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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 16.1864

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Nr. 5
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Burty, Philippe: Exposition de la Société des Amis des Arts de Bordeaux
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https://doi.org/10.11588/diglit.18739#0473

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EXPOSITION DE LA SOCIÉTÉ DES AMIS DES ARTS.

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ciaux, bien plus souvent dangereux que profitable : pour quelques-
uns qui y trouvent le vrai développement de leur génie, les autres,
natures moins robustes, y perdent l’accent intime de leur nature.
Cette inondation du tableau de genre, qui depuis quelques' années a
rompu toutes les digues, n’est-ce point aux médiocrités besogneuses
de la province que nous la devons? Croit-on que sur les trente ou qua-
rante jeunes peintres qui, cette année encore, nous en avons la quasi-
certitude, ont envoyé au salon une « jeune fille causant avec sa per-
ruche, » il n’y en a pas trois ou quatre qui, restés dans leur province, ne
fussent parvenus à peindre de bons portraits, à décorer par de loyales pein-
tures les murs d’une mairie ou d’une salle de théâtre? N’eût-ce point été
tout bénéfice que les antres eussent renoncé à un métier pour lequel ils
n’étaient point nés? Paris est l’hospice sur les marches duquel toutes les
intelligences dévoyées viennent déposer les fruits amers de leurs faiblesses
avec l’idéal.

Chacun vient étudier à Paris les recettes en vogue, méprisant la naïve
nature de la province natale. — Et cependant, pour ne parler que de
Bordeaux, quelle ville offre aux artistes plus d’éléments de pittoresque?
11 y a encore dans la vieille ville des maisons du xive et du xve siècle, aux
pignons découpés; des boutiques de « pharmacopole, » s’enfonçant, sans
devanture, sous des arcades profondes en plein-cintre, avec des crocodiles
et des serpents boas suspendus aux poutres du plafond; des portes du
xviie siècle de la plus hère allure, dont les assises massives et brunies sont
envahies par de folles herbes. Si ce n’est point assez pour les aquarellistes
— et Bonington n’avait point trouvé plus à Rouen ou à Bourges, — ils
ont encore le port, ce port magnifique, plein de mouvement et de bruit,
que les quais enserrent en demi-cercle sur un développement de trois
quarts de lieue. Les peintres de personnages ont sous les yeux une popu-
lation élégante, gaie, remuante : des hercules qui transportent des balles
de coton aussi facilement que nos commissionnaires portent une cage à
serin; des grisettes au teint mat, aux yeux ardents, à l’allure souple,
passant d’un pied rapide, coiffées du madras ou du foulard noué sur la
nuque comme un turban d’odalisque mis à la diable. Le paysage, dans
les environs de la ville n’offre pas moins de caractères tranchés. Le ciel
est brillant et fin ; le voisinage de la mer lui envoie souvent des masses
de nuages superbes. Les bœufs traînent lourdement les charriots ou tirent
la charrue sur la limite des Landes aux longs steppes mélancoliques.
Les vendanges doivent donner lieu à des épisodes variés et tout originaux.
Comment ne s’est-il point encore rencontré à Bordeaux un artiste pour
peindre le poème de la vendange?
 
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