Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 27.1902)

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

d’iconographie, de juger les gens d’après leur mine, j’avoue que j’aime mieux
reconnaître, dans le buste Stroganoff, un vieux stoïcien aux tendances ascétiques,
qu’un politique retors, un ignoble débauché et un tacticien de génie (César était
tout cela à la fois). Or, s'il y a de la dureté et comme un air de fatigue vaincue
dans le buste Stroganoff, je n’y vois aucune trace de ce,scepticisme de manieur
d’hommes, à la Frédéric II, qui me paraît percer dans le buste de Pise. Quoi
qu'il en soit, Alexandrie nous a rendu, une fois de plus, une œuvre de grand
prix, et tous les musées peuvent envier au comte Stroganoff la possession d’un
marbre qui méritera une place d’honneur dans les histoires futures du portra

romain.

XIV

Ce Courrier est déjà long, et
je n’ai parlé que d’œuvres de la
plastique ; ce n’est pas, assuré-
ment, qu’il n’y ait pas de beaux
dessins à signaler, tant sur argile
que sur métal ; mais il faut savoir
se borner. Je me contente donc
de reproduire, à la fin de cet
article, un merveilleux couvercle
de miroir gravé du Musée Bri-
tannique, qui, déjà publié par
M. Murray, l’a été de nouveau et
plus parfaitement par M. de
RidderU La scène représente
une nymphe, assistée d’un petit
Bros androgyne -- un éphèbe et
non un enfant— et accompagnée
de son cygne familier, jouant aux dames avec un vieux Pan, qui n’a pas l’air
d’être un partenaire commode. Quel est l’enjeu? Les hypothèses sont permises.
C’est un chef-d’œuvre de grâce et d’esprit, probablement postérieur de peu à
l’an 400. M. de Riclder a relevé, dans ce charmant tableau, l’emploi des hachures,
encore visibles sur notre reproduction. Ces hachures ne servent pas seulement à
marquer des poils ou des saillies musculaires, mais l’ombre portée, c’est-à-dire
le relief. Ce procédé se constate dans la céramique dès le ve siècle; il est très
fréquemment employé sur les cistes à bijoux de Préneste et dans les peintures
de Pompéi appartenant au style illusionniste. Bien que l’observation en eut déjà
été faite, le sujet n’avait pas encore été étudié avec le détail qu’il comporte, et
nous devons des remerciements à M. de Ridder pour l'avoir traité en artiste et en
érudit.

SALOMON REINACH 1

M I K OIR GRAVÉ
( Musée Britannique . )

1. Bulletin de Corresp. hellénique, 1899, p. 317, pl. ii.