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N° 22.

1 Décembre 1874.

Seizième Année.

JOURNAL DES BEAUX-ARTS

ET DE JL, A LITTERATURE

paraissant deux fois par mois, sous Ja direction de M. Ad. SIRET, membre de l’Académie royale de Belgique, membre correspondant
de la Commission royale des monuments, membre de l’Institut des provinces de France, de la Société française d’Archéologie, etc.

OjN" S^IBOINTSHE : à Anvers, chez TESSARO, éditeur; à Bruxelles, chez DECQ et
DUHENT et chez MUQUARDT; à Gand, chez HOSTE et chez ROGGHÉ ; à Liège, chez DE SOER
et chez DECQ: à Louvain, chez Ch. PEETERS ; dans les autres villes, chez tous les libraires. Pour
l'Allemagne, la Russie et l’Amérique : C. MUQUARDT. La France : V RENOUARD, Paris. Pour
la Hollande = MARTINUS NYHOFF, à la Haye. — PRIX ü’jXDBOTSTdSraEjyEKinsrT :
pour toute la Belgique (port compris). Par an, 9 fr. — Etranger (port compris) : Allemagne, Angle-

terre, France, Hollande, Italie et Suisse, 12 fr. Pour les autres pays, même prix, le port en sus. —
Ia, IIX PAR 3N XJATUPU O : 50 c. — KECXjÜYXIj]S : 50 c. la ligne. — Pour les
grandes annonces on traite à forfait. — A.IS'nsrOlS'CIES : 40 c. la ligne. — Pour tout ce qui
regarde l’Administration ou les annonces s’adresser à l’Administration, rue du Progrès, 28, à
St-Nicolas (Flandre orientale) ou à Louvain, rue Marie-Thérèse, 22. Il pourra être rendu compte
des ouvrages dont un exemplaire sera adressé à la rédaction.

SOMMAIRE : Belgique : L’Ecole de Gand —
Bibliographie : Le peintre graveur hollandais-

belge au XIXe siècle. —■ L Amutation. —- Corres-
pondance particulière : Angleterre : Les expo-
sitions artistiques en 1874. — Les fameuses
tapisseries de Salamanque.—Les trois Grâces chré-
tiennes. — Chronique générale. — Concours d’ar-
ehiteeture. -—■ Périodiques illustrés. — Annonces.

Belgique.

L’ÉCOLE DE GAND.

La Revue générale du mois d’octobre contient un
arlicle du plus vif intérêt sur le mouvement artistique
religieux qui s’est, produit à Gand depuis un certain
nombre d’années et qui s’affirme chaque jour un peu
plus. Cet article écrit par M. P. de Hauileville dans
ce style incisif et imagé propre à l’auteur, nous a paru
dépeindre très exactement une situation neuve à notre
époque. Il y a dans la constitution de cette Ecole de
Gand un germe d’avenir et de conséquences qui préoc-
cupe les hommes d’art sérieux et soucieux des intérêts
de nos arts nationaux. A tous ces titres nous publions
ici les passages principaux de l’article de M. de Haul-
leville. Nous avions nous-même projeté de faire un
de ces jours connaître cette Ecole de Gand à nos lec-
teurs, mais M. de Hauileville l’a fait avec trop de
talent pour que nous soyons tentés d’entreprendre de
sitôt un travail de ce genre et pour que nous nous
dispensions de ne point faire notre profit de cette
bonne aubaine.

Maelle est une petite localité dépendante
de la commune de Saint-Denis-Westrem et
se trouve, à cheval sur la route de Courtrai
à Gand, à cinq kilomètres de cette dernière
ville. Maelte-Brugge (Pont de Maelte) est le
nom du Seat de M. le comte Joseph de Hemp-
tinne. L’ancienne maison, bâtie par l’oncle
du possesseur actuel au bord de la route et
à la lisière d’un parc à la végétation luxu-
riante, ressemble à toutes les villas carrées
et monotones, qui abondent dans les plaines
autour de la capitale de la Flandre. A cette
construction, le nouveau propriétaire a
adossé, il y a une dizaine d’années, un bâti-
ment en pur style flamand, d’après les plans
et les dessins de M. le baron Jean Béthune
d’Ydewalie. Ce bâtiment, destiné à être pro-
longé et à remplacer ainsi complètement la
vieille habitation, mérite, à lui seul, d’être
visité. Ceux qui l’ont élevé ont prouvé qu’avec
les antiques traditions de l’art national, ou
peut édifier une maison «moderne» et s’en-
tourer de tout le confort exigé dans l’archi-
tecture depuis 1789. L’oratoire, orné de
superbes verrières sorties des ateliers de
SM. Béthune et de fresques peintes à la colle
par le même maître, est un véritable bijou
artistique. Le mobilier du nouveau château
est, jusque dans les moindres détails, en-
tièrement conforme aux principes de cette
noble architecture.

