GAZETTE DES BEAUX -ARTS.
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il est même probable que, lors de la consécration de l’église de Sainte-Croix, accomplie
le '14 septembre 4 295, il était déjà complètement achevé et placé dans ce même endroit
qu’il occupe au milieu du chœur, les pieds tournés vers le maître-autel ; il est acces-
sible de tous côtés, et visible dans tous ses détails.
«Voilà, Monsieur, ce qui m’a paru mériter votre attention, concernant le monument
de Henri IV. Je vous demande pardon si, répondant à votre bienveillante invitation,
je l’ai fait d’une manière trop prolixe peut-être; mais ne me croyant pas assez compé-
tent, ni trop bien informé pour présenter mes propres opinions sans commentaires ni
pièces à l’appui, j’ai mieux aimé vous donner, Monsieur, tous les détails nécessaires,
pour vous mettre à même de juger en connaissance de cause.
«Aussi je m'estimerai heureux, Monsieur, si vous daignez me communiquer, un
jour, votre opinion décisive sur ce curieux monument; elle pourra me guider, j’en suis
sûr, dans mes études ultérieures sur des objets analogues pour lesquels notre pays est
une mine vierge encore de toute investigation approfondie.
« Malgré toute la longueur de cette lettre, j’espère que vous ne m’en voudrez pas,
Monsieur, si j’ose ajouter encore quelques mots sur une espèce de terres cuites propres
surtout à nos contrées boréales; ce sont les carreaux de poêles. La rigueur du climat a
fait adopter, depuis un temps immémorial, l’usage des poêles, les cheminées connues
dans d’autres pays ne pouvant pas nous suffire. Les poêles primitifs, ainsi qu’ils le sont
encore aujourd’hui chez nos villageois, étaient en terre glaise battue, ou bien en briques
tant crues que cuites au feu. Ce n’est que vers le milieu du xve siècle que l’usage de
les revêtir avec des carreaux simplement biscuits ou vernissés s’est répandu; il est
même probable qu’il nous fut apporté de la Scandinavie; ce genre de calorifères portant
jusqu’à présentie nom de poêles suédois. Les carreaux enterre cuite, adoptés d’abord
dans les maisons riches, participèrent bientôt de l'ornementation à la mode du jour, et
devinrent même quelquefois de véritables objets de luxe. Chaque carreau reçut un
relief représentant tantôt les armoiries du seigneur et de sa famille, tantôt d'autres
ornements. J'ai, dans ma collection, de ces carreaux du xvc, xvip et xvne siècle, et j’en
connais beaucoup qui sont vraiment admirables de richesse et d’exécution. Un vernis
vert, brun, marbré, couleur de chocolat au lait ou même noir, avec un reflet métallique,
les recouvrait primitivement, mais c’est à partir du commencement du xvnc siècle
surtout que nous les voyons parés de peintures en véritable émail, sur fond blanc
à l’étain. Ainsi nous apparaissent les superbes carreaux cracoviens, de 1630, 1647,
etc., larges de0n,270 à 0m400, hauts de 0m520 à 0m470), enrichis d’armoiries, de légen-
des, et de divers ornements modelés en relief et peints de couleurs éclatantes, dorés
même parfois. Les poêles d’une grandeur énorme étaient surmontés de frontons avec
vases, statues et emblèmes en terre cuite émaillée. Vers le milieu du siècle passé, les
carreaux devinrent beaucoup plus simples, unis, avec un petit filet saillant et un orne-
ment quelconque au milieu, le vert de gris dominant comme couleur. On commença
aussi à faire venir alors des carreaux en faïence de Saxe, avec des dessins de chasse,
carreaux bien connus des amateurs. Enfin, ce n’est que depuis une cinquantaine
d’années environ qu’on emploie plus généralement des carreaux dits en faïence ou en
porcelaine, couverts d’un émail blanc uni. Tous ces carreaux, vernis ou émaillés, doi-
vent être classés parmi les véritables terres cuites; ils sont en argile plus ou moins
rouge, bien choisie et quelquefois purifiée à la mécanique, cuits en biscuit et remis au
four après avoir reçu la couverte.
