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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 27.1902

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Nr. 2
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Dukas, Paul: Chronique musicale
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https://doi.org/10.11588/diglit.24809#0178

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CHRONIQUE MUSICALE

Académie Nationale de musique : SIEGFRIED, par Richard Wagner,
version française d’ALFRED Ernst.

onsidérée isolément, la seconde journée de VAnneau du Nibelung
offre un sens poétique et musical complet; dramatiquement, elle
n’a de signification que par rapport à ce qui la précède.

Il n’est donc pas hasardeux d’avancer que la représentation
de Siegfried en ouvrage séparé rend presque inintelligibles les
deux tiers d’une action déjà difficile à saisir pour le spectateur
mis au fait par l'Or du Rhin et la Valkyrie. L’exécution, remarquable à certains
points de vue, que vient de nous donner l’Opéra, se ressent, dans son ensemble,
de l’impression incohérente que ne pouvait manquer de produire Siegfried tra-
duit dans une langue qui lui enlève déjà une bonne partie de sa physionomie, et
présenté au public parisien comme une suite d’épisodes lyriques indépendants
du drame auquel ils se rattachent.

Le drame, dans Siegfried, ne repose pas tant, en effet, sur les aventures du
héros dont le nom donne son titre à l’ouvrage, que sur la liaison de leurs péri-
péties à des conflits antérieurement engagés. La fonte de l’épée, la scène de la
forêt et le combat contre Fafner, la traversée du feu et le réveil de la Valkyrie,
n’auraient en eux-mêmes qu’une valeur poétique, non suffisante à fonder l’in-
térêt, si ces adaptations des chants héroïques des Eddas, toutes merveilleuses
soient-elles, ne se rattachaient intimement, d’une part au drame véritable qui
se joue dans la conscience de Wotan et de Brünnhilde, de l’autre à la tragédie
des amours de Siegmund et de Sieglinde qui en est la première conséquence.

Or, il est impossible de faire nettement pénétrer au spectateur non préparé
le sens réel de chacune des parties de Y Anneau du Nibelung, en les jouant
dans un ordre arbitraire et séparément. Le principal personnage de l’œuvre,
Wotan, obéit à des mobiles si complexes, ou, du moins, il se détermine en vertu
de motifs liés à des événements si divers, bien que s’engendrant l’un l’autre, que
l’auditeur, même averti, doit se livrer, pour n’en point perdre le fil au cours de
chaque scène, à une sorte de récapitulation continue, à laquelle le souci de
comprendre les paroles des personnages et de se laisser aller en même temps à
l’émotion musicale fait déjà, par lui-même, assez souvent obstacle.

Quant aux autres, qu’en sera-t-il? Ceux qui n’ont ni lu ni vu jouer l’Or du
Rhin et la Valkyrie ne seront-ils pas portés à se rejeter exclusivement sur les

xxvii. — 3” PÉRIODE .

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