Quoique ces constructions aient été com-
mencées il y a une dizaine d’années, M. de
Hemptinne n’a pas encore pu se décider à
les achever. Il a voulu d’abord édifier, à la
limite du parc, le vaste orphelinat qui serait
pour lui un titre de gloire, s’il tenait à en
acquérir. C’est un immense bâtiment qua-
drangulaire, dont les lignes extérieures sont
brisées par des saillies « gothiques» et dont
la cour intérieure a la forme d’un cloître,
parce qu’autour du préau central règne une
galerie couverte.Toutes les dépendances sont
organisées avec une intelligence « moderne»
de l’hygiène, de.la chimie, de la physique et
de l’hydraulique. La mécanique et même la
vapeur y jouent leur rôle comme dans une
usine anglaise ou américaine. Le mobilier
entièrement «gothique » est d’une simplicité
antique, qui n’exclut ni l’élégance ni surtout
le bon marché : il possède en outre une so-
lidité qui fait généralement défaut dans l’ébé-
nisterie contemporaine. Les soins les plus
délicats des créateurs de ce monument ont
été réservés pour la chapelle, dont les lignes
simples et pures m’ont vivement frappé.
L’ornementation intérieure est encore en
voie d’exécution ; mais ce que j’en ai vu
laisse deviner un progrès considérable dans
la renaissance de l’art religieux en Flandre.

L’orphelinat, dirigé par des Frères de la
Doctrine chrétienne, contient déjà 230 en-
fants, qui y recevront une éducation reli-
ligieuse, morale, intellectuelle et technique
jusqu’à l’àge de 21 ans. Le but de M. de
Hemptinne et des fondateurs de ces 230 lits
d’orphelins, est de créer des ouvriers chré-
tiens, instruits et habiles, modestes et vigou-
reux, des hommes enfin. L’instruction s’y
donne en flamand.

Il existe, grâce à Dieu, en Belgique, beau-
coup d’hommes généreux et charitables, qui
consacrent leurs efforts et leur fortune à la
bienfaisance, et, certes, les orphelinats ne
manquent pas en Flandre. Mais j’ose dire
qu’il n’en est pas un seul dont l’aspect archi-
tectural, l’ornementation intérieure et l’or-
ganisation générale puissent être comparés
à tout ce qu’on voit à Maelte-Brugge. M. de
Hemptinne, le principal bailleur de fonds de
cet établissement original, et M. Béthune,
son architecte en chef, ont marqué l’œuvre
du sceau de leur personnalité.

Ceux de mes lecteurs qui ont l’honneur
et le plaisir de connaître le premier, savent
qu’il est ce qu’on appelle vulgairement un
homme tout d’une pièce. Quand il a adhéré à
un principe, il l’applique avec la dernière
rigueur. N’essayez pas, à l’aide de distinc-
tions légitimes, de le détourner d’une appli-
cation excessive de tel ou tel principe admis,
ne cherchez pas à corriger les intempérances
de son activité par des considérations em-

pruntées à l’ordre fini et contingent dans
lequel nous vivons, ne lui parlez pas surtout
des salutaires différences entre la thèse et
l’hypothèse ; vous perdrez votre temps : il
passe à travers vos arguments et marche
droit, sans peur ni reproche, vers le but
qu’il s’est proposé. De tels hommes, surtout
quand ils sont ornés comme M. de Hemptinne
des dons de l’intelligence et du cœur, sont
précieux dans l’action, parce qu’ils ne cal-
culent pas la résistance possible des obsta-
cles et que dans l’ardeur de leur foi ils ne
voient devant eux rien d’impossible. Je ne
veux pas trop louer M. de Hemptinne en
toutes choses, d’abord parce que je l’offen-
serais, j’en suis certain, et puis parce que
j’aurais aussi quelques petites réserves à faire
sur les conséquences inattendues qu’il tire
de ses doctrines. Mais ici, à Maelte-Brugge,
en présence des «œuvres» de sa foi. je me
permets de dire tout haut le bien que je
pense, parce que ces œuvres sont trop peu
connues au loin et que je veux contribuer,
dans mon humble sphère, à en répandre la
renommée, pensant travailler ainsi, dans un
rang très-inférieur, à la cause civilisatrice
de la renaissance de l’art flamand, national,
chrétien.

Le grand obstacle que rencontrent les
hommes de la trempe de M. de Hemptinne et
son collaborateur, M. Béthune, dont je par-
lerai tantôt, c’est le manque d’ouvriers, ca-
pables, sinon de comprendre toutes leurs
pensées, au moins d’exécuter les détails de
leurs plans avec une entente technique du
style à réaliser. Le maçon, le tailleur de
pierre, le charpentier, le menuisier, l’ébé-
niste, le serrurier, le sculpteur sur pierre,
le sculpteur sur bois, le peintre, l’orfèvre,
etc., etc., forment une phalange, sans l’union
de laquelle les plans les mieux conçus seront
défigurés dans la réalisation. Il faut trouver
chez les ouvriers l’unité d’exécution, sinon
les détails jureront avec l’ensemble ; le prin-
cipe de l’art étant quelque chose d’exclusi-
vement moral, l’ouvrier le plus adroit gâtera,
malgré son habileté technique ordinaire,
l’œuvre que vous lui confierez, si son appren-
tissage ne l’a pas préparé à comprendre
exactement votre pensée créatrice.

Eh bien, à Maelte-Brugge, on est occupé
à former des centaines d’ouvriers de cette
espèce si rare. Entrés à l’orphelinat dans leur
tendre enfance, ils y reçoivent, avant tout,
sous la vigilance suprême de maîtres délica-
tement choisis, une éducation profondément
chrétienne. L’instruction, qui suit, notez-le
bien, l’éducation, est à la foi théorique et
pratique dans les ateliers annexés à l'établis-
sement. Mais entre la théorie et la pratique
il y a une harmonie absolue, qui n’est dé-
truite ni par le langage des maîtres, ni par
 
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