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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 16.1864

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Nr. 5
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Fournier, Edouard: L' art de la reliure en France, [5]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18739#0471

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L’ART DE LA RELIURE EN FRANCE.

U5

du talent : il n’arriva qu’à la fortune. Sur la lin de sa vie, il était riche
de plus de 500,000 francs. 11 crut bon alors de se donner le luxe d’une
bibliothèque, il la gâta en la reliant lui-même. « Ses reliures, selon
M. P. Jannet1, n’ont qu’un mérite, mais un grand mérite : les volumes
sortis de ses mains ont assez de marge pour pouvoir être reliés de nou-
veau. » Son fds fut plus habile et avec plus de goût. Quand Dibdin vint
à Paris, sous la Restauration, c’était le relieur fashionable, comme il
l’appelle2.

Thouvenin fit mieux encore. Le réveil date vraiment de lui. Son pre-
mier mérite fut la solidité. Il arriva peu à peu ensuite à l’élégance, au
goût, à la délicatesse, enfin à la perfection. Si, pendant longtemps, ses
reliures furent d’une ornementation pesante et baroque, au moins
pouvait-on remarquer le soin avec lequel le livre était battu, cousu,
endossé; la fermeté du carton, rendu égal et dur par un laminage intelli-
gent; la sûreté de main dans l’application des dentelles et des filets
noirs combinés avec les filets d’or; la précision enfin, ainsi que la netteté de
ces gaufrages dont Thouvenin n’eut que trop la manie. Ce n’était pas de
bon goût, mais c’était bien travaillé. Habilement conseillé par les ama-
teurs, qui se formaient en le formant, Thouvenin perdit ses défauts et
garda ses qualités. 11 devint artiste et resta bon ouvrier. Mais ce furent là
des efforts qui le tuèrent. Quand il mourut, le 3 janvier 183A, ayant qua-
rante ans à peine, il était épuisé.

u II eut, dit Nodier3 4, — l’un de ses meilleurs guides, et pour qui, entre
autres ouvrages, il avait fait cette magnifique reliure en maroquin dite à
la fanfare**, qui est restée si célèbre, — il eut àla fin deux ou trois années
de perfection qui le consumèrent, et pendant lesquelles il s’est reporté
avec un habile courage aux beaux jours de Derome, Padeloup, du Seuil,
Anguerran, Boyer, Gascon, pour les surpasser en les imitant. »

Depuis lui, l’art a marché encore. Les artistes en reliure que nomment
tous les amateurs ont perfectionné ses mérites sans retrouver ses défauts.

ÉDOUARD FOURNIER.

1. Revue européemie, 15 août 1859.

2. Bibliographical Deccimeron, II, 498.

3. Le Temps, 4 juillet 1834.

4. Ainsi nommée, parce qu’elle fut exécutée pour le rarissime volume Fanfares et
Courvées abbaclesques.
 
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