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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 8.1912

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Nr. 3
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Rosenthal, Léon: La peinture romantique sous la monarchie de Juillet, 3
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https://doi.org/10.11588/diglit.24885#0265

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LA PEINTUIIE ROMANTIQUE

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pas d’équivoques de tons louches et faux; la couleur dans la nature
est un mélange de tons entiers adaptes les uns aux autres » ; et ceci,
plus nerveux et plus décisif : « Ne pas faire de mélanges dans les
tons, la nature est peinte comme une mosaïque1. » Comment
s’étonner que des intelligences analogues se soient exprimées par
des moyens semblables?

Ainsi Chassériau, par la combinaison d’éléments empruntés s’ef-
força de communiquer un sentiment original. Une petite toile datée
de 1845, Apollon et Daphné, semble résumer la complexité de cet
art. Le dessin s’appuie sur une ossature ingresque, mais, très étu-
dié, il est, en même temps, très libre. La couleur vibre en ondes nom-
breuses dominées par une tache magnifique d’un rouge vénitien.
Par le moyen de ce dessin et de cette couleur on devine, sans oser
s’arrêter à une interprétation précise, que 1 artiste a voulu traduire
quelque pensée sccrclo, la suprématie de l’amour sur la gloire2, ou
plutôt les aspirations vaines d'une âme inassouvie.

Les contemporains, habitués surtout à discuter des problèmes
techniques, furent beaucoup moins sensibles à la personnalité de
Chassériau que déroutés par la complexité et les retours perpétuels
de son métier3. Ils lui prêtèrent le désir d’amalgamer les styles de
Delacroix et d’Ingres1 et ne virent que des efforts de dosage mala-
droit dans le travail par lequel l’artiste ne visait qu’à souligner les
nuances de sa pensée. Seul ou presque seul, Théophile Gautier,
compréhensif et enthousiaste, fut séduit par ce qu'il y avait de pré-
cieux et de rare dans ce talent inquiet; en toute occasion il exalta
Chassériau comme le plus remarquable artiste des générations nou-
velles et salua en lui l’héritier présomptif des génies en possession

1. Valbert Chevillard, ibid., p. 224. Ces notes, par malheur, ne sont pas datées.

2. C’est l’interprétation que Marc Fournier donnait dans un sonnet médiocre,
inspiré par une première traduction du même thème et publié par l’Artiste
en 1844 (4e série, t. t, p. 142).

3. Voici, par exemple, l’impression que donnait à Louis Peisse, au Salon
de 1842, une Descente de Croix de Chassériau : « Considérée dans l’ensemble, cette
composition pèche surtout par défaut d’unité de pensée, de style, de manière. On
cherché en vain à discerner à quelle école, à quel maître, à quelle tradition cette
peinture se rattache; il y a des velléités florentines, bolonaises, allemandes,
mêlées aveclesplus flagrantes inspirations de la routine des ateliers; elle n’est
empruntée à personne sans appartenir pour cela à l’auteur. On n’y voit que des
disparates. Ce qui est vrai du style n’en est pas moins de l’exécution et de sa cou-
leur. » (Revue des Deux Mondes, 1er avril 1842, p. 113.)

4. Dans les eaux-fortes d’Othello, 1 ’Artiste, « trouve réunie à la couleur
de Delacroix toute la fermeté de style de l’école d’Ingres» (8 septembre 1844,
p. 32).

VIII.

4e PÉRIODE.

32
 
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