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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 13.1895

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Nr. 4
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Mély, Fernand de: Questions d'art: à propos de l'exposition des arts réligieux à Lyon
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https://doi.org/10.11588/diglit.24666#0333

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316

QUESTIONS D’ART.

lumière aux harmonies terrestres? Et qu’on ne la nie pas, cette
mélodie. Suivez sur la muraille ce faisceau coloré; d’instant en
instant il change : du soleil levant à la pâleur de la lune, pas une
minute il ne se ressemble : le soleil marche, les arceaux le brisent :
le nuage qui passe, l’oiseau qui le traverse, le crépuscule qui tombe,
la lune qui se lève, autant de modifications : les nuances changent,
le ton reste lui-même: rien ne détonne, mais il faut comprendre.

Me voilà, dira-t-on, bien éloigné de mon sujet. Moins qu’on
pourraitl e penser. Parler des verrières anciennes, dire leurs splen-
deurs, raconter les sentiments qu’elles font naître, c’est par cela
même indiquer leur destination, c’est écrire ce qu’on leur demande,
ce qu’on attend d’elles. Les vitraux modernes nous satisfont-ils? Il
y a là une distinction bien facile à établir.

Prenons les deux écoles. D’abord celle du xne et du xme siècle.
Elle procède de l’Orient; le vitrail est une mosaïque de verre, où
chaque couleur, séparément cernée d’une ligne obscure de plomb, se
détache nettement de sa voisine. Ce plomb, il n’est autre que le trait
noir des céramistes assyriens, qui donne un relief si puissant à leurs
teintes, cependant sans dégradations.

Avec le xive siècle, au contraire, commence la peinture sur verre.
Sur le même fragment se trouvent réunies plusieurs couleurs assem-
blées par l’artiste; le dessin est fini, les détails accentués, toujours
de plus en plus, jusqu’au moment où Linard Gonthier exécutera les
délicates miniatures transparentes du musée de Troyes.

Ne faut-il donc pas voir là deux arts absolument distincts,
aujourd’hui confondus? Mais il en va de cela comme de la musique
religieuse. Pour l’avoir revisée, améliorée, en vue d’une forme nou-
velle, on a modifié le plain-chant à tel point qu’il est à peine recon-
naissable. Faite d’harmonie pure, la musique grégorienne est une,
rien n’en saurait être détaché sans en détruire l’ensemble. Il en
est de même du vitrail du moyen âge, tandis que, comme la musique
religieuse moderne, le vitrail du xvie siècle, composé de détails
précieux, il est vrai, chacun en particulier, perd, par l’éloigne-
ment, tout ce que l’autre gagne par le recul. Est-ce là leur seule
différence? Il en est une autre qui montre bien toute leur dissem-
blance. Le premier se rit des ans. Que peuvent les intempéries, les
pluies, le soleil sur ces verres unicolores, dont les dégradations
bistrées peuvent disparaître, remplacées qu’elles sont par la patine
incomparable du dépolissage naturel de la verrière? Mettez au
contraire les peintures sur verre aux fenêtres de nos églises; que
 
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