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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 1.1869

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Nr. 3
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Champfleury: Lettre à M. Mérimée à propos de quelques monuments inédits de la caricature antique
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https://doi.org/10.11588/diglit.21404#0285

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GAZETTE DES BEAUX-AliTS.

tout à fait antique. Cicéron s'en amusa [cicer en latin signifie pois chiche).
Les anciens n’étaient pas si solennels que l’Université nous les montre
habituellement, et il faut se rappeler que même les Lacédémoniens, outre
les temples consacrés à la Peur, à la Mort, en avaient un dédié au Rire.

Chose singulière que ces bandelettes dont veulent entourer l’antiquité
les « fanatiques du beau », ainsi que me l’écrit un maître de con-
férences à l’École normale, M. Chassang, qui, combattant pour la sculpture
grecque, craint que la blancheur des marbres dont il chante la pureté
ne soit altérée, si quelque veine sarcastique y est découverte.

Sans doute le culte du beau fut presque général en Grèce, les monu-
ments le prouvent; mais il est dangereux qu’un spiritualisme de parti
pris s’étendant jusqu’aux Latins n’épaississe le bandeau et n’empêche,
comme dans la circonstance actuelle, d’admettre l’indication précise d’un
historien sur les choses de son temps.

« A Rome, dit Plutarque, on dédaigne les peintures, les statues, la
beauté des jeunes esclaves et des femmes. On cherche sur le Forum ceux
qui ont les bras ou les jambes de travers, trois yeux et une tète d’au-
truche, ou bien un hermaphrodite. »

Dans cette dépravation du goût n’y a-t-il pas une leçon? L’anatomie
du laid est fertile en enseignements, à condition qu’on ne s’y complaise
pas et qu’on lui oppose l’harmonie des grandes lignes, la quiétude,
l’ineffable contentement que laissent à l’esprit et aux yeux une belle com-
position, d’éclatantes colorations.

Vivre sans Beau, autant vivre sans respirer ; mais la satire, la parodie,
la caricature, renferment de précieuses indications pour ceux qui veulent
voir clair dans le passé, et c’est pourquoi je reprends une fois de plus la
vrille, m’efforçant de trouer les planches qui nous enlèvent la vue de
l’antiquité.

On sait par les poètes satiriques que les hommes au pouvoir n’étaient
pas épargnés; aussi, les archéologues ont-ils cru pouvoir appliquer
les plus grands noms à des monuments sans importance, à des lampes
d’argile commune dont les potiers, pour égayer le peuple, décoraient les
contours de sujets plaisants.

Un ancien catalogue des terres cuites du musée de Naples donne la
description d’une « lampe figurant un homme, les cheveux rasés, Achevai
sur une outre, et qui approche du bec {sic) un papyrus, dans l’attitude
de quelqu’un qui lit et déclame. » A cette notice le rédacteur a ajouté:
« caricature relative peut-être à Démosthènes. »

L’étude de l’art parodique ayant été négligée au début par les
archéologues, ils se trouvèrent nécessairement embarrassés de fournir
 
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