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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 24.1881

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Nr. 4
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Chantelou, Paul Fréart de; Lalanne, Ludovic [Hrsg.]: Journal du voyage du cavalier Bernin en France, [15]
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https://doi.org/10.11588/diglit.22844#0390

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JOURNAL DU VOYAGE DU CAVALIER BERNIN EN FRANGE. 363

à lui, on ne lui avait parlé de rien, mais que, quand on lui aurait parlé, il vou-
lait accompagner le Cavalier; que de cet hiver il n’aurait que faire ici, qu’aussi
bien les choses n’allaient pas si vite, et qu’il voyait bien qu’on ne se portait
pas à l’ouvrage avec grand’chaieur. J’ai répondu que les entrepreneurs vou-
laient, par la lenteur et la dépense, faire connaître qu’il ne fallait pas tra-
vailler à la journée ; qu’il avait vu le jour d’hier comme M. Colbert leur avait
parlé. Sur cette entrefaite, le Cavalier est venu et l’entretien a fini. Sur le
soir est venue M"ie de Lionne et M. le Président de Maisons avec M. de Lon-
gueil et M. de la Haye le père L Je leur ai montré les dessins. Après, M,nc de
la Baume s’en allant en Touraine est venue dire adieu au Cavalier. J’oubliais
que M. Desfontaines, venu avec Mllie de Lionne, m’a dit : « J’ai peur qu’on
ne dégoûte ces Italiens, voyant la lenteur avec laquelle on travaille. »

Le dix-neuvième, ayant rencontré M. Passart1 2, je l’ai mené chez le Cava-
lier. Il a trouvé le buste fort ressemblant, mais la mâchoire un peu marquée.
Garnart3 y est aussi venu et a trouvé le nez un peu plus gros d’un côté que
d’autre et plus étroit derrière que devant, la draperie de manière, comme
a-t-il dit, que le Cavalier a accoutumé de la faire. Il a ajouté que c’était une
grande paiience que celle que demande la sculpture, ce qui est contraire à la
vivacité de l’esprit. Le Cavalier durant cela était auprès du scarpelin qui
travaillait au pied du buste. Il lui a demandé de quelle qualité était son
marbre. Il lui a répondu : Collo. «11 est donc, ça dit le Cavalier, de même que
celui du buste; » puis a ajouté qu’il s’émerveillait comment il avait pu
exécuter ce qu’il y avait fait; que questo erci fuor ciel naturale 4, qu’il y avait
peut-être plus de cinquante ans que ce marbre était à Paris. Je lui ai demandé,
voyant l’assiette de ce pied de buste carrée, comment elle se pourrait adapter
au globe de la base. Il m’a répondu qu’on creuserait cette assiette à la pro-
portion de la globulence; et ayant achevé d’ôter le lien de marbre5 qui sou-
tenait la draperie de son buste, il m’a demandé ce qu’il me semblait de la
voir ainsi dégagée. Je lui ai dit qu’elle me satisfaisait extrêmement. Il m’a
ajouté qu’il s’était étudié à faire, che non paresse6 che questo svolaszo fosse
sopra un chioclo, o fosse seccarello.

M. le Nonce étant entré sur ces entrefaites, et avec lui l’abbé Butti, il leur
a dit : « Quand je quitterai ce pays-ci, je suis obligé de dire et de l’écrire sur
toutes les portes (pour me servir de sa façon de s’exprimer) : che non c’e a
Parigi nessuno di si buon guslo che il signor de Chantelu, o che sappia tanto di

1. La Haye de Vauderet, maître d’hôtel de la Reine.

2. Passart, conseiller maître des comptes, est mentionné dans la liste des Curieux de
Paris comme possédant une collection de tableaux.

3. Hubert Gamar ou Gamard, sieur de Crezé, lieutenant des chasses du Louvre, figure
dans cette môme liste comme ayant une collection de tableaux anciens et modernes.

4. « Que cela était surnaturel. »

5. Ce qu’on appelle aujourd’hui le tenon.

6. « Qu’il ne parût pas que cette draperie flottante fût retenue par un clou ou fût... » Je
renonce à traduire le mot seccarello, dont je n’ai pu trouver nulle part la signification. Peut-
être est-ce un mot défiguré par le copiste.
 
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