«Le Cihque cenlo italien ht son apparition chez nous à la suite de la reine Bone, de
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il est même probable que, lors de la consécration de l’église de Sainte-Croix, accomplie
le '14 septembre 4 295, il était déjà complètement achevé et placé dans ce même endroit
qu’il occupe au milieu du chœur, les pieds tournés vers le maître-autel ; il est acces-
sible de tous côtés, et visible dans tous ses détails.
«Voilà, Monsieur, ce qui m’a paru mériter votre attention, concernant le monument
de Henri IV. Je vous demande pardon si, répondant à votre bienveillante invitation,
je l’ai fait d’une manière trop prolixe peut-être; mais ne me croyant pas assez compé-
tent, ni trop bien informé pour présenter mes propres opinions sans commentaires ni
pièces à l’appui, j’ai mieux aimé vous donner, Monsieur, tous les détails nécessaires,
pour vous mettre à même de juger en connaissance de cause.
«Aussi je m'estimerai heureux, Monsieur, si vous daignez me communiquer, un
jour, votre opinion décisive sur ce curieux monument; elle pourra me guider, j’en suis
sûr, dans mes études ultérieures sur des objets analogues pour lesquels notre pays est
une mine vierge encore de toute investigation approfondie.
« Malgré toute la longueur de cette lettre, j’espère que vous ne m’en voudrez pas,
Monsieur, si j’ose ajouter encore quelques mots sur une espèce de terres cuites propres
surtout à nos contrées boréales; ce sont les carreaux de poêles. La rigueur du climat a
fait adopter, depuis un temps immémorial, l’usage des poêles, les cheminées connues
dans d’autres pays ne pouvant pas nous suffire. Les poêles primitifs, ainsi qu’ils le sont
encore aujourd’hui chez nos villageois, étaient en terre glaise battue, ou bien en briques
tant crues que cuites au feu. Ce n’est que vers le milieu du xve siècle que l’usage de
les revêtir avec des carreaux simplement biscuits ou vernissés s’est répandu; il est
même probable qu’il nous fut apporté de la Scandinavie; ce genre de calorifères portant
jusqu’à présentie nom de poêles suédois. Les carreaux enterre cuite, adoptés d’abord
dans les maisons riches, participèrent bientôt de l'ornementation à la mode du jour, et
devinrent même quelquefois de véritables objets de luxe. Chaque carreau reçut un
relief représentant tantôt les armoiries du seigneur et de sa famille, tantôt d'autres
ornements. J'ai, dans ma collection, de ces carreaux du xvc, xvip et xvne siècle, et j’en
connais beaucoup qui sont vraiment admirables de richesse et d’exécution. Un vernis
vert, brun, marbré, couleur de chocolat au lait ou même noir, avec un reflet métallique,
les recouvrait primitivement, mais c’est à partir du commencement du xvnc siècle
surtout que nous les voyons parés de peintures en véritable émail, sur fond blanc
à l’étain. Ainsi nous apparaissent les superbes carreaux cracoviens, de 1630, 1647,
etc., larges de0n,270 à 0m400, hauts de 0m520 à 0m470), enrichis d’armoiries, de légen-
des, et de divers ornements modelés en relief et peints de couleurs éclatantes, dorés
même parfois. Les poêles d’une grandeur énorme étaient surmontés de frontons avec
vases, statues et emblèmes en terre cuite émaillée. Vers le milieu du siècle passé, les
carreaux devinrent beaucoup plus simples, unis, avec un petit filet saillant et un orne-
ment quelconque au milieu, le vert de gris dominant comme couleur. On commença
aussi à faire venir alors des carreaux en faïence de Saxe, avec des dessins de chasse,
carreaux bien connus des amateurs. Enfin, ce n’est que depuis une cinquantaine
d’années environ qu’on emploie plus généralement des carreaux dits en faïence ou en
porcelaine, couverts d’un émail blanc uni. Tous ces carreaux, vernis ou émaillés, doi-
vent être classés parmi les véritables terres cuites; ils sont en argile plus ou moins
rouge, bien choisie et quelquefois purifiée à la mécanique, cuits en biscuit et remis au
four après avoir reçu la couverte.
«Le Cihque cenlo italien ht son apparition chez nous à la suite de la reine Bone, de