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des missions, des vaisseaux partis à sa voix sur tous les che-
mins d'apostolat et de conquête. Il est possible qu'Antoine
Mor, le Hollandais espagnolisé si fortement épris des visages
pâles et des regards fiévreux qu'on rencontrait à sa cour, que
les Castillans Sanchez Coello ou Pantoja de la Cruz dont
l'esprit hautain et triste s'était si spontanément plié à la dure
étiquette qui dressait dans leurs robes raides les infantes
ennuyées, se soient déclarés impuissants à décorer les murs.
Moralès, le peintre mystique et barbare d'Estramadure,
n'était pas fait non plus pour cette tâche, et d'ailleurs il allait
mourir. Mais on connaissait déjà de bons peintres à Valence.
Il existait à Cordoue une école florissante. Et surtout il y
avait à Tolède un artiste formé, lui aussi, par les Italiens et
qui peignait, au moment où on terminait 1'Escorial (i), une
des plus grandes œuvres de la peinture (2), révélant d'un seul
coup l'âme espagnole à elle-même, lui, Grec élevé à Venise,
alors que les Espagnols hésitaient à l'affirmer.

II

Philippe II n'était certainement pas capable d'élever sa
dévotion funèbre au niveau de la passion qui remplissait une
petite église de Tolède de visages rendus livides par l'afflux
du sang au cœur et d'yeux de fièvre et d'adoration frénétique
et de mains desséchées toutes levées vers le ciel. Sinon, il eût
pu sortir quelque chose de grand de sa rencontre avec le
Greco. Quand Théotocopuli arriva à Tolède, il n'y avait
pas vingt ans qu'lgnace de Loyola, la cuisse cassée et re-
cassée, s'était traîné vers l'autel de la Vierge pour y déposer
son épée. Don Juan d'Autriche clouait la bannière du Christ
au grand mât des navires qu'il allait conduire à Lépante. Thé-
(1) Bâti de 1563 à 1584.
(2) L'enterrement du comte d'Orgaz est de 1584.

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