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189

5. Mort d’Achille (4 m. sur 3 m. 80).

Achille s’est rendu au temple d’Apollon ; il est à genoux
devant l’autel ; deux grands prêtres consomment le sacri-
fice; à ce moment Paris apparaît à la porte, guidé par une
déesse portée sur des nuages ; il a bandé son arc, et la
flèche a traversé le talon d’Achille qui se retourne avec
douleur.

Achille est traité dans un style un peu brutal, mais le
mouvement est juste et bien rendu. L’étonnement des deux
prêtres est exact et vrai et leur geste plein de naturel ;
Pâris ricane et va se retirer, heureux de sa vengeance et
de son crime. Ici encore l’éclat des couleurs a conservé une
remarquable intensité. Le personnage de Pâris offre beau-
coup de grâce et de finesse-.

La bordure.

Elle mesure environ 35 centimètres et, comme nous
l’avons dit, elle n’est pas une des moindres beautés de ces
opulentes tentures.

L’axe supérieur est formé d’un cartouche renfermant un
cartel peint bleu vif et sur lequel, sans doute, dans l’idée du
compositeur, devait se trouver brodé à la main le titre du
sujet. Ce cartouche est accosté de deux génies. A leur droite
et à leur gauche se développent, sur la ligne horizontale, des
guirlandes de fruits et de fleurs enroulés et qui vont par un
linge s’accrocher au bec de l’aigle à deux têtes d’Autriche
lequel figure dans les coins. Les côtés verticaux représentent
des guirlandes du même style que celles de la ligne supé-
rieure et rattachées aussi par un linge au bec de l’aigle.Cette
guirlande compte trois sections principales, l’une est coupée
par un écureuil rongeant une noix; l’autre, juste au milieu,
par un perroquet au repos, la troisième par un oiseau
becquetant des raisins. Au bas, dans les coins correspon-
dant à ceux du haut, on voit des bustes de lions couchés.

La ligne horizontale du bas représente des groupes de fruits
placés à droite, et, à gauche, les armoiries de la famille Ca-
renna qui sont : un arbre allongé dans une bande blanche,
à dextre une étoile à six branches sur champ vert ; à senestre
une étoile à six branches sur champ d’azur.

Les fleurs et les fruits ainsi que l’écureuil, le perroquet et
les oiseaux, sont traités de main de maître. Fleurs et fruits
sont monstrueux de grandeur et d’un dessin qui rappelle la
manière riche et savante de Zegers. Des grenades crevées
exhibant leurs entrailles de carmin et d’or; des figues
entre ouvertes et montrant dans l’entrebâillement de la cou-
pure le curieux travail des cellules intérieures, des prunes
couvertes encore du duvet des brouillards d’été, des cal-
villes aux flancs cannelés, bref, tout l’attirail des luxueuses
beautés de la nature s’y trouve étalé avec une générosité de
talent et de facture qui atteste la collaboration des plus
grands maîtres de cette grande époque où l’art flamand était
arrivé au sommet d’une situation vraiment pléthorique.

Les tapisseries de l’ancien hôtel Du Bois vont être ven-
dues à Anvers, le lundi 18 janvier 1875. Elles ne manque-
ront pas de provoquer dans le monde des amateurs et des
curieux, un mouvement qui sera suivi avec intérêt. Elles sont
dignes d’orner les salles de quelque palais royal ou princier
et même les salons de quelque seigneur de la finance ou de
l’industrie. L’Italie, la France et l’Allemagne recherchent
en ce moment avec avidité les rares et précieux échantillons
d’un art disparu. Nous pouvons donc craindre de les voir
quitter notre pays. C’est pourquoi nous avons voulu, avant
leur départ, consigner ici la trace de leur existence dans
leur patrie pendant deux siècles et demi. N’oublions pas
qu’en agissant ainsi, nous avons affirmé une fois de plus
l’importance extrême de l’art flamand dans la vie artistique
du xvne siècle, et l’on voudra bien se rappeler que cette vie
était alors chez nous la plus brillante du monde : Rubens
succédait à Michel-Ange.

S.
 
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