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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 13.1862

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Nr. 1
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Fournier, Edouard: L' art de la reliure en France, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.17332#0034

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28

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

de mon dit seigneur. » Or, qu'était ce Josset d'Esture? Un orfèvre de
Paris. Il avait façonné les fermouers, semblant d'argent doré, il les avait
csmaillez aux armes du duc, et il avait reçu pour cela la somme de
80 francs 5 sols h deniers. De plus, comme vous venez de le voir, il
avait fourni les étoffes « pour yceulx fermouers. » Le pauvre liéeur, cir-
conscrit, garrotté dans son métier par les privilèges des autres, n'aurait
rien pu de tout cela.

Pour échapper, quand on s'occupait de la parure des livres, aux
réclamations des industries voisines, et avoir le droit de la faire com-
plète, sans leur donner prise contre soi, il fallait être moine dans un de
ces monastères à la porte desquels expirait tout privilège autre que ceux
de la maison, ou bien être au service de quelque prince ou de quelque
grand seigneur assez haut titré pour faire de son hôtel un lieu de fran-
chise industrielle. Arnett, en son curieux ouvrage sur Y Histoire du livre
et des arts epii s'y rapportent parle de l'Irlandais Dagaens, qui était
tout à la fois habile calligraphie et bon relieur, c'est-à-dire qui pouvait
tout ensemble écrire le manuscrit et rhabiller d'or et d'argent. Ce Dagaens
était un moine; la multiplicité de ses talents, et surtout le droit qu'il a
de les employer, ne s'expliquent qu'ainsi. Ailleurs il n'aurait pu en avoir
qu'un seul à la fois tout au plus. Les écrivains l'eussent forcé de n'être
qu'écrivain, et les relieurs de n'être que relieur, en se gardant bien
d'empiéter sur l'art des orfèvres ! On comprend par là comment le pro-
grès marcha dans les cloîtres et ne fit pas un pas dans les villes. Bilfiïd,
de Durbam, à qui l'on devait la reliure, éblouissante d'or, d'argent et de
pierreries, qui couvrait l'admirable manuscrit du vn° siècle connu sous
le nom de Texte de saint Cutkbert, et qui se trouve aujourd'hui à la biblio-
thèque Cottonienne, plus modestement vêtu de cuir de Russie ; Bilfild
était moine, comme Dagaens; l'Irlandais Lltan, si vanté comme habile
relieur dans l'épître en vers de l'évèque Ethelworf à Egbert, était un moine
aussi; et Henri, qui après avoir transcrit, en 1178, Térence, Boëce, Sué-
tone, Claudien, les groupa sous une seule reliure qu'il lit lui-même, et
qu'il orna de bossettes de cuivre, Henri était un moine encore: il appar-
tenait à l'abbaye des Bénédictins d'Hyde

Les gens des cloîtres monopolisaient si bien à leur profit les droits de
tous les métiers, surtout pour l'industrie du livre, depuis sa transcription

'I. An Inqmry in to thenature and form of (/te Dooks, etc.; London, 1837, in-8°,
p. 34, 45-47, 170-172.

2. Jbid. Voir dans les Curiosités bibliographiques de M. Ludovic Lalanne, 1845,
in-8°, p. 35, la citation d'un passage de Tritheim, abbé de Spanheim au xve siècle, sur
les différents détails de l'industrie du livre dans les cloîtres.
 
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