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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 6
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Albert, Maurice: Le salon de 1890 aux Champs-Élysées, [1], Peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0493

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LE SALON DES CHAMPS-ELYSÉES. 451

chons d’abord les peintres aux noms respectés, qui, pendant la
guerre artistique dont le grand combat se livre en ce moment, ont
dirigé le mouvement et commandé en chef.

Yoici M. Bouguereau. Il devait à ses troupes, il se devait à lui-
même un envoi important. Et jamais, en effet, l’artiste n’a été
plus sérieux, plus désespérément impeccable. Qui donc perdrait
sa peine à chercher, je ne dis pas une faute, mais une hésitation
dans le dessin, la composition et le modelé des Petites mendiantes et
des Saintes femmes au tombeau? Quelle sûreté de main et quelle
sérénité d’àme! Quelle sévère ordonnance, et quelle majestueuse
impassibilité! Ce n’est, hélas! que dans les tableaux de M. Bougue-
reau qu’on rencontre des mendiantes aux visages si propres, si
sains et si frais, aux ongles si brillants et si roses, aux robes dont
les pièces, les déchirures et les trous, rares d’ailleurs, ont une si
coquette élégance. M. Bouguereau peut apprendre aux élèves com-
ment on dessine; il n’apprendra pas aux riches comment et combien
on souffre autour d’eux. Entre ces Petites mendiantes et le Pauvre
enfant de M. Pelez, l’aumône pourrait-elle hésiter? Il n’y a pas plus
de vérité et d’émotion dans les Saintes femmes au tombeau. Cette haute
et large porte d’une massive architecture ne saurait être l’entrée du
caveau de Joseph d’Arimathie, de cette chambre funéraire, que
l’imagination, aidée des découvertes archéologiques et des descrip-
tions de M. Renan, se représente basse et sombre, taillée sous un
roc incliné. Dans ces trois femmes artistement groupées, que fige
une pose de modèle, et dont les larmes discrètes n’ont pas enlaidi les
visages gracieux, calmes et modernes, comment reconnaître ces
femmes galiléennes, Marie de Magdala, Salomé et Marie Cléophas
qui « prosternées, pleuraient abondamment », et que l’apparition de
Jésus, et ses paroles : « Ne me touchez pas », avaient écrasées sur le
sol, folles de surprise, ivres de joie? Ce sont là, dira-t-on, des
chicanes d’archéologue. — Soit! Il est très vrai que l’antiquité, sur-
tout quand on la comprend mal, l’antiquité de pacotille et la fausse
couleur locale, peuvent jouer de méchants tours aux artistes et pro-
duire de déplorables résultats. Sans aller chercher bien loin, voyez
plutôt le Harem tliebain de M. Rochegrosse, que fait oublier par bon-
heur son Combat de cailles, et la Sainte Agnès de M. Glaize, dont nous
console à peine la très vivante et très fougueuse Course de chars
romains, de M. Clieca. Il est très vrai aussi que certains chefs-d’œuvre
des maîtres d’autrefois, et des tableaux récents, non oubliés, comme
la Sainte Cène et Laissez venir à moi les petits enfants, de M. de Uhde,
 
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