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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 1.1869

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Nr. 2
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Lafenestre, Georges: André Lemoyne, Les charmeuses: [Rezension]
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https://doi.org/10.11588/diglit.21404#0206

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196

GAZETTE DES BEAUX-AKTS.

demande plus à des feuilles hors texte. Peu à peu, pourtant, il s’enhardit, il aborde
des études plus compliquées, il embrasse la nature d’un œil plus ferme et plus ouvert;
en même temps, il se rend mieux compte du procédé qu’il emploie, des ressources et
des dangers de l’eau-forte; et comme, de toute évidence, il apporte à son travail une
attention scrupuleuse et une exquise finesse d’esprit, le volume ne s’achève pas sans
qu’il ait pu, do progrès en progrès, nous donner quelques planches très-vibrantes et
très-émues, telles que : Nuit tombante, Marguerite, Chanson marine. Paysage
normand.

Un coup d’œil exercé y peut reprendre encore sans doute plus d’une incertitude
et d’une faiblesse, plus d’une défaillance de la pointe qui s’égare ou s’abandonne. Telles
qu’on les voit pourtant, ces eaux-fortes ont un charme particulier de grâce naïve et de
délicatesse juvénile qui les rend très-sympathiques et pénétrantes. Un jour viendra
où l’artiste, plus maître de ses instruments, exprimera, avec une puissance plus entière,
tout ce qu’il aime, dans la Campagne, et connaît déjà si intimement (on le sent, à ses
recherches), les lisières touffues des bois aux silhouettes étranges et fines, les bas-fonds
marécageux où les flaques d’eau luisent tristement parmi les oseraies, et les rivières
sans nom, vagabondes et joyeuses, qui sautillent, sous les cressons fleuris, à travers
les racines trouées des saules pâles. Jamais il ne se sentira si ému, en présence de
l’œuvre à commencer, qu’il semble l’avoir été cetti? première fois; jamais il n’y impri-
mera si naïvement cette fraîcheur délicieuse et passagère des premières sensations
données à l’homme, dont l’àme s’ouvre enfin pleinement à l’intelligence du beau et du
vrai, par les spectacles les plus simples et les plus grandioses de la nature. La sincérité
charmante avec laquelle M. de Bellée aborde les difficultés qu’il rencontre, sans vouloir
jamais les tourner ni les vaincre autrement que par des moyens naturels et francs,
nous est un sûr garant, d’ailleurs, de ses succès futurs dans ce genre.

A côté de M. de Bellée, qui a mis douze eaux-fortes dans ce volume, nous y
trouvons encore M. Édouard Leconte avec une marine d’une touche solide et franche,
et M. Feyen-Perrin avec une planche, très-vive et très-énergique, gravée pour le
poëme le plus saisissant de M. André l,emoyne, les Trois Vieilles. Aux paysages
gracieux et tendres a succédé le tableau d’intérieur, sombre et dramatique dans la
lumière calme, comme les vers précis du poëte. Un seul regret s’éprouve devant cette
unique illustration de M. Feyen-Perrin : c’est qu’il n’ait point interprété de la môme
façon les autres scènes intimes éparses dans l’œuvre de M. Lemoyne.

GEORGES I. A PENES T RE.
 
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