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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 27.1902

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Nr. 5
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Venturi, Adolfo: Les caractéristiques des anciens maîtres italiens, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24809#0413

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LES CARACTÉRISTIQUES DES ANCIENS MAITRES ITALIENS 385

l’Ortolano, peignit des mains dont la peau semble être de fine bau-
druche plisséc.

Parfois les habitudes d’un artiste perdent de leur originalité
par suite des méthodes de l’école. Il arrive que le maître réussit à
attirer chez lui un élève ; de la sorte s’établit une ressemblance
aussi étroite que celle de père à fils, et, quoique un bon observateur
puisse apercevoir la diversité des deux natures, on peut cependant,
au premier abord, rester dans l’incertitude, ne sachant si on est en
face du maître ou de celui qu’il a nourri de sa doctrine. Entre Moretto
et Moroni, il y eut, durant une certaine période, une profonde
ressemblance, et si tel léger allongement des visages — qui sont
identiques, — si telle propension à élancer et à blêmir les corps
— tous détails constatés chez l’élève — ne nous permettaient pas
d’établir des différences entre les deux artistes, bien des œuvres
porteraient encore — comme elles l’ont porté en réalité — le nom du
peintre brescian au lieu de celui de son imitateur bergamasque. Si
d’ailleurs le dessin des deux artistes diffère par l’épaisseur du trait,
les blancs et les noirs y sont indiqués de la même façon, comme sur
une gravure en deux tons.

Gian Battista Moroni sut, il est vrai, par la suite, se créer une
individualité. Mais lorsque le maître exerce sur ses élèves la fascina-
tion du génie, comme Léonard fit sur les siens, ces derniers répètent
les compositions et reproduisent les types affectionnés par le
professeur, comme si c’était chose consacrée. Le génie affaiblit
l’esprit créateur chez ceux qui l’approchent, s’empare de tout disciple
jusqu’à faire taire chez lui la réflexion personnelle, jusqu’à enchaîner
sa spontanéité et l’indépendance de ses gestes. Quiconque a contem-
plé un objet lumineux aura beau s’écarler du phénomène : il en
revoit la forme se dessiner autour de lui, partout où ses regards se
posent; il en arrive de même à quiconque a vu en face la splendeur
du génie.

Les œuvres du maître restent devant l’élève comme des types
de perfection ; les recherches auxquelles l’élève se livre tournent
dans le cercle de ces formes supérieures, immuables, qu’il ne quitte
pas des yeux, alors qu’il devrait s’efforcer, s’essayer encore et tou-
jours à s’exprimer lui-même. Il est bien vrai qu’au fond l’élève
transforme ces types, car son tempérament, tout comprimé, tout
esclave qu’il soit des inspirations suprêmes, perce et se révèle; mais
ce n’est que pour étaler sa faiblesse, son renoncement aux efforts

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3' P É R I O II E .

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