LA PEINTURE FRANÇAISE AU MUSEE DE MADRID. 307
établie; voici les conclusions auxquelles nous avons été conduits par
un minutieux examen des sources :
M. de Madrazo hésite à affirmer qu'il y ait une seule toile de
Poussin remontant jusqu’à Philippe IV. A priori cependant, il est
peu vraisemblable que Velâzquez, envoyé à diverses reprises en
Italie pour acheter ou commander des tableaux aux meilleurs
peintres du temps, ait totalement négligé le plus illustre de tous.
Mais on a de meilleures raisons qu’un argument pour certifier qu’il
n’en a pas été ainsi. Félibien, l’ami de Poussin, après avoir dit
« qu’il serait trop long d’énumérer les tableaux que celui-ci fit à
Rome avant de se rendre en France », ajoute expressément : « Il
en fit alors qui furent portés en Espagne, à Naples et en d’autres
lieux L » Et voici la notice de Palomino Arelasco, peintre ordinaire
du roi d’Espagne, dans son inventaire de 1714 : « On voit de lui
(Poussin), au palais de Buen-Retiro, Saint Jérôme clans le désert et le
Samaritain, tous deux peints sur toile, dont les figures sont de demi-
nature 1 2 3. » Le Samaritain n’est pas à Madrid; les listes les plus
complètes des œuvres du maître n’en gardent pas trace; mais, devant
l’affirmation de Palomino Velasco, artiste lui-même et grand admi-
rateur de Poussin, le doute n’est pas permis : la toile absente a dû
être brûlée dans l'incendie de 1734.
Quatre autres se présentent sans aucune mention d’origine : la
Chasse de Méléagre (n° 2051), le Sacrifice de Nos (n° 2044), Y Exaltation
de sainte Cécile (n° 2047) et Y Anachorète cia milieu des animaux (n° 2036).
On ne peut guère supposer que l’arrivée de ces tableaux soit antérieure
à 1724, car elle n’eût certainement pas échappé à Velasco, qui cite, de
Poussin, jusqu’à la Vierge del Pilcir, àSaragosse; ils ont dû être achetés
directement à Rome par les ambassadeurs de Philippe V, dans les gale-
ries particulières où ils étaient enfermés depuis l’achèvement, caron
ne parait pas les avoir connus avant le commencement de ce siècle L
1. Vie des plus excellents peintres, t. IV, p. 23.
2. Histoire des peintres espagnols (traduction française de 1743), n° 179. Le
Buen Reliro était la résidence favorite de Philippe IV. D’ailleurs le texte de
Félibien suffit à établir que les tableaux dont il s’agit ont été envoyés en Espagne
du vivant de Poussin, c’est-à-dire avant 1665, sous le règne de ce même Philippe IV.
Ajoutons que, d’après Sandrart, Velâzquez aurait acheté à Poussin un tableau de la
Peste, pour le compte du roi d’Espagne ; mais (comme l’a remarqué M. André Michel),
la plupart des acquisitions signalées par l’écrivain allemand ne furent point livrées.
3. Ils ne figurent pas (sauf le Sacrifice de Noé) dans la liste de Maria Graliam,
(Vie et œuvre de Poussin), ni dans celle de Y Abrégé de la vie des plus excellents
établie; voici les conclusions auxquelles nous avons été conduits par
un minutieux examen des sources :
M. de Madrazo hésite à affirmer qu'il y ait une seule toile de
Poussin remontant jusqu’à Philippe IV. A priori cependant, il est
peu vraisemblable que Velâzquez, envoyé à diverses reprises en
Italie pour acheter ou commander des tableaux aux meilleurs
peintres du temps, ait totalement négligé le plus illustre de tous.
Mais on a de meilleures raisons qu’un argument pour certifier qu’il
n’en a pas été ainsi. Félibien, l’ami de Poussin, après avoir dit
« qu’il serait trop long d’énumérer les tableaux que celui-ci fit à
Rome avant de se rendre en France », ajoute expressément : « Il
en fit alors qui furent portés en Espagne, à Naples et en d’autres
lieux L » Et voici la notice de Palomino Arelasco, peintre ordinaire
du roi d’Espagne, dans son inventaire de 1714 : « On voit de lui
(Poussin), au palais de Buen-Retiro, Saint Jérôme clans le désert et le
Samaritain, tous deux peints sur toile, dont les figures sont de demi-
nature 1 2 3. » Le Samaritain n’est pas à Madrid; les listes les plus
complètes des œuvres du maître n’en gardent pas trace; mais, devant
l’affirmation de Palomino Velasco, artiste lui-même et grand admi-
rateur de Poussin, le doute n’est pas permis : la toile absente a dû
être brûlée dans l'incendie de 1734.
Quatre autres se présentent sans aucune mention d’origine : la
Chasse de Méléagre (n° 2051), le Sacrifice de Nos (n° 2044), Y Exaltation
de sainte Cécile (n° 2047) et Y Anachorète cia milieu des animaux (n° 2036).
On ne peut guère supposer que l’arrivée de ces tableaux soit antérieure
à 1724, car elle n’eût certainement pas échappé à Velasco, qui cite, de
Poussin, jusqu’à la Vierge del Pilcir, àSaragosse; ils ont dû être achetés
directement à Rome par les ambassadeurs de Philippe V, dans les gale-
ries particulières où ils étaient enfermés depuis l’achèvement, caron
ne parait pas les avoir connus avant le commencement de ce siècle L
1. Vie des plus excellents peintres, t. IV, p. 23.
2. Histoire des peintres espagnols (traduction française de 1743), n° 179. Le
Buen Reliro était la résidence favorite de Philippe IV. D’ailleurs le texte de
Félibien suffit à établir que les tableaux dont il s’agit ont été envoyés en Espagne
du vivant de Poussin, c’est-à-dire avant 1665, sous le règne de ce même Philippe IV.
Ajoutons que, d’après Sandrart, Velâzquez aurait acheté à Poussin un tableau de la
Peste, pour le compte du roi d’Espagne ; mais (comme l’a remarqué M. André Michel),
la plupart des acquisitions signalées par l’écrivain allemand ne furent point livrées.
3. Ils ne figurent pas (sauf le Sacrifice de Noé) dans la liste de Maria Graliam,
(Vie et œuvre de Poussin), ni dans celle de Y Abrégé de la vie des plus excellents