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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 31.1904

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https://doi.org/10.11588/diglit.24813#0400

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BIBLIOGRAPHIE

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donner anx Flandres qu’à enlever à l’Italie, et surtout à l’antiquité. D’ailleurs,
tout ce volume sur la Renaissance, qui comprend les leçons composées les pre-
mières, est infiniment plus mesuré dans les idées et dans les termes que les
deux autres, et, s'il n’est pas celui des trois qui frappe le plus l’esprit du lec-
teur, c’est précisément parce que les théories qu’il contient semblent dès main-
tenant les conclusions probables de l’archéologie.

Il s’en faut que l’on trouve pareille mesure dans le troisième volume. Lorsque
Courajod aborde l’étude de l’art moderne, de nouveau il déclare bien haut la
guerre à l’art qu’il va expliquer, et ce n’est sans doute là ni un moyen de le bien
comprendre, ni une sûre promesse de le traiter avec justice. D’après sa méthode,
qui consiste à associer fortement le sort de l’art à celui de l’histoire, Courajod
ne manque pas d’assimiler le travail d’unification opérée par la monarchie sur
les débris de la féodalité à cette tendance vers la centralisation, qui met au
xvne siècle l’art français sous la tutelle de l’Académie et, par suite, de la royauté.
Et comme celte royauté et cette Académie représentent, d’après Courajod, un
art étranger, l’art italien et son ancêtre, l’art gréco-latin, il reporte sur toutes
les institutions sociales des Valois et des Bourbons l’accusation d’avoir étouffé
l’âme française sous la discipline romaine. Il reprend alors la cause de tous ceux
qui ont résisté à l’unfication. Il devient l’associé loyal des Frondeurs, et déplore
que l’on n’ait tenu nul compte de leur zèle désintéressé pour l’indépendance
provinciale; il se fait l'avocat chaleureux des peintres de l’ancienne maîtrise, et
voit en eux seuls les représentants de l’esprit français; il cherche dans la fonda-
tion des Académies de province un réveil de la personnalité régionale. Courajod
oublie que les Frondeurs ont jugé eux-mêmes leur désintéressement; il ne veut
pas voir dans lalutte contre l’Académie une simple rivalité entre deux monopoles ;
quant aux Académies de province, il est obligé d’avouer qu’elles songent à
copier celle de Paris, bien plus qu’à lui résister. La première erreur est, me
semble-t-il, d’avoir identifié l’art aux mœurs et aux institutions, jusqu’au point
de juger de la valeur des unes par la valeur de l’autre, jusqu’à regretter la
France féodale par amour de l’art gothique, jusqu’à taxer d’impiété le xvne siècle,
qui n’a pas fait de belles églises. La seconde erreur est, à mon avis, d’avoir sup-
posé un antagonisme violent entre le génie de la race et l’esprit académique et
administratif. Tout prouve que la bourgeoisie française, du moins, a toujours
voulu et demandé l’ordre et l’unité au gouvernement monarchique. Aussi ces
invectives contre tous les tyrans de l’art, « traîtres à la patrie », auraient-elles
sans doute bien surpris les peintres de la maîtrise ou les Académies provin-
ciales des xvne et xvme siècles. Courajod défend aujourd’hui la cause de gens qui
ne demandaient pas à être défendus. Il cherche partout des vestiges de l’esprit
gaulois et barbare, convoque le ban et l’arrière-bau de l’armée gothique; et
lorsque, n’ayant rassemblé que vagues débris d’un passé depuis longtemps éteint,
il cherche l’explication de son désastre, comme tous ceux qui s’étonnent d’être
vaincus malgré leur vaillance, il crie à la trahison et accuse la royauté d’avoir
livré l’esprit français à l’étranger.

Toutes ces réserves peuvent se ramener à une seule. Courajod ne s’est pas
contenté d’être seulement un historien. Pour nous, l’historien doit chercher ce
que fut le passé et le raconter autant que possible tel qu’il fut; ce n’est pas son
rôle de nous dira continuellement qu’il l’aurait voulu autre qu’il a été. Mais cette
 
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