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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 13.1862

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Nr. 5
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Gruyer, François-Anatole: Le triomphe de Galatée
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https://doi.org/10.11588/diglit.17332#0454

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Z,32 GAZETTE DES BEAUX.-A H TS.

lature de l'un formant, avec la souplesse et l'agilité de l'autre, un
contraste éloquent et une opposition heureuse. Le fils d'Ixion retourne
sa tète en arrière, de manière à voir le visage de la fille de Nérée. Le
profil de la nymphe se marie admirablement avec la face du centaure:
sa chevelure, dénouée et flottante, semble poussée par un souffle mysté-
rieux, et se mêle avec les pampres qui coiffent la tète de son ravis-
seur. Si le regard de la néréide reflète un des traits de l'Amour, les
yeux du centaure expriment quelque chose d'une profonde intimité.
Ces deux regards s'attirent, se parlent, se répondent, et ce muet lan-
gage, si délicat et si difficile à traduire, n'a rien qui choque la con-
venance ni qui blesse l'esprit1... Un des caractères les plus élevés du
génie de Raphaël est d'avoir su toucher à tout sans jamais froisser
rien, d'avoir pu tout dire et devant tous sans jamais heurter personne,
d'avoir eu le don de lever tous les voiles sans que le regard pût jamais
faire dévier la pensée. Sous ce rapport, il a été unique dans les temps
modernes, et c'est ce qui le place à une si grande hauteur au-dessus des
plus grands artistes de la Renaissance, au-dessus des Gorrège et des
Titien, au-dessus même de Léonard : je ne parle pas de Michel-Ange,
aussi grand que Raphaël mais pour d'autres causes, qu'aucune affinité
sérieuse ne rattache d'ailleurs à l'antiquité, et qu'il faut laisser dans sa
majestueuse solitude.

Ce groupe, qui précède Galatée, est intact et bien conservé. Les
siècles ont respecté cette partie du chef-d'œuvre, que nulle main pro-
fane n'a heureusement encore songé à restaurer. La fresque est là dans
son harmonie première et avec ses valeurs de tons primitives. Les chaire
sont belles de modelé, de couleur et de vitalité. Il est difficile d'ima-
giner quelque chose de plus séduisant que la blanche figure de cette
nymphe, prise entre le centaure marin qui l'enlève et le triton qui Lac-
compagne, semblable à une fleur délicate entre les feuilles nerveuses
qui l'encadrent. On sent là toute la suavité des plus douces caresses du
pinceau de Raphaël2.

Trois personnages de même ordre, deux tritons et une néréide, sui-

I. On peut comparer ces figures à des figures de néréides et de tritons posées d'une
manière analogue, dans le bas-relief du Triomphe de Vénus marine (ce bas-relief se
trouve reproduit dans Montfaucon), el la comparaison n'est certes pas au désavantage
de Raphaël.

'2. On pourrait rapprocher de ce groupe le centaure marin et la néréide du musée
Pio-CIementino àRome (Voir Visconti.l. I,\\xiv). Dans ce marbre antique, le centaure
a des oreilles de faune et de petites cornes. Homme jusqu'au milieu du corps, il a les
jambes du cheval et la queue du poisson. 11 enlève une néréide qui se renverse en
 
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