les unes sur les autres en dix ans pour donner à la France
un support politique que ni ses aptitudes, ni son tempéra-
ment ne l'avaient préparée à recevoir. N'importe. Pendant
ces essais théoriques, l'esprit de la Révolution, l'esprit de
vie, se répandait sur l'Europe avec ses armées et montait
dans le sentiment de quiconque était noble et fort.

VI
On le vit bien. Kant se détourna de sa route. Gœthe s'ar-
rêta sur la sienne un moment. Beethoven prit tous les vents
du. ciel pour y souffler son espoir. Qu'importe la France
presque uniquement raisonneuse et peu artiste de ce grand
siècle vivant! Elle avait bien assez à faire avec les vieux
mythes à abattre, les jeunes à pressentir, avec la terreur et
l'amour à imposer par le fer. Elle avait eu Montesquieu,
Voltaire, Diderot, Jean-Jacques, Vauvenargues. Elle avait
eu Buffon, qui recréa la terre. Elle avait Laplace, qui recréa
le ciel. Elle avait Lavoisier, qui recréa l'eau et le feu. Elle
avait Lamarck, qui recréa la vie. L'Allemagne offrait ses
hymnes aux multitudes que leur esprit déchaînait.
Flux et reflux mystérieux des âmes ! Tandis qu'une guerre
atroce étouffait l'Allemagne, la France aristocratique
du xviie siècle élevait la charpente intellectuelle dont la
musique allemande devait s'emparer d'abord pour donner

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