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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 16.1864

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Nr. 5
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Ronchaud, Louis de: Le tombeau de Madame de Lamartine: sculpté par M. Adam Salomon
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https://doi.org/10.11588/diglit.18739#0504

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LE TOMBEAU DE MADAME DE LAMARTINE

SCULPTÉ PAR M. ADAM SALOMON

ous avez vu, dans nos églises gothiques, ces statues couchées sur des
tombeaux, qui nous représentent les morts dont ces monuments ren-
ferment dépouille. Rien de plus religieux que ces œuvres des sculp-
z teurs du moyen âge. Les paupières abaissées, pour indiquer que les
yeux ne doivent plus s’ouvrir aux clartés d’ici-bas ; les bras croisés sur la poitrine,
dans l’attitude du recueillement ou de la contrition, exprimant le détachement
de la terre, la soumission aux lois divines; parfois les mains jointes, comme en
une perpétuelle oraison, le mort, étendu sur son sépulcre comme sur un lit fu-
nèbre, paraît, moins mort qu’endormi, attendre, dans ce dernier sommeil, l’aurore
de la résurrection céleste. Par un effet de la foi de l’artiste et de celle de son temps,
une vie secrète se fait sentir sous la froide immobilité de la pierre et sous les longs
plis droits des vêtements qui enveloppent la figure, vie toute mystique et qui n’a plus
rien à faire avec les choses humaines. Dans leurs chapelles sombres, éclairées par des
cierges ou des lampes, derrière les grilles qui les séparent de la nef, ces morts pieux
nous apparaissent comme les habitants d’un cloître fermé du côté de notre monde,
où s’ouvre dans les ténèbres la porte qui mène à l’éternité.

C’est le souvenir de ces tombes chrétiennes qui a inspiré M. Adam Salomon, lors-
qu’il sculptait la pierre sépulcrale de madame de Lamartine. En reproduisant les traits
de cette noble et sainte femme, dont tous ceux qui l’ont connue ont gardé la mémoire
profondément dans le cœur, l’éminent artiste l’a représentée dans la dernière ex-
pression des sentiments de toute sa vie, dans l’acte suprême perpétué de sa foi et de
son espérance. Le corps enveloppé de son linceul, semblable à une religieuse de la
mort, la pâle et douce figure, que l’ange de la dernière heure a touchée de son doigt
léger et comme respectueux, repose, la tète sur l’oreiller funèbre, sereine, endormie à
la terre, prête à s’éveiller pour le ciel. Toutefois, en empruntant aux statues des anciens
tombeaux le repos religieux, on peut dire hiératique, de leur attitude, le sculpteur
moderne n’a pas voulu faire une œuvre purement archaïque; il n’a pas emprisonné sa
pensée dans les formes gothiques, mais il lui a laissé, tout en s’inspirant de la foi des
 
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