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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 1.1920

DOI issue:
Nr. 3-4
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Bréhier, Louis: Les trésors d'argenterie syrienne et l'école artistique d'Antioche
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https://doi.org/10.11588/diglit.24918#0198

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

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sont massés en perspective et, bien qu’unis dans un même sentiment, cha-
cun d'eux a une attitude un peu différente. La composition est plus savante
et plus près du bas-relief pittoresque que celle des plats de Kerynia.

Les inscriptions en belles capitales entrent pour une part dans l’ornementa-
tion du calice Tyler, de la patène Kalebdjian et des deux patènes du trésor
de Stûma.

Il faut enfin signaler, surtout sur les bijoux, un goût assez vif pour l’orne-
ment zoomorphique. Sur le bracelet d’or du British Muséum, dont le fermoir
représente la Vierge en buste, l’anneau est orné d’enroulements qui enser-
rent des faisans et des cygnes. De même, au creux de plusieurs cuillers du
trésor de Kerynia, des animaux divers galopent éperdument : c’est un grif-
fon, une panthère, un tigre, un cerf, un bélier. Mais ce goût pour les ani-
maux ainsi que pour les rinceaux de vigne ou les enroulements de feuillage
(calice Kouchakji, bracelet de Kerynia), n’est pas particulier à la Syrie : on
le trouve au même degré en Egypte (fresque de Baouil) : c’est un legs de
l’art hellénistique.

III

Il en va tout autrement du souci constant de vérité qui distingue ces com-
positions. Ici nous touchons à ce qui fait véritablement l’originalité de l’art
syrien : dans un décor de tradition hellénistique un accent profondément
réaliste.

Cette recherche minutieuse de la vérité se manifeste à la fois dans les détails
accessoires du costume ou du mobilier, dans l'attitude des personnages et
dans l’expression de leur physionomie. Vérité matérielle, vérité morale, telle
semble être la formule de cet art.

On constate d’abord que les artistes n’ont pas craint de situer les scènes
bibliques ou évangéliques dans le décor contemporain qu’ils avaient sous les
yeux. Longtemps avant les Primitifs italiens, longtemps avant les Flamands,
les Syriens ont fait servir l’anachronisme à l’interprétation de l’art chrétien
et ils ont légué cette tradition à l’art byzantin. Dans les scènes de la vie de
David, Saül est costumé en basileus. Comme .Justinien sur la mosaïque de
Ravenne il a le nimbe autour de la tête et, sur sa chlamydc attachée à
l’épaule droite par une fibule ornée de pierreries, est brodé le large tabliori
(clavus), insigne de la dignité impériale. Assis sur son trône, impassible au
milieu de ses gardes, il donne audience au jeune David qu’il accueille du
geste de bénédiction rituelle en usage à la cour de Byzance et qui s’avance
les mains jointes dans l’altitude du respect le plus profond. C’est un épisode
de la vie du Palais Sacré au vie siècle qui nous est ainsi conservé.
 
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