Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 13.1895

DOI issue:
Nr. 1
DOI article:
Ritter, William: Allemagne, Pologne et Italie: correspondance de l'étranger
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.24666#0079

DWork-Logo
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
70

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

déniés exhibitions de Munich. A défaut de Bôcklin, MM. Stuck et Sandreuter y
trônaient de nouveau avec des oeuvres fort remarquables. M. Sandreuter s’y
présentait, en tant que' paysagiste et animalier, avec de réelles qualités de
fermeté, de vigueur et de stricte observation de la nature, et y prouvait une fois de
plus qu’être un peintre d'idée et de composition n’empêche pas d'être un vigoureux
peintre de la réalité. Quant à M. Stuck, il avait apporté toute une série d’œuvres
antérieures à la guerre, montrant en lui le développement d’un artiste de race,
qui arrive mieux chaque année à enfermer ses idées, même les plus fantastiques,
en des formes intelligibles, écrites avec un soin et une conscience très louables.
11 faisait également à Bâle œuvre de sculpteur, de joaillier et d’encadreur bibe-
lotier, d’un goût très sùr et d’une diversité tout à fait méritoire.

On sait que Bâle, grâce à Holbein autrefois et à Bôcklin de nos jours, est une
des villes les plus importantes comme noyau de culture artistique. De même qu'à
Francfort, il y subsiste une petite école spéciale de peinture très caractérisée, dont
l’originalité a été souvent éprouvée et prisée dans les grands centres artistiques tels
que Berlin, Dusseldorf, Munich et Dresde. A Francfort, ce sont surtout des peintres
et lithographes : MM. Tlioma, de Pidoll, Steinhausen, Rudolf Gudden, Mme Bella
Wehl, etc. ; à Bâle, des peintres et fresquistes, tels que (outre M. Sandreuter)
MM. Stuckelberg et Preiswerk. M. Stuckelberg pour avoir été mis en scène un peu
drôlatiquement par M. Alphonse Daudet dans Tartarin sur les Alpes, n’en a pas
moins revêtu les parois intérieures de la chapelle de Guillaume Tell, ouverte comme
l'on sait en plein vent, de fresques d’une savoureuse rudesse helvétique, dont les
types très locaux ont été étudiés avec beaucoup de soin dans les cantons primitifs;
M. Preiswerk, lui, est un délicat et féminin mythologue qui, après Bôcklin et
M. Sandreuter, fait un peu l’effet, toutes proportions gardées, d’Euripide après
Sophocle et Eschyle.

Du 1er juillet au 1er octobre, Lemberg, la coquette capitale officielle de la Pologne
autrichienne, a affirmé la vitalité de son ancienne nationalité par une exposition
exclusivement polonaise, qui n’a pas manqué d’un certain éclat et dont on aurait
dù parler davantage. Sans compter la foule spectatrice des paysans, aux costumes
nationaux bariolés, accourus de tous les points du royaume démembré, les trois
attractions principales de cette fête galicienne ont été : l'exposition des moyens
d’exploitation des sols pétrolifères du pays, l’exposition de l'imprimerie et des
antiquités locales, parmi lesquelles, ce qu'on ne reverra plus ailleurs, une série très
complète et curieuse d’objets du cuite juif d’une très haute antiquité, enfin le pavillon
des Beaux-Arts. L’œuvre entière de Jean Matejko, le peintre national de Cracovie,
mort il y a deux ans, y avait été réunie. Et réellement on était pris d'une certaine
émotion en présence de ces immenses pages de peinture historique, brossées par un
myope qui, littéralement, était presque obligé de mettre le nez dans ses couleurs et
de le promener à côté de son pinceau sur ses toiles. 11 y avait là toute une série de
ces tableaux où des centaines de personnages grandeur nature se démènent,
enfiévrés et fougueux, dans de somptueux décors d'une restitution absolument
exacte. Nul comme Jean Matejko ne sut peindre les foules, les déchaîner, les
passionner, un peu à la façon de Bach dans les chœurs de ses oratorios. Un tout-
puissant courant d’amour pour son pays passe à travers sa peinture ; un souffle incen-
diaire éclaire quelques-unes de ses œuvres les meilleures, telles que cette fameuse
 
Annotationen